Ange – Trianon 2020
Art Disto
2020
Christophe Gigon
Ange – Trianon 2020
En 2020, Ange, ce groupe célèbre français à être passé inaperçu (dixit Christian Décamps lui-même), fêtait son demi-siècle d’existence lors de deux soirées mémorables dans le cadre magnifique de la salle du Trianon à Paris. Pour l’occasion, le groupe va passer en revue toutes les époques (et presque toutes les formations) de la geste angélique. Pas moins de treize musiciens ayant embarqué sur la divine galère, au fil des années, ont participé à ces concerts commémoratifs. Parmi cette grosse douzaine de musiciens, on peut relever les membres de la formation actuelle, Hassan Hajdi (guitares et choeurs), Tristan Décamps (claviers et voix), Ben Cazzulini (batterie), Thierry Sidhoum (basse) et Christian Décamps (voix et claviers), seul membre originel de la formation.
Le coffret comporte deux disques (CD) et le concert intégral (deux DVD). Une somme ! Le concert commence par la projection d’images d’archives accompagnées de la narration de Christian Décamps « Caricatures », suivie d’un sublime passage instrumental extrait du non moins sublime « Le Chien, La Poubelle Et La Rose ». « Dignité » est exécuté par Francis Décamps (frère de Christian), le claviériste original de la troupe, et interprété par Tristan Décamps (fils de Christian…et maître actuel des keyboards. Vous suivez ?). Avec « Le Soir Du Diable » apparaît Christian Décamps, accompagné du bassiste de l’époque, Daniel Haas. « Fils De Lumière » enfonce le clou avant qu’une version purement a capella des « Longues Nuits D’Isaac » (par le groupe vocal Chœur De Chauffe) vienne faire retomber un peu la pression. Et on continue avec les classiques de l’âge d’or que constituent « Sur La Trace Des Fées » et « Ode À Emile » (mais beaucoup d’amateurs, dont votre serviteur fait partie, pensent qu’Ange a produit ses meilleurs disques avec la formation actuelle. En effet, des albums comme Troisième Etoile À Gauche (1997) ou La Voiture À Eau (1999) forment des classiques qui peuvent sans problème être mesurés à l’aune des Au-Delà Du Délire (1974) et autres Emile Jacotey. (1975) Mais la nostalgie forme une gangue tenace et indélicate. Marillion, qui a produit certaines de ses plus belles œuvres après le départ de Fish en sait quelque chose !) Le fils Tristan, accompagné d’un corps en chiffons, propose une interprétation très émouvante du dérangeant « Réveille-toi !». Pour refermer le couvercle de l’ Ange seventies, une relecture très bienvenue de l’énorme « Capitaine Cœur De Miel » achèvera de rendre le public captif. Doit-on encore rappeler qu’Hassan Hajdi reste un des guitaristes les plus versatiles et mélodiques du circuit ? Une véritable Formule 1 toute de douceur et de volupté. Jean-Michel Brézovar et Gérard Jelsch (guitariste et batteur d’origine) n’ont hélas pas pu participer à la fête.
Les années 80 commencent, comme dirait Michel Jonasz. Ce ne fut naturellement pas la période la plus mémorable de l’équipe même si certains disques méritent vraiment une redécouverte passionnée. Vu D’un Chien (1980), La Gare De Troyes (1983) et Fou (1984) se dévoilent véritablement comme de superbes productions. Pas mal pour une décennie que l’on dit honnie, non ? « Vu D’un Chien », « La Gare De Troyes », « Là Pour Personne » et « Fou/Crever D’amour » permettent d’accueillir quelques-uns des musiciens qui avaient œuvré durant cette période (le guitariste Serge Cuenot, le bassiste Laurent Sigrist et le batteur Fabrice Bonny).
Les années 90 ont vu la sortie du fabuleux Les Larmes Du Dalaï-Lama (1992) dont est extrait l’emblématique « Le Ballon De Billy », agrémenté d’un solo de guitare dantesque d’Hassan. On pense avec émotion aux six-cordistes ayant œuvré sur la version originale de ce « tube » : Jean-Michel Brézovar et Roby Defer, hélas disparu en 2019. Avec « Quasimodo », extrait du magnifique album conceptuel Troisième Etoile À Gauche, on entre dans l’ère du « nouvel Ange » (qui fête tout de même ses vingt-cinq ans cette année !). La Voiture À Eau, deuxième disque parfait de cet Ange-là semble également être cher au cœur de Christian puisque deux morceaux en seront proposés : la chanson-titre et le zeppelinien « Le Rêve Est À Rêver » qui bénéficiera de l’incroyable frappe d’Hervé Rouyer, compagnon de cette époque bénie. On regrette l’absence du si planant « Psychosomatique Génie », peut-être le plus beau titre de ces années-là.
Les années 2000 (et suivantes) sont passées en revue avec le dense « Collines Roses » (et la participation de Caroline Crozat, chanteuse et artiste polyvalente ayant participé à quelques disques de ce nouveau millénaire), « A L’Ombre Des Pictogrammes » (couplé à la partie instrumentale « La Colère Des Dieux ») puis le récent « L’Autre Est Plus Précieux Que Le Temps ». L’affaire se termine comme il se doit avec la célèbre reprise de Jacques Brel, « Ces Gens-là ». Puis, Christian bat le rappel des troupes pour plus de dix-sept minutes d’ « Hymne À La Vie » sur lequel jouent tous les musiciens ayant vécu l’aventure Ange et présents ces soirs-là à Paris. Précisons que ces dates parisiennes faisaient partie d’une tournée 50 Ange qui s’est vue brutalement stoppée pour les raisons que l’on sait. Espérons que la troupe puisse reprendre la route avant de penser à célébrer son soixantième anniversaire ! Acquérir ce superbe coffret constitue donc un acte louable dans ces périodes troublées pour les musiciens en stand by. Ange le mérite diablement.
Que voilà une bien belle description du témoignage précieux de ces deux soirées lançant la tournée des 50 ans (maintenant 52 ans et demi) du plus grand groupe de rock français (quoique méconnu) !
Ici, le groupe survole toute sa carrière en trois petites heures, il s’agit donc d’un résumé concentré de l’œuvre.
En effet, la deuxième génération a produit de formidables plaquettes et nous en prépare d’ailleurs une nouvelle cuvée.
Affaire à suivre.