Slim Wild Boar – The Lovesick, The Guilty, & The Drunk

The Lovesick, The Guilty, & The Drunk
Slim Wild Boar
2009
Devil's Ruin Records

Slim Wild Boar – The Lovesick, The Guilty, & The Drunk

Par moments, il existe dans ma petite tête des sentiments lointains qui me transportent dans ces lieux refuges de mon enfance, en face des films de Sergio Leone et Sergio Corbucci avec leur étendues lointaines faites de désert, de villes perdues au milieu de nulle part. Les sales trognes, les tronches burinées, clopes grasses roulées au bec, l’alcool qui coule à flot quitte à faire sauter tout l’établissement à la moindre étincelle. Au milieu de ces nuages de fumés, signes extérieurs de virilité, un groupe joue sa musique. Son empreinte est estampillée folk, sa guitare sèche qui claque, sa voix posée et du blues qui déclame sa prose à la vie, belle et terrifiante. Le whisky, frelaté forcément, au fond du verre, le colt, excroissance de la bite, au plus près des noix, le chapeau vissé sur le crane. Et ce groupe joue, il s’amuse, mais avec sérieux. C’est comme se faire hanter par les fantômes du passé. Ça passe juste où il faut, ça titille juste là où c’est permis. Projeté sans l’être, un homme me dévisage, il crache un jet long et gluant à ses pieds. La transpiration, due à cette putain de chaleur, lui donne un air de statue cuivrée. Un univers que, bizarrement, je ne connais que trop bien.

Moi, je continue à boire tout en lorgnant sur cette bouteille que le barman pouilleux surveille. C’est que je ne l’ai pas encore payée, entièrement. Et c’est qu’il est observateur le bougre. Tu peux continuer à mâcher ta chique qui pue, cette bouteille, elle est à moi, certain, quasi… Les accords résonnent dans mes oreilles comme un acouphène, je pourrais presque dire que c’est de l’écho. Cette voix, ces accents dignes d’un écrit de Faulkner, ces personnages plus « fucked-up » les uns que les autres, ceux qui ont une histoire, ceux qui cherchent à s’en construire une dans l’alcool, les filles ou la poudre. C’est qu’il y a mon train dans peu de temps, il faut que je me grouille un peu. Je gardais mieux la cadence auparavant.

Damn ! Tiens, une guitare électrique ! Ca fait pas un peu anachronique tout ça ? Boaf, je m’en fous, ça colle tellement bien. Cette atmosphère, je la respire comme les vapeurs du whisky que j’ingurgite à grosses lampées. Bon, ben, c’est pas tout ça, mais j’entends le sifflement de la locomotive. Ça ressemble plus à un rappel à l’ordre, dis donc. Fait chier, j’ai pas pu finir la bouteille. Je jette deux pièces au barman, celui-ci, comme toute réponse, me pousse un grognement entre ses lèvres brulées et boursoufflées. C’est bizarre, j’ai l’impression que mon chapeau colle au cuir chevelu. Je remballe mon sac, et sors dans la rue.

Putain de soleil… De ma main gauche, je prends la lanière de cuir. La passant sur mon épaule, je commence à tirer mon fardeau. Je suis peut-être malade… Me dirigeant vers la gare, je tire le cercueil de bois. Si seulement j’avais encore mon cheval !

Jérémy Urbain (8/10)

http://www.slimwildboar.com/

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