Chandelier – Timecode
Chickadisc
2019
Christophe Gigon
Chandelier – Timecode
Le label Chickadisc a pris l’heureuse initiative de proposer des rééditions luxueuses des trois albums mythiques du groupe allemand Chandelier sortis durant les années 90. Après l’inaugural Pure (1990) et leur chef-d’œuvre Facing Gravity (1992) discutés sur ce site, c’est au tour de leur chant du cygne, Timecode (1997), de se voir revêtu de superbes atours. Quand ce disque est sorti en grandes pompes sur le prestigieux label Inside Out, les attentes étaient fortes tant l’album au bourdon avait fait placer d’énormes espoirs en ce Marillion germanique. Las, une certaine perplexité du public a accueilli ce dernier rejeton. Chandelier avait opéré une mue qui n’était pas du goût de tout le monde. On avait quitté la bande menée par Martin Eden (chant) sur des territoires néo-progressifs bien balisés et on les retrouvait à essayer de damer le pion à Threshold, Dream Theater ou autres Fates Warning. Et force est d’avouer que ces habits-là leur furent un peu trop grands. Cette énergie et cette complexité nouvelles ont été appliquées au détriment du côté planant et émouvant qui avait tant marqué les esprits. Certes, la superbe voix de Martin (proche de celle de Phil Collins ou de Fish) marque toujours l’ensemble d’une identité propre très forte et le reste du groupe n’est pas en reste : ça joue fichtrement bien.
Mais ça ne prend jamais vraiment. Les compositions semblent plus artificielles, peu mémorables. Chandelier a laissé tomber son goût affiché pour les petites pépites pop-prog qui faisaient toute la saveur du précédent essai (« Start It » ou « The Circling World »). De plus, l’inutile virtuosité de certains trop longs titres lasserait même le fan le plus indulgent de Neal Morse. Il faut bien avouer que, même s’il s’avère bien difficile de pointer du doigt un manquement ou une fragilité au niveau instrumental ou vocal (c’est vraiment la grande classe !), Timecode ne touche jamais au cœur ni à l’âme, comme avait si bien su le faire le génial Facing Gravity. L’écoute achevée, l’envie de repartir pour un tour se fait moins insistante. Leur dernière production restera assurément leur moins marquante. Du reste, la formation s’est dissoute à la fin de la tournée, en compagnie des Américains de Spock’s Beard, qui visait à promouvoir Timecode.
Le second disque compact (Lost & Found) propose, par contre, des pépites de haut standing : trois nouveaux morceaux enregistrés en 2018 qui prouvent que Chandelier possède encore la flamme. Et que la voix si particulière du leader est restée intacte. Suivent cinq titres en public datant de 1993, quelques versions acoustiques de pièces de choix de Facing Gravity et quelques démos et autres miscellanées de bon aloi. Une deuxième galette bourrée jusqu’à la gueule de trésors de guerre historiques de la formation germanique ravira le connaisseur. A signaler qu’à l’occasion de cette ultime réédition, l’équipe s’est reformée et se produira cet été au célèbre festival progressif Night Of The Prog, sis sur le magnifique site de Loreley, en Allemagne.