The Pineapple Thief – All The Wars
The Pineapple Thief
Kscope
Autant le dire tout de suite, si vous étiez fan de la première heure de The Pineapple Thief, vous avez sûrement été déçu par l’évolution du groupe anglais, mené par l’excellent Bruce Soord. Et ce n’est pas ce nouvel album qui va vous réconcilier avec lui … « All The Wars » relève en effet plus du rock indépendant avec des pointes de progressif que du progressif lui-même. Exit les superbes plages de 15 minutes intenses qui ont fait les grandes heures de « Variations On A Dream » ou « 10 Stories Down », par exemple, place au rock plus direct, matinée de cordes, pour un résultat punchy, certes, mais qui manque d’âme. Oui, Pineapple Thief avait une âme, une émotion propre à lui-même, palpable, vibrante, exarcerbée, notamment dans le poignant album « Little Man ». Et avec « Tightly Unwound » en 2008, voilà qu’elle s’en va. Paradoxalement, c’est le début d’une reconnaissance plus étendue, qui se concrétise avec le label K-Scope sur lequel sortiront nouveaux albums et rééditions. L’album suivant « Someone Here Is Missing » retrouvera par moment cette âme consumée, et réveillera les espoirs. « All The Wars » les renverra au placard.
Pourtant, l’album n’est pas mauvais, loin de là. Et si l’on commence par celui-ci sans connaitre les précédents, l’on si plaira volontiers. Le timbre de Bruce Soord ressemble beaucoup à celui de Thom Yorke de Radiohead, en moins plaintif et en plus articulé ! Ce qui plaisait dans le groupe précédemment, c’était cette atmosphère désenchantée ; il y avait aussi de la colère et du désespoir, et le mélange aboutissait à des morceaux fulgurants de hargne (des paroles étaient répétées 10 minutes durant !), tout en gardant un aspect planant, voire hypnotique. L’ensemble, sur ce nouvel album, est plus direct, peut-être plus commercial. « Burning Pieces » qui ouvre l’opus en est un bon exemple : le son s’est durci, les riffs sont directs et efficaces, avec toujours un côté Porcupine Tree qui n’a jamais quitté le groupe. L’utilisation de cordes est nouvelle, et « Last Man Standing » bénéficie d’un traitement original, comme « All The Wars », acoustique et mélancolique, renforcée par ces cordes magnifiques. « Give It Back » revient au style précédent du groupe, mais peine à convaincre, malgré une belle montée en intensité. Saluons la belle mélodie de « Someone Pull Me Out » et la délicatesse de « One More Step Away ». Quant au dernier morceau, « Reaching Out », il combine tous les éléments de cet album avec brio sur près de 10 minutes ; acoustique, mélodique, orchestral et progressif, tout est brillamment mis en place et si tout avait été de cet acabit, on aurait tenu un album extraordinaire.
L’édition limitée présente un second CD où la plupart des morceaux de l’album sont joués en acoustique, en gardant les cordes. Les mélodies ressortent et, en fait, on s’aperçoit que ces versions- là sont peut-être plus intéressantes et plus belles que sur le disque électrique ! On en arrive à penser que si cet opus est moins prenant que les autres, c’est en fait parce que le travail sur l’orchestre a été la priorité, et que les morceaux se sont construits autour de celui-ci. Ou peut-être que non, allez savoir… En tout cas, « All The Wars » reste un bon moment de musique, mais pour le fan, bien en-dessous des précédents. Laissons tout de même le bénéfice du doute à cet excellent groupe, et je vous invite à découvrir leur univers en commençant par les plus représentatifs « Variations On A Dream », « Someone Here Is MIssing », « Little Man » et « 10 Stories Down ».
Fred Natuzzi (7/10)