Ayreon ̶ Universe Best Of Live

Universe Best Of Live
Ayreon
Music Theories Recordings
2018
Thierry Folcher

Ayreon  ̶  Universe Best Of Live (Blu-Ray)

Ayreon Universe

Disons-le tout de suite, je n’aime pas trop les  Best of  et les compilations, souvent une injure au travail des artistes. Ce morcellement arbitraire permet surtout de remplir les caisses des maisons de disque sans vraiment tenir compte de l’aspect artistique et historique des albums. Alors, lorsque j’ai vu qu’Ayreon publiait Universe avec la mention Best Of Ayreon Live, j’ai craint le pire en pensant à une succession de témoignages live captés tout au long de la carrière du groupe hollandais. Seulement voilà, Ayreon sur scène, ça n’est quasiment jamais arrivé. Il y a eu le concert The Theater Equation en 2015 qui est la version « en public » de l’album The Human Equation, et c’est tout. Ce sont d’ailleurs les réactions enthousiastes pour ce show qui ont donné l’idée à Arjen Anthony Lucassen de retranscrire en public tout l’univers d’Ayreon.

Mes craintes n’étaient donc pas fondées, bien au contraire, c’est carrément de l’inédit qui nous arrive avec ce témoignage filmé. Le DVD/Blu-Ray retrace l’un des trois concerts enregistrés en septembre 2017 au Poppodium 013 de Tilburg, aux Pays-Bas. L’emballage est luxueux avec le fameux  Electric Castle  en couverture et le livret reprend chaque morceau et chaque intervenant avec un petit commentaire de Lucassen lui-même. Sur la version Blu-Ray, le son (Stéréo et 5.1 Surround) et l’image sont à la hauteur de l’événement et le montage est dynamique et plaisant. La prestation scénique est à la fois simple et travaillée avec un écran en fond de scène qui nous offre des images de synthèse ébouriffantes et le devant est occupé par des effets pyrotechniques et des jets de fumée classiques mais toujours efficaces.

L’affiche est prestigieuse avec pas moins de dix-huit chanteurs et onze musiciens captés par trente caméras pour faire le tour d’une carrière qui va de The Final Experiment (1995) jusqu’à The Source (2017). Au total, dix albums construits comme des opéras rock où l‘heroïc fantasy, le space opera et la science-fiction sont portés par un metal progressif symphonique de grande classe. Arjen Lucassen, multi-instrumentiste de talent, est considéré comme un des meilleurs représentant de ce style au côté des Epica, Within Temptation ou encore Kamelot. Ce qui le démarque de ces références prestigieuses, c’est qu’il est seul à bord et qu’Ayreon est d’abord le fruit d’un colossal travail de studio. La scène n’a jamais été sa priorité, d’autant qu’il rechigne lui-même à monter sur les planches. Alors, quand on apprend que ce grand échalas de plus de deux mètres fait une apparition guitare en main à la fin de ce Universe, c’est avec beaucoup d’impatience qu’on se place devant son écran pour plonger pendant plus de deux heures dans le monde fantasmagorique d’Ayreon.

Le public a vraiment le sentiment d’assister à un événement rare et ne se prive pas pour exprimer son exaltation à chaque apparition d’un nouveau chanteur. Les vingt-huit morceaux vont couvrir toute la carrière d’Ayreon avec même une petite incursion chez le cousin Star One. Le répertoire est d’une richesse telle que le choix n’a pas dû être simple pour Lucassen, à tel point qu’il a passé une année entière à monter ce spectacle. Mais il faut le reconnaître : tout est bien huilé et cohérent. Je me demande si notre gars d’Hilversum ne fait pas partie de ces gens qui réussissent tout ce qu’ils entreprennent.

Ayreon Universe Band 1

Bienvenue donc dans le monde du ménestrel Ayreon et de ses extraordinaires aventures. La première apparition est pour l’Australien Mike Mills (Toehider) qui endosse pour l’occasion le costume de narrateur. En parlant de costume, le sien n’est pas terrible, mais bon ce n’est qu’un détail. Le plus important arrive juste après avec « Dreamtime », un morceau du tout début chanté comme sur The Final Expériment par Edward Reekers (Kayak). Cette introduction toute en douceur prouve bien que Lucassen veut respecter la chronologie discographique plutôt que de faire un show rentre-dedans. L’aventure Ayreon a commencé avec cette jolie ballade, le spectacle en fera de même.

Je ne vais bien évidemment pas pouvoir tout détailler, cela prendrait des pages et des pages. Mais ce que je peux dire, c’est que ces premières minutes sont encourageantes. Le groupe réuni pour l’occasion a fière allure avec Marcel Coenen et Ferry Duijsens (Vuur) aux guitares, Johan Van Stratum (Stream Of Passion, Vuur) à la basse, Joost van den Broek (After Forever, Star One) aux claviers, Ed Warby (Élégi) à la batterie et un trio de choc de vocalistes composé de Marcela Bovio (Stream Of Passion), Irène Jansen (la sœur de Floor) et Lisette van den Berg. Tout au long de la représentation, d’autres musiciens feront leur apparition comme le violoniste Ben Mathot ou le flûtiste Jeroen Goossens. Mais c’est la succession des célébrités vocales qui va rendre crédible ce majestueux hommage à la carrière d’Ayreon. Quelle prouesse d’avoir pu réunir tout ce beau monde sur scène !

On va donc assister à un spectacle grandiose où, comme je l’ai écrit, tous les disques seront représentés. Actual Fantasy le deuxième, arrive juste après avec le mélodieux « Abbey Of Syn » qui nous fait découvrir le groupe dans son intégralité. La suite sera composée de titres pris invariablement dans toute la discographie avec une alternance calculée de tempi et de climats différents. Nous avons tous une sensibilité propre par rapport aux morceaux d’Ayreon, et dans ce concert très dense, mes choix et coups de cœur sont tout à fait personnels.

Dans l’avalanche musicale j’ai retenu « The Blackboard/The Theory Of Everything » avec la délicieuse Marcella Bovio dont la voix est si proche de celle d’Anneke V.G., « Merlin’s Will » chanté par l’immense (dans tous les sens du terme) Floor Jansen (Nightwish), l’incontournable « Valley Of The Queens » chanté en trio par Floor, Marcella et Anneke toujours aussi belle et souriante. « Loser » le morceau de The Human Equation fait également partie des grands moments avec sa flûte tribale qui nous plonge tout d’abord dans une transe celtique pour finir par un superbe solo d’orgue Hammond digne de Deep Purple. Autre pépite avec « And The Druid Turned To Stone » tiré de Universal Migrator, Part 1 où le chant de Damian Wilson (ex-Threshold), les claviers de Joost V.D.B. et la guitare de Marcel Coenen sont tout bonnement splendides. Beaucoup d’éloges c’est vrai, mais il n’y a aucun ennui, pas de fautes de goût et un enthousiasme communicatif.

Ayreon Universe Band 2

La dernière partie de l’événement va être riche en moments forts, à commencer par « Everybody Dies », du dernier album The Source, un véritable déchaînement vocal multi-interprètes qui ressemble fort à la version metal d’une comédie musicale. La mise en place n’a pas dû être simple, mais quel résultat ! C’est avec « The Castle Hall ». tiré du fantastique Into The Electric Castle qu’ Arjen Lucassen va faire son entrée. Le public chaud bouillant lui fait un accueil délirant et, dès les premiers riffs, on est sidéré de voir à quel point il est à l’aise sur scène. Le morceau chanté par Damian Wilson et Robert Soeterboek (Wicked Sensation) est splendide, il représente à lui seul tout l’univers métal/folk d’Ayreon. Pas étonnant que le maître de cérémonie l’ait choisi pour marquer son passage.

Le premier rappel va lui permettre de s’adresser longuement au public, un discours entre partage et remerciements, puis c’est « Amazing Flight In Space » qui va finir par nous achever. Une tuerie ! Un blues dantesque où Arjen nous fait apprécier sa technique et Jan van Feggelen sa belle voix. La fin ressemble à du Jethro Tull vitaminé où piano, guitare et flûte sont carrément magiques. Et ce n’est pas fini, le deuxième rappel avec le titre de Star One « The Eye Of Ra » nous propose tout d’abord les deux sœurs Jansen en duo et ensuite la troupe au complet a cappella. Chapeau bas monsieur Lucassen. Bravo pour cette fastueuse prestation qu’il a bien fallu résumer ici. Sinon pour en savoir plus, je vous conseille de visionner le réjouissant Behind The Scenes en bonus, dans lequel vous verrez tout ce beau monde s’exprimer sur l’événement.

Si vous êtes encore là, c’est que j’ai peut-être réussi ma chronique, que les noms hollandais ne vous ont pas rebuté et surtout que vous êtes fan d’Ayreon. Mais sachez que vous avez la chance de faire partie du cercle privilégié des admirateurs d’Arjen Lucassen. Un grand bonhomme qui a certainement découvert que le passage sur scène est aussi gratifiant que les heures enfermées en studio. Vu son attitude, je suis persuadé que cet Universe très réussi ne sera pas le dernier témoignage public d’Ayreon. Pour ma part, ce fut un vrai bonheur de retrouver tous ces albums en version live, un très bon  Best of  tout compte fait.

http://www.arjenlucassen.com/

 

2 commentaires

  • Seb

    Salut….
    Pas mal la chronique…
    Fan absolu de AYREON, j écoute presque tous les jours un ou plusieurs morceaux.
    Ce live est tout simplement exceptionnel..
    A chaque visionnage, je suis sur un petit nuage. Tout virevolte dans ma tête et je ne peux empêcher celle-ci de dodeliner même quand je suis en public…..
    Arjen est un dieu pour moi et effectivement , tout ce qu’il entreprend ne peux que finir en chef-d’œuvre…
    J’aimerai tellement qu’il nous concocte une suite à 01011001. On aurait notre trilogie métallo progressive au même titre que les fans de Star watts auraient la leur avec les épisodes 4, 5 et 6.
    Un petit bémol concernant la chronique, c est la comparaison avec WT…. désolé , mais on ne mélange pas les torchons et les serviettes., ça n’engage que moi…
    Puisse ARJEN nous régaler encore longtemps de ses futurs chef d’œuvres…

    • Thierry Folcher

      Merci beaucoup Seb pour ton commentaire. En parlant de futur, Ayreon débarque le 22 septembre avec Transitus un nouvel album (mais je pense que tu es au courant) moins métal et plus progressif. Patience c’est pour bientôt. Pour WT, je comprends très bien ton point de vue. Mais je ne peux oublier le duo Sharon, Anneke sur Black Symphony, vraiment superbe. A bientôt Seb, et merci de nous lire.

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