The Tea Party – Blood Moon Rising
InsideOut Music
2021
Fred Natuzzi
The Tea Party – Blood Moon Rising
Cela faisait sept ans que The Tea Party n’avait pas sorti un nouvel opus. Cette formation canadienne, malheureusement peu connue en France, a sorti par le passé, surtout dans les années 90, des disques de haute volée mélangeant le heavy rock avec des instruments du Moyen-Orient, un peu à la manière de leur groupe fétiche, Led Zeppelin. Avec un chanteur à la voix envoûtante et charismatique, ils ont été catalogués dans le rock gothique, peut-être pour les atmosphères couvertes à cette époque. Cependant, The Tea Party, c’est plutôt un bon groupe de blues, de rock costaud avec un soupçon de progressif pour donner à l’ensemble un univers flamboyant où il fait bon se perdre vénéneusement. Alors donc, un nouvel album de The Tea Party ? Pas vraiment en fait. Il y a eu l’EP Black River en 2019 contenant six titres, puis quelques reprises pendant le confinement. Du coup, InsideOut Music a décidé de compiler l’EP et ces morceaux, de les accompagner de quelques inédits et de sortir ce Blood Moon Rising en tant qu’album à part entière. Idée judicieuse pour les fans en Europe, car l’EP n’était disponible qu’en vinyle à commander directement au groupe. Un petit coup pour le porte-monnaie… De ce fait, l’existence de cet album résulte de la volonté de la maison de disque plus que de celle du groupe qui souhaitait sortir un autre EP (ce qui a été fait au Canada). Blood Moon Rising pêche par cet assemblage qui ressemble donc plus à une compilation qu’à un véritable album. Cependant, cette collection fonctionne très bien et présente le côté le plus « grand public » du groupe. Pas d’instruments exotiques dans ces compositions, juste des musiciens qui souhaitent jouer de la musique honnêtement et sans fioritures. La pandémie faisant que tous les titres ont été enregistrés à distance, il y avait peu de chance que The Tea Party reparte dans des compos trop complexes.
Je ne parlerai pas des morceaux issus de l’EP Black River, car je vous invite à lire ma chronique de l’époque ! Après un démarrage sur les chapeaux de roue avec « Black River » et « Way Way Down » nous arrive un « Sunshower » au son dans la droite lignée des précédents efforts du groupe. Un terrain familier rassurant sur la forme du combo, mais aussi sur la direction empruntée. Pas de changement effectivement, mais la signature typique de The Tea Party est bien là avec un superbe pont et un excellent solo de guitare. Plus la chanson avance, plus le sourire sur notre visage s’élargit. Un « So Careless » plus tard et nous voilà en présence de la fort jolie ballade « Our Love ». Elle prouve définitivement que la période de création de cet album n’était pas propice aux morceaux sombres, l’autre face de The Tea Party. « Hole In My Heart » renoue avec le rock intense qui fait le sel du groupe.
Un « Shelter » plus loin, c’est le single « Summertime » qui nous révèle le côté le plus rock étincelant de la formation. L’exemple le plus probant du rock décomplexé que peut proposer nos canadiens décidément très en forme. Après la reprise de Led Zep, « Out On The Tiles », mainte fois interprétée en concert, c’est la beauté qui porte bien son nom : l’enchanteur « The Beautiful ». Ce morceau tient la route et pourrait facilement passer en radio. Enfin, « Blood Moon Rising » clôture l’album, avant deux reprises en bonus (uniquement sur le format cd) . Tout d’abord, « Isolation » de Joy Division, qui résulte de l’état propre au confinement et « Everyday Is Like Sunday » de Morrissey, car chaque jour pendant cette période ressemblait à un dimanche. Ce chef-d’œuvre pop d’ironie et de mal-être est bien rendu par une rythmique très dynamique.
The Tea Party continue d’écumer les routes surtout au Canada, aux États-Unis et en Australie. Peut-être aurons-nous la chance de les voir en Europe un jour ? En tout cas ils y travaillent. Maintenant, cet album en forme de transition doit être suivi par quelque chose de plus original, car The Tea Party, c’est plus que ce que l’on entend dans Blood Moon Rising. L’album n’est pas décevant en soi, c’est toujours une joie que d’entendre Jeff Martin, Stuart Chatwood et Jeff Burrows, mais l’attente est longue entre les albums. Le côté vénéneux que j’évoquais en introduction manque désormais dans le paysage offert par le groupe, ainsi que les instruments orientaux. Bien entendu, tout le monde évolue et c’est tant mieux. Délaisser complètement cet univers si cher aux fans serait sans doute une erreur. Le futur nous le dira. En attendant, réjouissons-nous de pouvoir encore entendre The Tea Party, après 30 ans de carrière !