Zu & Mats Gustafsson – How To Raise An Ox
Zu & Mats Gustafsson
Atavistic
Il fallait bien que ça arrive un jour. « C’était écrit », diront les plus bigots. Il existe, quelque part dans l’univers quantique, des rencontres qui se révèlent nécessaires. Attendez… Comment imaginer que le combo le plus free du noise-rock ne fasse pas un essai avec le saxophoniste le plus punk de sa génération, et accessoirement le plus proche d’un Peter Brötzmann, nouveau rejeton ? Rassurez vous, c’est chose faîte. Et en plus, c’est que l’objet tient parfaitement la route, à défaut de ne pas créer l’emphase ultime que certains tarés voulaient, telle la montée de Chtulu hors des eaux. Y’en a, je vous jure ! « How To Raise An Ox » est aussi court qu’intéressant qu’il ne laissera pas d’empreinte sur le sol. Zu est parfaitement capable de faire côtoyer sa folie avec celle d’autres artistes (Zu et Dälek en live… Arghhh…), Gustafsson aussi, vu le nombre de projets qu’il serait vain de tous citer. Certains diront : « plus et plus égale moins »… Je ricane.
Oui, ce ne sera jamais l’album absolu entre ces deux formations et ils feront, chacun, bien mieux de leur côté. Mais en tant que tel, l’objet qui nous intéresse ici reste un condensé de free-jazz jubilatoire, se permettant de brusques apartés bruitistes comme les protagonistes en ont le secret. Accélération soudaine de la batterie, persiflage des saxos à l’unisson pour une symphonie de discordance délectable, mais aussi des ambiances plus posées, des atmosphères qui prennent le temps d’évoluer, de se créer en même temps que les instigateurs triturent leurs instruments. Effet d’immédiateté typique, et c’est un plaisir, avouons-le. Cela n’amène rien, mais c’est fait avec conviction, emphase et plaisir communicatif non feint (les musiciens étant partageurs de la qualité de chacun, mais qui aurait cru le contraire ?) Plus je l’écoute et plus je me dis que c’est un album d’un instant déterminé. Cela pourrait être pire, cela pourrait être mieux.
Un disque à prendre tel qu’il est : jouissif, revigorant et fondamentalement sympathique. Un bœuf entre amis qu’on laisse écouter au plus grand nombre. Messieurs, que demander de plus ? Je m’incline devant votre talent autant que j’aurais souhaité, en pure perte, voir l’explosion, l’apocalypse d’un jazz outrancier. Mais, qualité parlant avant tout, j’adhère. Merci !
Jérémy Urbain (7/10)
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