Live report Cynic + Obscura + Cryptosis au Petit Bain de Paris le 15 mars 2024
2024
Lucas Biela
Live report Cynic + Obscura + Cryptosis au Petit Bain de Paris le 15 mars 2024
Comme beaucoup, j’ai découvert les Américains de Cynic avec leur premier album, Focus. C’était en 1993, quand le death metal faisait florès. A l’époque, le vocoder dans un contexte « extrême » m’avait quelque peu décontenancé. Bien des années plus tard, j’appris que cet album était une des pierres fondatrices de la fusion entre le jazz et le metal. Il s’agit donc d’un groupe-culte que je m’apprête à voir ce 15 mars 2024. Il sera précédé de deux formations que j’apprécie tout autant, les Hollandais de Cryptosis et les Allemands d’Obscura. Qui dit concert de metal dit T-shirt de circonstance. Et il n’est pas choisi au hasard puisqu’il permet de deviner mon âge (ce sera l’immense Lightning To The Nations de Diamond Head). Je me rends pour la première fois au Petit Bain, un « équipement culturel flottant » comme on peut lire sur leur site web. En effet, c’est sur les bords de Seine que le rendez-vous a lieu. En discutant avec un des participants, j’apprends que la salle peut accueillir 450 personnes et que le concert est complet. Il m’indique aussi que l’acoustique y est très bonne (vous verrez plus loin pourquoi je reprends ici ce détail).
Bien que Cryptosis n’aient sorti leur premier enregistrement qu’en 2021, ils étaient connus auparavant sous le nom de Distillator, avec même deux albums à leur actif. Nos Hollandais ne sont donc pas nés de la dernière pluie. D’un point de vue musical, c’est du thrash metal progressif dans la veine de Vektor, groupe avec lequel ils ont partagé un split. Sur scène, c’est du bon tabassage en règle. La différence entre le bon et le mauvais tabassage ? Demandez aux Inconnus ! Disons qu’ici, ça martèle par étages, avec des ruptures de rythme (les escaliers entre chaque étage) et des variations de tempo (le niveau de chaque étage). Quand ils ne tabassent pas cependant, comme sur « Prospect Of Immortality », la musique en devient moins convaincante (« bon sang, mais c’est quand même du thrash qu’on attend d’eux ! »). Les trémolos angoissants de la guitare, autant que les dédales empruntés par la batterie, et les interludes qu’on dirait tout droit sortis de films d’anticipation, apportent un côté « sci-fi » à leur musique. Le trio exécute un set de qualité, mais là où le bât blesse, c’est que les « lyric videos » projetées à l’arrière nous empêchent de concentrer notre attention sur leur prestation, distraits que nous sommes par les images. Les projecteurs n’étant d’ailleurs pas braqués sur la scène, on ne distingue que la silhouette des musiciens. Je faisais d’ailleurs remarquer à un des spectateurs : « on n’est pas venu voir un film mais un concert ».
Viennent ensuite Obscura, un groupe de death metal progressif qui fait parler de lui depuis 20 ans. Mais là, gros malaise car on n’entend presque que le chant, la batterie et la basse. C’est la faute à un mixage mettant trop en avant la rythmique. J’en discute avec quelques participants, qui tous me disent être déçus : « le son est plat », « le son est pourri », « on n’entend que la batterie ». « Sounds awful » entendra-t-on même ! Avec un collègue de soirée, je plaisante : « on n’est pas venu à un concert de drum’n’bass ». Les guitares sont en effet peu perceptibles, et quand elles se mettent en branle, ce sont des sons stridents qui en sortent. Mes oreilles en souffrent tellement que je me vois contraint de les boucher. A un moment, je finis même par reculer, réflexe que d’autres ont également eu dans la salle. M. « Sounds awful » me fait remarquer qu’ « à une époque, le public aurait jeté des bières au groupe » si de tels problèmes de son s’étaient produits. J’en rigole, mais je pense que j’aurais fait pareil à « cette époque ». Vous vous rappelez que j’avais été informé que la salle présentait une bonne acoustique. J’apprends également que Suffocation, le mois précédent, avait réalisé un set nickel. Ce sont les ingénieurs du son qui sont pointés du doigt dans ce désastre, et malheureusement cette drum’n’bassisation de concerts metal semble être en vogue… Il est dommage que la prestation énergique des Allemands ait été ruinée par des problèmes de mixage. Avec d’autres spectateurs, on croise les doigts pour que ce ne soit pas le cas avec la tête d’affiche.
Quand Cynic se présentent, je regarde l’air hagard mes compagnons de soirée. En effet, les effluves ethno-ambient me mettent à l’esprit l’ami Hery Randriambololona (alias Ujjaya), et je me fends d’un trait d’humour : « c’est parti pour un sleep concert ». Cela ne manquera pas de faire rire mes nouveaux amis, mais en fait, ce n’était qu’une introduction avant un set qui se focalise sur Focus justement. Les problèmes de distortion semblent appartenir au passé, en revanche la drum’n’bassisation frappe à nouveau. Certes, le seul membre originel de Cynic, Paul Masvidal, montre les gros bras (au sens propre), mais ce sont des solos aériens qu’il effectue, proche des moments les plus introspectifs d’Allan Holdsworth. Avec le temps, j’ai appris à apprécier sa voix passée au vocoder. L’équipe qui l’entoure est aux petits oignons, même le growleur caché derrière parvient à me faire vibrer comme à l’époque où je découvrais le groupe. Enchaînant les morceaux de leur album-culte, la formation sonne comme à la grande époque, malgré l’absence des piliers que représentaient les Sean (Sean Malone et Sean Reinert), tous deux décédés en 2020. Dans l’interlude qui suivra le set « focusé », la formation rendra hommage à ces deux musiciens hors pair en projetant leur portrait sur grand écran. Le set s’est ensuite poursuivi par des morceaux des albums qui ont suivi Focus, mais j’avais deux raisons de ne pas y assister. La première est que je suis moins emballé par cette période. La seconde est que passé 22h30, je n’ai plus de train sur ma ligne (il est en effet déjà 22h07 quand je quitte les lieux, et il me faut bien une vingtaine de minutes pour rejoindre la Gare du Nord).
En conclusion, le concert était en demi-teinte. Des groupes qui jouent certes avec passion et énergie sur scène, mais une soirée quelque peu gâchée par, d’un côté des projections sur écran détournant notre attention, et de l’autre de gros problèmes de son.
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ça devient de plus en plus ‘fou’ de ne pouvoir assister à un concert en entier au vu des transports en commun qui s’arrêtent en début de soirée!