Live report – Loco Cello (avec Biréli Lagrène en invité) au Café de la Danse à Paris le 13 février 2023

Loco Cello (avec Biréli Lagrène en invité) au Café de la Danse à Paris le 13 février 2023
Loco Cello
2023
Lucas Biela

Live report – Loco Cello (avec Biréli Lagrène en invité) au Café de la Danse à Paris le 13 février 2023

Loco Cello band1

Loco Cello (le violoncelle en folie), c’est un trio violoncelle (François Salque), guitare (Samuel Strouk) et contrebasse (Jérémie Arranger), où se croisent le tango, la musique folklorique d’Europe de l’Est, et la musique classique. J’en ai eu vent par l’intermédiaire de l’ami Xavier Chezleprêtre, toujours enclin à me faire découvrir des petites perles dans l’actualité des musiques du monde, du jazz et d’hybrides comme le combo qui nous intéresse. Après des difficultés pour moi à trouver une place (la salle est comble avant même le début des hostilités), le trio entre en scène sous les applaudissements du public (venu donc en nombre, l’invité Biréli Lagrène attirant toujours du monde aux dires d’un des spectateurs). C’est sur les chapeaux de roue que le trio démarre la soirée. On aura droit à une csardas en ouverture, cette fameuse danse hongroise, dont on trouve de très belles pièces sur la collection qu’en a pu faire le label Naxos au milieu des années 1990. Tandis que François et Samuel font bouger presque tous les muscles de leur corps dans leur jeu passionné, Jérémie reste debout, stoïque, mais n’en assure pas moins une assise solide à l’ensemble. Au long de la soirée, une autre csardas permettra de vérifier les informations du violoncelliste au sujet de sa structure : une partie lente très plaintive suivie d’une section plus rapide et festive. Cette dichotomie est surprenante et demande une grande habileté de la part des protagonistes puisqu’il faut susciter tout à tour la mélancolie et la joie au sein de la même composition.

Loco Cello band2
Outre les csardas, le public sera également servi de « Lhassa », une pièce du guitariste qui se voulait être inspirée par le Tibet, mais également par la chanteuse partie il y a plus de 10 ans déjà. On y retrouve la versatilité des csardas, une douce matinée de printemps se parant progressivement des couleurs d’automne avant qu’une tempête hivernale n’assombrisse le paysage. À partir de ce morceau, la lumière sera plus diffuse sur scène, comme pour mettre davantage en lumière (c’est le cas de le dire) les instruments et les mouvements des mains. Ces mouvements, arrêtons-nous y un moment. J’avais adoré voir Timothée Marcel jouer de son violoncelle dans l’église St-Ephrem. J’avais ressenti les mêmes frissons devant Sit Fast à l’Atelier du Plateau : je le mentionne, car la viole de gambe se joue de la même manière que le violoncelle. François me conforte dans l’idée qu’avec le violoncelle, le musicien tente de faire corps avec son instrument si particulier : on le voit en effet caresser le manche, étreindre et entraîner son instrument dans ses mouvements, imprimer tantôt l’effort, tantôt la surprise à son visage. Il s’agit là d’une relation fusionnelle, passionnelle entre les deux, un peu – osons le dire – comme dans une relation amoureuse. Après l’Europe de l’Est, c’est vers la Suisse que notre trio magique nous emmène. Ce sera une pièce d’Ernest Bloch, un compositeur qui aimait les voyages, comme aime à nous le rappeler le violoncelliste. Le morceau est d’inspiration liturgique (« Prière », ça ne s’invente pas !), baignant dans ce même océan de douleur que celui dans lequel aimaient nous plonger les Romantiques du XIXème siècle.

Loco Cello band3
Quand Biréli Lagrène entre dans la danse sous un tonnerre d’applaudissements, c’est une valse musette (« Trucmuche ») qui s’engage. Quel bonheur de retrouver Biréli sur scène : j’avais eu en effet l’occasion de le voir au New Morning un jour endeuillé par le trépas de Prince. Mais revenons à Loco Cello : Samuel a certes la pression d’être avec son mentor, mais il ne se laisse pas impressionner. S’installe alors un grand moment de complicité qui en augure bien d’autres dans la soirée. En effet, après une composition en quatuor de Stéphane Grappelli et Django Reinhardt, où se bousculent des thèmes roumains et hongrois, les deux guitaristes se retrouvent seuls sur la scène, avec Jérémie pour les accompagner dans le rythme. On aura droit à un morceau entraînant, suivi d’un échange plus traînant, mais chargé en émotions et en lumière. Puis, l’invité de la soirée se retrouve seul face au public. Il le comblera d’une de ces vignettes automnales qui vous font rêver tout en vous mettant les larmes aux yeux, et dont seuls les Michael Hedges et les Pierre Bensusan ont le secret.

Ayant passé en revue les musiques d’Europe de l’Est et la musique classique, il manquait le tango à l’arc de notre trio. Ce sera chose faite quand les trois musiciens viendront rejoindre Bireli pour l’« Armageddon » d’Astor Piazzolla, dont on trouvait d’ailleurs un thème dans le film du même nom, « mais pas celui avec Bruce Willis, celui avec Alain Delon », comme le précise François. D’entrée, un tour de force technique de Biréli ne manquera pas d’impressionner le public (on entend un « mais il a 15 doigts ! » dans la salle), avant que des rythmes enivrés ne prennent la suite. Le set semble terminé quand les artistes quittent la scène, mais ils reviendront trois fois pour des rappels, où l’émulation virtuose donnera le change à l’affection complice.

Nombreuses sont les collaborations actuelles où s’invitent diverses influences musicales. C’est toujours un véritable bonheur d’assister à leurs prestations scéniques, car outre le fait de voyager et de découvrir d’autres cultures, c’est également un rendez-vous avec l’histoire qu’elles nous proposent.

 

 

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