Ian Anderson – Thick As A Brick 2

Thick As A Brick 2
Ian Anderson
2012
Chrysalis Records

Ian Anderson – Thick As A Brick 2

En 1972, Jethro Tull sort un disque qui les propulse sur le devant de la scène, après le déjà très apprécié « Aqualung », c’est « Thick As A Brick ». Premier concept album du groupe, il est composé d’un seul titre de 40 minutes, qui est en fait, un poème du jeune Gerald Bostock, qui, parce qu’il a triché sur son âge pour un concours, est destitué de son titre et fait la une de la gazette locale. Avec son sens aiguisé de l’humour typiquement British, Ian Anderson en profite pour croquer la société de l’époque avec sarcasme et ironie. Mais ce qu’Anderson avait voulu faire également, c’était une parodie du rock progressif de l’époque ! En effet, des groupes comme Yes, Genesis, ou King Crimson, lui paraissaient tellement pompeux que, même s’ils étaient de très bons musiciens, ils se prenaient trop au sérieux. En réponse, « Thick As A Brick » (littéralement « bête comme ses pieds ») reprend tous les éléments de ce genre de musique et les adapte au style du groupe, qui en profite pour développer son fameux son, si reconnaissable !

40 ans plus tard, la suite nous arrive. « Thick As A Brick 2 » nous emmène dans différents destins possibles dans la vie de Gerald Bostock. Mixé par Steven Wilson himself (il ne se repose donc jamais), Ian Anderson ne signe pas l’album en tant que Jethro Tull, mais sous son propre nom. Il explique que le premier avait été entièrement composé par ses soins, et que ce nouvel opus s’est en fait écrit à moitié sans savoir que ce serait la suite. Il a donc adapté certains morceaux sur ce concept : que s’est-il passé dans la vie de Gerald Bostock, que lui est-il arrivé, où en est-il maintenant ? Il imagine Gerald en tant que banquier, leader d’une chorale chrétienne, SDF, militaire ou tout simplement en homme ordinaire. Jethro Tull étant à géométrie variable, il a fait appel à des musiciens ayant tous participé aux concerts du groupe, mais ne voulant pas abuser du nom Jethro Tull, il lui semblait plus naturel de le signer sous son nom.

La pochette de ce CD est à l’image du premier « Thick As A Brick », sous la forme de journal avec moults articles ironiques ou banals, mais adapté à notre monde moderne : une page internet. C’est un régal de lire ces articles, on retrouve toute la verve d’Ian Anderson et son humour si féroce. Les paroles du concept sont toutes autant réussies : pour qui comprend l’Anglais, c’est un délice. Cela l’a toujours été d’ailleurs : Ian Anderson n’a jamais voulu écrire une seule chanson avec des paroles simplettes. A coup de mots composés, de jeux de mot, de références typiquement British ou d’emprunts à la langue française, les paroles ne sont jamais anodines, et avec tout l’humour d’Ian Anderson, son décalage, son goût pour la satire, son observation ironique de la société, c’est un des rares auteurs littéraires de la musique.

Alors, que dire de la musique de « Thick As A Brick 2 » ? Elle commence là où le 1er avait terminé, et reprend quelques thèmes de celui-ci, dispersé tout au long de l’album. On retrouve le son qu’on affectionne tant de la guitare acoustique et de la flûte d’Ian, mais aussi quelques beaux solos de guitare électrique, tenue avec brio par Florian Opahle, ainsi qu’un progressif plutôt typique de son auteur. Le tout est très dynamique, original dans son traitement, et mélange habilement le son Jethro Tull avec celui, plus récent, d’Ian Anderson. Tout du long, on pense aux albums « Aqualung », « A  Passion Play », « Heavy Horses », « Dot Com », et aux solos plus récents du bonhomme. Bref, un très bon moment mais qui demande quand même plusieurs écoutes avant d’être apprivoisé. Cela faisait un bail qu’Ian Anderson n’avait pas fait un album aussi réussi, et surtout, progressif ! Certaines parties de l’album sont assez complexes et ce retour vers le passé est finalement rafraichissant.

Et même s’il y a des creux, des baisses de rythmes dans l’album, il est suffisamment intelligent pour combler les attentes. Alors, même si le souffle de l’époque n’est là qu’épisodiquement,  Ian Anderson n’a pas trompé le public sur la marchandise : c’est une suite conceptuelle, c’est progressif, c’est aussi moderne et  littéraire. SI le premier « Thick As A Brick » n’existait pas, assurément celui-là serait encensé par tout le monde. A bon entendeur…

Fred Natuzzi (7,5/10)

http://www.jethrotull.com/

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