Jean-Louis Murat – Innamorato

Innamorato
Jean-Louis Murat
Pias
2019
Fred Natuzzi

Jean-Louis Murat – Innamorato

JLMurat Innamorato

Jean-Louis Murat se cherche, se cerne, est en recherche depuis Travaux Sur La N89. Ou alors c’est nous qui le cherchons, le cernons, sommes en recherche depuis ce fameux album. Normal, après un chef-d’œuvre comme Babel en 2014, comment continuer à balancer des opus aussi réussis tous les ans, comme il le fait depuis un bon nombre d’années ? Morituri avait montré quelques signes de faiblesse, sans pour autant démériter. Alors ces Travaux Sur La N89 ont surpris tout le monde, et tout le monde a pris l’autoroute, regardant de loin les plus aventureux se risquer sur la chaotique nationale. Pour continuer sur sa lancée expérimentale et électronique, Murat sort alors Il Francese, compromis entre les sons électroniques explorés précédemment et la chanson au format plus classique. Un album plus « acceptable » pour les fans sans doute. Puis la bonne nouvelle advint : une tournée allait se mettre en place pour promouvoir Il Francese. Et là, quelle surprise ! Aucun son électro, aucune expérimentation, mais un set d’1h20 au max resserré autour du disque complètement remanié et rejoué. Adieu les blips et les bloops, bonjour le blues rock laissant la place au trio de tueurs musiciens que forment Stéphane Raynaud à la batterie, Fred Jimenez à la basse et JLM à la guitare.

Un concert élégant, stylé, hypnotique, et des chansons revisitées pour en tirer le meilleur. On s’attendait à tout de la part de JLM sauf à cela. Et même si le chanteur n’est pas très partageur avec son public, il convainc sans peine les plus réticents par son jeu de guitare absolument magnifique, bien complété par la basse et la batterie pour rendre le paysage sonore étincelant. Et on pense bien évidemment à Neil Young. Innamorato est le témoignage de ces concerts dont les titres prennent de deux à cinq minutes supplémentaires à les jouer. Je l’aurais plutôt intitulé « InnaMurato », tellement le résultat est fascinant. Nous n’avons pas l’intégralité du set mais des extraits choisis, agrémentés de quatre morceaux inédits (dont un joué pendant les concerts) dont le son est similaire à celui choisi pour la tournée.

JLMurat Innamorato band 1

Six morceaux d’Il Francese se retrouvent sur Innamorato. « Ciné Vox » ouvre l’album et son ambiance jazzy planante nous fait nous immerger dans un univers un peu mélancolique et nous sort de notre temps. Puis, « Hold Up » chanté en solo nous montre bien que Murat a pris le parti de laisser parler sa guitare. « Gazoline » passe de 3 à 6 minutes avec bonheur et développe un blues rock où on se laisse divinement entraîner, tout comme « Marguerite de Valois » qui rappelle un peu pour l’ambiance et le jeu de guitare…Nick Cave ! « Kids » est le morceau qui a peut-être le plus l’esprit rock et « Je Me Souviens » est lui carrément interprété a cappella ! Un moment intime, inattendu, qui montre un Murat émotionnel, en partage. Deux autres morceaux live figurent sur l’album et pas des moindres. On retrouve « Il Neige »  issu de Toboggan, formidable moment suspendu, et le génial « Les Jours Du Jaguar », extrait du merveilleux Lilith, qui en quasi 9 minutes réconciliera n’importe quel fan avec Murat. Un morceau quasi sauvage qui montre que Murat peut se déchaîner et proposer un titre très rock et assez tendu, un bonheur. Pour les inédits, on retrouve la même équipe avec Denis Clavaizolle aux claviers et une intervention de Christophe Pie, grand ami de Murat décédé récemment. « Ben » est uniquement soutenu par une texture électro discrète, tandis que « Autant En Faire Quelque Chose » revient à quelque chose de plus entraînant, même si le texte est, lui, assez crypté. « Cœur D’Hiver » est le morceau le plus réussi, bel alliage de poésie et de musique Muratienne plus familière. Enfin, « Par Toi-Même Hideux » est aussi bon et ressemble à une jam mais avec un texte assez recherché. Quatre titres complémentaires au live de très bonne facture.

JLMurat Innamorato band 2

Murat avait dit qu’il y aurait une trilogie d’albums sur la même veine électro, nous verrons si le prochain sera vraiment la suite d’Il Francese, ou bien s’il exploitera la veine blues d’Innamorato, ou encore si cela sera totalement différent. On ne sait jamais à quoi s’attendre avec Murat. Et ça, c’est ce qui fait qu’on attend toujours le prochain Murat avec impatience. Un vrai artiste avec une vraie patte, qui diversifie ses productions. Chapeau bas.

http://www.jlmurat.com/

 

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