William Shatner – Ponder The Mystery

Ponder The Mystery
William Shatner
2012
Mis

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William Shatner est dans l’espace. Depuis le lancement du premier vaisseau spatial USS Enterprise en 1965, il n’en est jamais redescendu. Capable de passer de Star Trek à Hooker, puis à l’une des meilleures séries US des années 2000 « Boston Legal » (Boston Justice en Français), il a aussi une carrière… musicale ! En 1968, lorsque débarque « The Transformed Man », les américains ne savent pas quoi faire de cet OMNI, objet musical non identifié. En effet, le Capitaine Kirk n’est pas chanteur. Il joue donc des textes déclamés sur la musique, un peu comme John Trudell ou Grand Corps Malade en d’autres coefficients espace-temps. Totalement incompris à l’époque, le disque est classé dans le genre « humour » ! Shatner y reprend des extraits de Shakespeare ou de Cyrano (effectivement très drôle), et incarne un rôle comme s’il était sur une scène de Broadway, sur des musiques orchestrales cinématographiques, passant du grandiose de la bataille à l’intimiste d’une balade à cheval dans le désert. Il reprend également Bob Dylan et les Beatles de façon inédite, où il laisse exploser sa fantaisie. Sa reprise de « Lucy In The Sky With Diamonds » sera d’ailleurs votée comme la pire reprise des Beatles ! Slammeur avant l’heure, William Shatner confirme son aura d’acteur culte, avec un disque désarmant. Plein d’esprit, il tournera la mauvaise réception de ce disque à son avantage, en se parodiant lui-même dans de multiples émissions TV, et en participant ici où là, à des B.O de films. Et cela ne l’empêchera pas de sortir un double live en 1977 !

Il faudra attendre 2004 pour qu’un nouvel album studio voie le jour. Enregistré avec le pianiste chanteur Ben Folds, « Has Been » explore les possibilités d’un Shatner toujours aussi extravagant, mais avec le recul de l’âge. La musique de Ben Folds, résolument moderne, crée une atmosphère pop inédite, et n’oublie pas non plus de verser dans la pure parodie. Un style unique ! En 2011, voilà que déboule en vitesse de distorsion facteur neuf « Seeking Major Tom », un double album de reprises de classiques hard-rock et progressif, avec une pléiade d’invités de renom : Ritchie Blackmore, John Wetton, Brian May, Peter Frampton, Patrick Moraz, Ian Paice, Steve Howe et Alan Parsons, entre autres ! Il s’agit là d’un voyage dans le cosmos absolument réussi, où William Shatner reprend Bowie, Queen, Pink Floyd, Deep Purple, Elton John, Sting, et même… The Tea Party ! C’est dire à quel point l’homme a bon goût ! Avec toujours ce style indéfinissable, ces morceaux sont poussés vers leur retranchement. On adhère ou on rejette, il n’y a pas de juste milieu !

A peine 2 ans plus tard, et auréolé du succès de « Seeking Major Tom »,  nous arrive enfin « Ponder The Mystery », enregistré avec le groupe de rock progressif Circa, composé de Billy Sherwood et de Tony Kaye, tous deux des ex-membres de Yes. Car c’est bel est bien de rock progressif dont il est question ici, un genre musical particulièrement apprécié par l’acteur canadien du haut de ses 82 ans (!), et sur lequel il tient d’ailleurs ces propos : « Je pense que le prog rock est la science-fiction de la musique. La science-fiction spécule sur ce que pourrait être le futur et comment nous y arriverons. Il y a toujours un thème central : l’humanité. Le rock progressif a le même concept d’exploration dans les recoins du monde de la musique qui n’ont pas encore été explorés« . Un bien joli parallèle, même si musicalement parlant, « Ponder The Mystery » ne nous emmène pas vraiment « découvrir de nouveaux mondes étranges » ou « avancer vers l’inconnu ».

Une nouvelle fois, Shatner s’est entouré de musiciens invités prestigieux comme Steve Vai, Al Di Meola, Edgar Froese (Tangerine Dream), Rick Wakeman (ex-Yes, encore un !), Mick Jones, Robby Krieger et quelques autres. Tout est cette-fois ci composé par Shatner et Sherwood, également crédité à la production et au chant, ainsi que sur de multiples contributions instrumentales. Le premier a écrit l’ensemble des textes (14 titres, sans compter la courte plage d’introduction), le second s’est chargé de les mettre en musique, et son style bien à lui transpire de la première à la dernière note. En gros, attendez-vous à une sorte de Yes west-coast (celui de « Open Your Eyes » pour l’occasion), en plus bluesy, symphonique et jazzy toutefois, enrichit par de nombreuses contributions en soliste allant du meilleur (la guitare de Steve Vai sur l’excellent titre éponyme) au plus dispensable (les claviers un peu kitsch et éculés de Wakeman sur « Change »).

Sur le plan vocal, le duo Shatner/Sherwood fonctionne quant à lui merveilleusement bien, avec une répartition des rôles on ne peut plus simple : l’acteur assure l’ensemble des narrations avec sa voix grave, chaude, expressive, toute en nuances, et le guitariste les nombreuses parties chantées et chœurs Yessiens en diable, où il ne manque plus qu’un Chris Squire pour le seconder. Les timbres des deux interprètes s’interpellent, s’intercalent ou se superposent selon la situation, en une parfaite complémentarité, pour ne pas dire alchimie. Et celle-ci reste constante tout au long de ce disque hautement improbable qui ressemble comme deux gouttes d’eau à un album solo de Billy Sherwood, tant la patte, les mélodies et le « son » caractéristiques de ce dernier demeurent omniprésents dans tous les aspects du projet.

Si l’album est exempt de moments de bravoure inoubliables et qu’il n’entrera certes pas dans les annales du rock, il n’en demeure pas moins une œuvre sincère et fort plaisante, doublée d’une vraie curiosité (un nouvel « OMNI », c’est indéniable), voire d’un objet de culte indispensable pour les plus geeks d’entre nous. En effet, le trekkie (ou « trekker ») par ailleurs fan de rock-prog ne peut décemment pas faire l’impasse sur l’acquisition de ce « Ponder The  Mystery », en vente chez tous les bons disquaires de la fédération unie des planètes, sauf chez les Klingons bien sûr, qui ne jurent que par le black-metal et l’extrême. Et puis, c’est quand même le Capitaine Kirk en personne qui trône sur la pochette, alors rien que pour ça…

Fred Natuzzi & Philippe Vallin (7,5/10)

http://williamshatner.com/ws/

2 commentaires

  • Je ne pensais pas le chroniquer, mais quand je lis cette chronique, je me demande si j’ai reçu le même album, sincèrement… 7.5/10 ?
    Ou alors c’est pour récompenser les musiciens qui ont eu le courrage de bosser avec captain Kirk… Pour l’insntant, je n’ai pas encore réussi à dépasser le quatrième morceau, les monologues de
    Shatner me donnent soit des fous rires, soit des crises de nerfs…

  • Bonjour, ici Fred Natuzzi, merci pour ce retour. Effectivement, William Shatner a toujours étét décrié niveau musique. On peut avoir une réaction épidermique ce qui m’a l’air d’être ton cas. Phil
    et moi avons apprécié cette combinaison textes joués et musique prog. Nous connaissions tous les albums du capitaine Kirk, nous n’étions donc pas étonnés de la teneur du disque. Musicalement.

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