Delphine Cerisier – Evasion

Evasion
Delphine Cerisier
2013
Synthetic Association

Evasion

« Evasion » est le tout premier album de Delphine Cerisier, une artiste française galvanisée par la musique électronique et les synthétiseurs depuis sa rencontre avec les grands maîtres du genre dans les années 80, qu’ils se nomment Kraftwerk, Klaus Schulze, Vangelis ou encore Jean-Michel Jarre. Ce dernier est très certainement l’influence qui transpire le plus à travers son propre travail, peut être un peu trop même parfois. Fille de musiciens professionnels (son père est organiste, sa mère claveciniste), Delphine reçoit tout naturellement une solide éducation en la matière dès son plus jeune âge, ce qui lui permettra de se familiariser très tôt avec les claviers qu’elle affectionne tant. Dès l’adolescence, elle entreprend de créer sa propre musique en bricolant rythmes et sonorités sur ses premiers synthétiseurs : ce sont là ses instruments de prédilection qui lui permettent de débrider simultanément sa créativité, sa liberté et son imaginaire. Et cette démarche on ne peut plus passionnée lui collera à la peau jusqu’à aujourd’hui. Au début des années 2000, Delphine s’intéresse à d’autres formes de musique électronique en se rapprochant du mouvement Techno et en particulier de sa ramification Trance, quand elle découvre le compositeur, DJ et producteur allemand ATB (alias André Tanneberger). Ce sera le coup de foudre qui déclenchera la mise en chantier de son propre album qui nous intéresse ici.

Ce CD est entièrement réalisé sur le principe de la « MAO » (« Musique assistée par ordinateur »), à base de sonorités 100% électroniques, boîtes à rythmes, séquenceurs et divers samples (voix, bruitages, instruments rock, traditionnels et autres). « Evasion » est, comme son nom l’indique, une invitation au voyage avec la musique de Delphine Cerisier pour seul guide. Durant une cinquantaine de minutes et 11 courtes compositions à la clef, la claviériste nous emmène dans une sorte de périple musical intérieur à travers les continents et les cultures, en mixant sonorités modernes avec quelques touches « ethniques » ici et là. Le style bien affirmé de Delphine combine et harmonise une Trance mélodique aux bpm’s modérés avec l’orientation dancefloor du Jean-Michel Jarre dernière époque et quelques sonorités « World Music », dans un esprit New Age pleinement assumé. On pense au Mike Oldfield easy listening instrumental des années 90/2000 (l’introductif « Pour Un Monde Meilleur », les notes de piano de « N’abandonne Pas, Avance », les cloches tubulaires de « La Magie de Stone Age ») ou encore à la démarche Electro-World du populaire duo français Deep Forest (« Evasion Master », « Saveur Orientale »).

La demoiselle s’aventure également – mais un peu timidement peut-être – dans les contrées Psy-Trance des esthètes (et figures de proue du label Ultimae Records) Solar Fields et autres Carbon Based Lifeforms, comme en témoignent les jolies nappes atmosphériques et boucles analogiques de « Compte A Rebour » et « Solitude Master ». Dommage qu’elle n’y soit pas allée plus franco, car c’est finalement dans ces moments là que la musicienne donne le meilleur d’elle-même, à savoir quand elle délaisse un peu les ornementations parfois « cheap » de ses morceaux (comme cette pâle imitation du Shakuachi japonais, échantillon hyper cliché mille fois entendu par ailleurs, entre autres sur le générique de l’émission TV « Ushuaïa » !) pour se focaliser davantage dans la création d’ambiances purement électroniques. Aussi, retirez le solo de guitare samplé aussi moche qu’inutile du final de « Pour Un Monde Meilleur » et le titre gagnera en qualité ce qu’il perdra en mauvais goût.

Pour en terminer avec les aspects « négatifs », Delphine Cerisier se contente à mon avis encore un peu trop des simples sons d’usines de ses nombreuses machines, au lieu d’en explorer les possibilités texturales quasiment infinies dans le but de définir sa propre identité et sa « patte sonore » (car ce n’est vraiment pas le style de la jeune femme qui est ici remis en question). Ce choix confère à la production finale d' »Evasion » un petit côté « amateur » parfois encore trop prégnant, ce qui heureusement n’enlève rien aux nombreux atouts d’un album qui mérite toute l’attention des amateurs du genre.

En conclusion, « Evasion » est une première œuvre prometteuse, composée « à la maison » par une artiste sincère, inspirée, pleine de potentiel et de bonne volonté, mais à qui il manque peut être encore une petite dose d’ambition et d’assurance pour nous pondre le disque de la maturité. On attend le verdict à l’occasion de la prochaine sortie signée Delphine Cerisier !

Philippe Vallin (7/10)

http://www.electro-evasion.fr/

Retrouver l’ensemble des artistes du label Synthetic Association sur :

http://www.syntheticassociation.com/

 

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