TAUK – Somewhere Between Here And There

Somewhere Between Here And There
TAUK
Autoproduction
2025
Thierry Folcher

TAUK – Somewhere Between Here And There

TAUK Somewhere Between Here And There

Toc toc, voici TAUK ! Non, pas Talk Talk, mais TAUK comme Montauk, vous savez, cette charmante cité balnéaire située tout au bout de Long Island dans l’État de New York. Un endroit qui ne respire pas la misère et qui a vu son nom raccourci pour servir de patronyme à quatre musiciens locaux, avides de musiques progressives et de rock-fusion (tout ce que l’on aime à Clair & Obscur). Mais attention, les étiquettes, c’est une chose et les bonnes vibrations, c’en est une autre. À présent, vous vous doutez bien que si je vous en parle, c’est que le contrat est rempli de ce côté-là. Somewhere Between Here And There est le septième grand format du groupe et, à mon sens, le plus abouti. C’est surtout celui qui résiste le mieux à des écoutes répétées et qui se révèle même comme un agréable compagnon du quotidien. À l’instar de « Eldridge Awakes », un formidable premier titre qui a réussi à prendre d’assaut mon actuelle playlist tout en écartant une concurrence médusée et impuissante. Alors, pourquoi cet engouement ? Peut-être parce que l’ombre de Khruangbin plane au-dessus de ce morceau. Mon attachement pour le trio texan n’est pas nouveau (même si leur dernier album A La Sala m’a un peu déçu) et de retrouver leurs ondes sensuelles, revisitées par les gars de TAUK, ne pouvait qu’atteindre une cible largement offerte. Cela dit, on est très loin du quasi-plagiat proposé par les clones de Balthvs. Ici, il ne sera question que d’une légère inspiration. Déjà, la formation à quatre est loin de faire dans le minimalisme et les percussions d’Issac Teel n’ont vraiment rien à voir avec celles du monolithique Donald « DJ » Johnson. Le jeu virevoltant et l’attitude enjouée de cet habile manieur de baguettes sont uniques et deviennent une attraction à eux seuls. Pour finir la présentation, l’équipe TAUK est composée de Mark Jalbert à la guitare, d’Alric « A.C. » Carter aux claviers et de Charlie Dolan à la basse.

Somewhere Between Here And There commence donc par les airs guillerets d’un « Eldridge Awakes » absolument irrésistible. Il faut savoir que mon histoire avec TAUK a débuté grâce à ce titre et ce n’est peut-être pas par hasard si je lui accorde une place toute particulière. Cela démarre par une intro atmosphérique précédant la guitare de Mark Jalbert dans un style proche de Mark Speer de Khruangbin. Mais la filiation s’arrête là, car l’apparition des cuivres fait basculer la musique dans un tout autre registre. Le rock a fusionné et se dirige allègrement vers un funk des plus torrides. Le public ondule et trouve malheureusement que le temps passe trop vite. Qu’à cela ne tienne, le bouillant « Hot Brown » reprend la messe là où elle s’était arrêtée et les drôles de paroissiens, encore chauds, continuent de plus belle leur incontrôlable déhanchement. À noter sur ce second titre, un joli break orchestré par les synthés d’Alric « A.C. » Carter. Cet admirateur de Quincy Jones est en grande partie responsable du son TAUK et de l’attraction que dégage cette musique toujours aussi vivante. Il faut le voir sur scène comme il se démène entre virtuosité et accompagnement subtil. À la différence du cousin Phish, dont les morceaux semblent posséder le même pedigree, ce fameux son TAUK est loin d’être uniforme et chaque étape est une vraie découverte. Alors, me direz-vous, si la diversité est de mise, pourquoi ne pas ajouter des parties vocales ? Mais, c’est déjà arrivé en 2023 pour l’album TAUK Moore sur lequel la chanteuse soul Kanika Moore se fond dans l’ambiance avec une aisance remarquable. Preuve que tout est possible et que la musique instrumentale du groupe peut s’ouvrir à toutes sortes d’opportunités.

TAUK Somewhere Between Here And There Band 1

Maintenant que l’on connaît mieux les fantasmagories de nos quatre amis d’Oyster Bay, il nous reste plus qu’à retourner vers un album, bien décidé à poursuivre sa sympathique opération de séduction. C’est ce qu’il se passe avec « Hang Tuff » et ses trois minutes d’électro-reggae qui prolongent à merveille la sensuelle attraction des deux locomotives précédentes. La musique de TAUK n’utilise pas d’esbroufe ni de compromis pour séduire. Elle se contente de propager les délicats remous que fabriquent des lignes de basse bien rondes, des coups de baguettes appropriés, des ornementations de claviers en tous genres et des solos de guitare décoiffant. Et puis, si vous pensez que le ska épileptique d’« Adventure Hop » n’est pas capable de réveiller n’importe quelle assemblée assoupie, alors je n’y comprends plus rien (ce qui est fort possible). Bien, il est grand temps de se calmer et « Aquatic Curtain » arrive à point nommé pour modérer les ardeurs et amener la musique sur un terrain plus tranquille, permettant à la guitare de survoler les débats de toute sa classe. La mélodie est entêtante, la rythmique appliquée et les arrangements pleins d’inventivité. De véritables vagues langoureuses qui nous amènent vers un « Song For Salma » aux accents anciens partagés à tour de rôle par Mark Jalbert et Alric Carter. Ici, ce sont les mythiques The Shadows que l’on entrevoit et plus loin, c’est la partition cinématographique de « Walk In Twilight » qui séduit par son rendu vintage très évocateur. La grosse demi-heure de Somewhere Between Here And There s’achève avec une pointe de Pat Metheny sur « Phase Out », une ultime rêverie à la grande richesse acoustique et harmonique.

TAUK Somewhere Between Here And There Band 2

Le plus difficile aujourd’hui, c’est d’arriver à déceler l’authenticité, la sincérité et la véritable passion de jouer. Et le meilleur moyen pour y parvenir est de jeter un coup d’œil sur les prestations scéniques. Si certains semblent donner l’impression de devoir de l’argent au fisc, d’autres s’éclatent à fond la caisse et transmettent leurs ondes positives à qui veut bien les saisir. Un peu comme le faisait Zappa à l’époque. Tout ça pour vous dire que nos amis de TAUK possèdent un véritable arsenal de bonnes vibrations qui nous accaparent et ne nous lâchent plus. Sur Somewhere Between Here And There, toute la panoplie y passe et celui qui accroche cette déferlante de groove n’en ressortira pas indemne. Les gens de TAUK ne sont pas à la mode, ils ne fabriquent pas de tubes et ne passent pas dans les grands médias. Ce sont tout simplement des potes, comme peuvent l’être Phish ou Widespread Panic (avec qui ils tournent régulièrement). Enfin, vous l’avez certainement remarqué, TAUK s’écrit en lettres capitales, comme un cri poussé bien fort et bien haut pour être entendu par le plus de monde possible.

https://www.taukband.com/

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