Airbag – The Greatest Show On Earth

The Greatest Show On Earth
Airbag
2013
Karisma Records

Airbag – The Greatest Show On Earth

Le cap du troisième album a toujours constitué une étape majeure, voire même un tournant décisif, dans la carrière d’un groupe. Les musiciens se trouvent en effet bien vite confrontés à un dilemme fort embarrassant. Doivent-ils persévérer dans leur voie musicale originelle, quitte à s’enfoncer dans l’ornière de la redite ? Ou bien leur faut-il élargir ostensiblement le moule de leur inspiration, avec le risque bien réel à la clef de dérouter (pour ne pas dire décevoir) une frange non négligeable de leurs plus fervents admirateurs ? Avouez franchement que vous seriez bien embêtés à leur place pour prendre une décision sérieusement mûrie. Alors mettez-vous donc trente secondes dans la peau des musiciens norvégiens d’Airbag. Voilà une formation qui avait créé une très forte impression dans le petit monde progressif lors de la parution d’ »Identity » en 2009 et surtout de « All Rights Removed » en 2011. L’unanimité s’était vite réalisée autour de la musique résolument floydienne et pleine d’innocence de ces deux opus. Pour des coups d’essai, c’étaient de sacrés coups de maître. Rien d’étonnant, dans ce contexte, à ce que le combo fût quelque peu attendu au tournant. Allait-il se cantonner dans une musique calquée sur celle du Pink Floyd de David Gilmour (un peu à la manière du RPWL des débuts, des Cosmos et Innerspace actuels) ou bien chercher à se démarquer à tout prix par le recours forcené à une expérimentation quelque peu gratuite et artificielle ?

Force est de reconnaître à l’écoute de « The Greatest Show On Earth » que la bande du guitariste prodige Bjorn Riis a opté pour la voie de la continuité. Airbag y revisite en effet, avec la fièvre de chercheurs d’or, l’œuvre du Floyd le plus récent. Les claviers de Jorgen Grüner-Hagen y évoquent, plus souvent qu’à leur tour, ceux du défunt Rick Wright, alors que la six-cordes bénie des dieux de Bjorn Riis tutoie, à plus d’une reprise, le style caractéristique de David Gilmour jusqu’au parfait mimétisme (jetez donc une oreille attentive sur, au hasard, « Silence Grows »). Et non content de piller, avec un talent qui laisse pantois, le jeu du maître anglais de la six cordes mélodique et bluesy, il en reprend également tous les codes, les effets et les attributs sonores. Peut-on alors décemment parler ici de démarche créative et artistique ? Le débat chez les amateurs de rock progressif (Glass Hammer, clone de Yes ? The Watch, un simple Re-Genesis ? Etc.), maintes fois agité et passionné, reste ouvert…

Ceci étant, il se dégage de cette « nouveauté » une réelle sensation de cohésion et d’unité, nullement altérée par la présence de quelques passages décousus (« Redemption », à la basse ronde et hypnotique digne d’un Colin Edwin, mais qui ne rattrape hélas nullement l’absence vertigineuse d’accroche mélodique). Cet opus ne marque donc pas pour Airbag de virage stylistique et qualitatif important, le gang s’accrochant comme un mort de faim à ses influences floydiennes et Porcupiniennes (« Redemption », « Call Me Back », « Silence Grows », le beau triptyque « Surveillance »… tout l’album en fait !) plutôt que de défricher de nouveaux territoires sonores et d’asseoir une vraie personnalité qui nous ferait dire un jour « tiens, ça ressemble à du Airbag ! »

Ajoutez à ces griefs le chant assez quelconque d’Asle Tostrup et vous comprendrez qu’il en résulte  un CD, globalement agréable à l’écoute, mais cruellement dénué d’originalité, de quête de renouvellement et donc d’identité. La quatrième fois sera peut-être la bonne ?

Bertrand Pourcheron & Philippe Vallin (6/10)

http://www.airbagsound.com/

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