Seven Eyed Crow – Organized Chaos
Send The Wood Music
2017
Rudzik
Seven Eyed Crow – Organized Chaos
Le metal progressif est-il un genre musical à bout de souffle ? En voilà un bon sujet de dissertation pour le bac ! Et là, cher membre de Seven Eyed Crow, tu te dis « Ça y est, on est partis pour se faire flinguer en règle dans cette chronique ».
Détrompe-toi ! Tout d’abord, Seven Eyed Crow est un groupe originaire de Bordeaux et une région qui produit de l’aussi bon pinard ne peut produire que des bons groupes, non ? Euh, bon, j’ai dû en consommer un peu trop pour en arriver à une telle conclusion. Mais il est vrai qu’au-delà d’une certaine limite, on aime tout le monde. Je vous rassure, je rédige cette chronique en étant complètement sobre, donc mon jugement n’est pas altéré.
Si le metal progressif peine à trouver un second souffle (fans de Dream Theater dont je fus, suivez mon regard), certains groupes comme Caligula’s Horse, Karnivool ou Anubis (l’Australie serait-elle sa nouvelle terre d’accueil?) parviennent à entretenir la flamme. On semble y retrouver ces influences plutôt que celles d’Oceansize et A Perfect Circle cités dans la biographie du groupe, hormis peut-être pour les quelques growls qui émaillent avec parcimonie mais judicieusement l’album (tant mieux pour moi qui n’en suis pas accro).
En parlant de flamme, Seven Eyed Crow serait plutôt le soldat inconnu car Organized Chaos n’est que son second album. Pourtant, celui-ci est plutôt « organized » que « chaos » avec des titres très bien construits, mais j’y reviendrai.
Même si l’album démarre par une intro inquiétante acoustique, on remarque très vite le talent de Jay, son chanteur et parfois hurleur, dont les origines jazz/hip-hop peinent à transpirer. Il varie beaucoup les intonations, passant de l’ agressivité à la mélodie et à la sensibilité tout en parvenant à dompter sans problème les riffs féroces des puissants Oreye et Alex.
C’est bien beau tout ça mais sans des compos de qualité, ça ne servirait pas à grand- chose et c’est là que Seven Eyed Crow « crève le plafond de verre » (expression imagée britannique que je viens d’apprendre alors j’en profite pour me la péter un peu même si elle n’est pas facile à placer en français). Et oui ! Le songwriting est excellent et riche. La facilité n’est pas de mise. Outre les traditionnels riffs plombés et syncopés du metal prog (« Organized Chaos »), on y trouve des intonations orientales saturées … ou non (« Scenarii Of Yours »), une ballade burnée et pas chiante comportant quelques percussions inattendues (« Standards ») et des titres lorgnant du côté du rock alternatif (« As Leaders », « 2099 »).
La production est très correcte et je note surtout que la basse n’est pas écrasée par les riffs ou la grosse caisse de Fred et réciproquement. Du coup, le jeu groovy de Tom ressort nettement sur un titre comme « Lizard Brain Part. 2 », qui est mon préféré de l’album.
Celui-ci se termine de façon surprenante sur un titre complètement acoustique qui met en évidence, s’il le fallait encore, les inspirations très mélodiques d’un groupe qui ne s’est pas contenté d’aligner des riffs syncopés assassins en se concentrant uniquement sur la performance technique.
Faut-il dresser un arc de triomphe au-dessus de la flamme de Seven Eyed Crow ? Je n’irais pas jusque là mais son Organized Chaos est quand même sacrément bien gaulé. En cette période estivale 2018 où le coq gaulois est à la fête, il me paraissait nécessaire de jeter un coup de projecteur sur ces Girondins qui ne se produisent pas (encore ?) au stade « Matmachin Atlantique » de Bordeaux.