Animal Triste à La Maroquinerie, 25 novembre 2021
2021
Fred Natuzzi
Animal Triste à La Maroquinerie, 25 novembre 2021
Animal Triste en concert, c’est participer à une cérémonie rock ancrée dans le présent. Un point dans le temps auquel sont conviés les fantômes du passé, mais aussi les ombres rock de notre époque, bien cachées dans leurs tanières que seuls débusquent les vrais, les authentiques. D’ailleurs, ceux-là se reconnaissent, se saluent, communient ensemble, partageant le moment en laissant derrière eux les mauvaises langues qui disent que le rock est mort. Refrain archiconnu et rebattu, pour autant faux et archifaux. Mais pourquoi pas, après tout. Oui, le rock est mort. Cela en arrange certains ? Ok alors. Le rock est mort. Vive le rock, donc… Peu importe ces serpents qui sifflent sur nos têtes, nous préférons ceux qui sont sur scène, prêts à mordre quiconque s’aventurerait là par mégarde. Et nos six Animal Triste ont bien aiguisé leurs instruments pour attaquer les musiques de supermarchés, les faux prophètes de la musique aseptisée qui inondent la radio avec une force de conviction aussi peu authentique qu’une intervention d’Olivier Véran. Oui, celles et ceux qui ont bravé les dangers de notre société confinée et sclérosée et qui se sont réunis à la Maroquinerie ce jeudi 25 novembre pour assister à cette grande célébration chamanique sont passés dans un autre monde. Celui de la liberté mélodique où les guitares lâchent les chevaux, la batterie assène des uppercuts, la basse gronde un tonnerre symbolique et le chanteur s’ouvre littéralement les cordes vocales dansant autour d’un feu salvateur.
Animal Triste avait sorti un album éponyme en décembre 2020, fruit du premier confinement, comme un cri, un défouloir, une rage de liberté. Sortir un album comme celui-ci n’était pas chose facile. Conscients de l’état du rock en 2020, il fallait quand même le faire et établir leur vérité. Celle de dire, fuck, on a envie de faire du rock, donc on en fait, et à ceux à qui ça ne plaît pas, allez vous faire voir ailleurs ! Bref, on embarque dans le van avec eux, et on roule à fond sur les routes désertes et ouvertes, on boit des bières (d’ailleurs, ils ont leur propre bière qui est superbe !), on fait du skate comme les djeun’s (d’ailleurs ils ont leur propre skate au logo du groupe), on met la casquette parce qu’il fait chaud (d’ailleurs, ils ont leur propre casquette au logo du groupe). Bref, ce ne sont pas des perdreaux de l’année, ils ont pensé à tout !
C’est Aña qui ouvre le bal, une musique assez dark et cold, tout à fait appropriée pour poser une ambiance de fond de tanière. Aña, c’est Amandine Fontaine-Rebière au chant et à la basse d’abord puis à la batterie et David Fontaine à la batterie d’abord puis à la basse ! Un formidable retournement de situation pour profiter des talents de nos deux complices qui ont su intriguer, appâter et capturer l’attention des aventuriers présents dans la salle. Une belle découverte. Animal Triste débarque ensuite et on voit de suite à l’attitude de Yannick Marais, le chanteur, qu’ils ne sont pas là pour déconner. Bras croisés, regard droit devant pendant que ses acolytes dressent l’autel rock, c’est en conquérant qu’il entame « Machine Love », une tuerie qui met tout le monde à terre, extrait du second album à venir. De ce prochain opus qui sortira au cours du premier trimestre 2022 au jeu de mots évocateur, Night Of The Loving Dead, nous aurons droit à « Mary Full Of Grace », « Afterlife », le fabuleux « Evil », le dissolvant « Play God » ou encore « Tell Me How Bad I Am » sur lequel Peter Hayes (oui, celui de Black Rebel Motorcycle Club, rien que ça) a posé des guitares.
Un peu plus d’une heure de set qui arrache, avec un killer à la guitare, j’ai nommé Fabien Senay, un claviériste et guitariste aux saillies soudaines qui n’a pu délaisser ses maracas, Darko, un guitariste en feu à en consumer sa casquette, Sébastien Miel, un bassiste métronome, une révélation, Cédric Kerbache, et enfin le troueur de peau, l’intense Mathieu Pigné à la batterie. Yannick Marais au chant a tout donné, une force qui se nourrit de l’énergie contaminante du public, prêt à nourrir le feu qui brûle à ses pieds pour mieux porter la cause rock vers les sommets. Assurément, on a atteint un pic, avec une intensité rare pour un groupe qui n’en est qu’à son septième concert. Ça promet pour la suite ! Saluons le travail aux lumières entre clair et obscur par Mathilde et celui au son assuré par Philou Barandiaran, la Maroquinerie n’a jamais sonné comme cela.
Set List
Machine Love
Out Of Luck
Dancing In The Dark
Mary Full Of Grace
Sky Is Something New
Tell Me How Bad I Am
Vapoline
Afterlife
Shake Shake Shake
Evil
Play God
____
Amor Bay
Darkette
Les premières notes posées, les bras croisés de ce fabuleux Yannick nous plongent directement au creux de leur âme toute animale. Nos tripes le sentent et en quelques secondes Animal Triste créé une attente forte presque incontrôlable de ce moment que l’on sait hors du temps. Puis la voix s’invite et là on est définitivement conquis ; une voix si puissamment incarnée qu’elle nous fait voyager encore plus loin. Alors vient la fin du concert et à nouveau ils nous bousculent parce que NON, on en veut encore ! Ils m’ont rendue encore plus vivante et le silence derrière comme une rupture amoureuse est difficile !
Alors merci à eux et soyons rock à toujours !!
« Rock and roll can never die »