Andréa Spartà – Simulacra
Andréa Spartà
Autoproduction
Autant le dire d’emblée, le Simulacra d’Andréa Spartà m’a carrément bluffé. Cependant, bon, ok, il est clair que cet album ne sera pas la tasse de thé de tout le monde, loin de là même. Il faut vraiment avoir un goût très affirmé de la musique expérimentale ou électro-acoustique pour y trouver son compte. Mais si tel est votre cas, alors vous allez être hypnotisé par ce Simulacra, à la fois lent et dense, suspendu et rugueux, mystérieux et beau. Une oeuvre rigoureuse et vigoureuse digne d’un véritable maître en la matière. C’est justement là le plus étonnant de l’affaire. Car Andréa Spartà n’a que 20 ans, et il joue déjà avec maestria dans la cour des grands. Cela mérite bien quelques approfondissements, d’autant plus que ce jeune musicien ultra-doué n’était pas destiné au départ à œuvrer dans ce genre exigeant et souvent casse-gueule qu’est l’expérimental.
Andréa Spartà commencé la guitare à 11 ans, ce qui l’a amené à devenir guitariste et compositeur dans un groupe de metal. Il est ensuite entré au Conservatoire de Chalon sur Saône, duquel est ressorti diplômé d’un DEM de musique actuelle en 2014, puis d’un DEM de Musique Électro-acoustique en 2016. C’est en découvrant le magnifique album Vrioon de Alva Noto & Ryuichi Sakamoto puis l’album Pulse Demon de Merzbow qu’il s’est intéressé à la musique expérimentale. Il avoue néanmoins qu’il est né de parents galeristes (Galerie Pietro Spartà) et qu’il a donc eu la chance d’avoir été éveillé à l’art et à la culture dès son plus jeune âge. C’est ainsi qu’il a pu côtoyer des artistes tels que Mario Merz, Gilberto Zorio, Niel Toroni ou encore Richard Serra, qui ont eu et ont toujours une grande influence sur son travail. Il a également été marqué par la musique de Steve Reich, de John Cage, mais aussi de Jacques Brel qui est encore une influence majeure dans sa musique.
Le travail d’Andréa Spartà est essentiellement orienté vers la performance audiovisuelle, ayant déjà imposé son style aussi remarquable que maîtrisé dans des projets tels que Land en 2013, Entre Chien et Loup en 2014 et Seven Tones of Spheres en 2015, tous basés sur la recherche d’un entre deux, d’un espace entre réel et irréel.
Pour ce qui concerne Simulacra, l’album est né d’une expérimentation ayant d’abord consisté, dans une obscurité presque complète, à faire tomber un marteau dans une grande salle vide. Le bruit provoqué a évoqué à Andréa Spartà le craquement d’une banquise. Puis il a recommencé deux jours après dans une cathédrale avec une chaise. De nouveau le craquement d’une banquise s’est imposé au musicien. Comment deux bruits aussi dissemblables peuvent-ils amener à la même sensation sonore ? C’est là toute l’énigme, la matière et la quête de ce Simulacra aussi étrange qu’envoûtant, « une recherche du temps suspendu, une attente dans un lieu entre la banquise et la cathédrale ».
Frédéric Gerchambeau
http://andreaundrosparta.tumblr.com/