Quand Pendragon monte sur le ring à Lyon, le 27 octobre 2014… KAO !
Partis de Chambéry, mon ami Patrice (organisateur du « Grésiprog ») et moi nous dirigeons activement vers la merveilleuse ville de Lyon, et plus précisément vers le lieu du Ninkasi. Créé dans les locaux d’une ancienne entreprise de transport, le Ninkasi Gerland est un site historique, un lieu de vie et de convivialité pouvant accueillir jusqu’à 1500 personnes. Il abrite un café-concert (« le Kafé ») où la bière est fabriquée sur place (d’où son nom faisant référence à la déesse de la bière), un restaurant avec service à table (« le Silo »), plusieurs espaces pour se détendre, et enfin une salle de spectacles de presque 600 places (« le KAO »). L’activité musicale est prometteuse et depuis quelques années, le Kao propose un vrai lieu pour la scène, alternatif à la fois aux pubs et autres café-concert à la programmation intimiste, ainsi qu’aux salles de grande capacité. C’est donc un endroit réputé pour la musique (90 concerts de tous types par an), mais aussi pour la qualité de sa restauration… et de sa bière !
Arrivés bien avant l’heure, nous dégustons évidemment une excellente bière blanche bien fraîche, et on sent déjà planer une ambiance philosophique où règnent convivialité, authenticité et accessibilité ! Devant la-dite sale du Kao, on trouve le bus du tour de Pendragon stationné à quelques mètres de l’entrée. La file d’attente est bien longue, mais l’acheminement dans la salle se déroule progressivement. Une chaleur oppressante se fait ressentir dès le début : est-ce le stress, l’agitation du moment ou la simple chaleur humaine ? En ouverture, Gary Chandler (que nous avions eu le plaisir de découvrir en mai 2013 « Chez Paulette » dans le 54) nous propose, seul en scène, des morceaux extraits du répertoire de Jadis, son célèbre groupe de néo-prog. Tout en s’accompagnant à la guitare, il joue des compositions souples et, pour un ou deux titres, ajoute du synthé et de la batterie pré-enregistrés. La voix de Gary Chandler est très mélodieuse, avec un timbre fort agréable. Souriant et plaisantant, son nom projeté en arrière-plan se déforme et devient « Gary Champignon ». Des rires éclatent et le musicien, vraisemblablement heureux d’être là, nous joue en plus de son répertoire un morceau de Genesis à la perfection. On relève néanmoins quelques maladresses pour conclure certaines de ses chansons, mais ce brillant technicien de la guitare réussit facilement à estomper ses fautes. La soirée débute et nous met l’appétit en bouche.
A peine 15 minutes d’attente entre les deux sets, et voilà que montent sur scène un à un nos chaleureux anglais. En premier, arrive tranquillement Peter Gee (basse, guitare, claviers) à la démarche zen, puis Craig Blundell (le batteur), le sourire inquiet. C’est la nouvelle recrue du combo, suite au départ de Scott Higham en avril 2014. Clive Nolan (aux claviers « tournants » apparaît tout en charisme, la main levée avec sa longue chevelure d’ange. Enfin, sous un tonnerre d’applaudissements, émerge sereinement le frontman Nick Barrett (chant et guitare). C’est avec « If I Were the Wind (and You Were the Rain) » que le premier round est lancé. Les cris et applaudissements embrasent la salle qui n’a rien perdu de sa forte tempétarure. C’est show, très chaud ! Puis se suivent « Eraserhead » (de l’album « Pure ») et « Empathy » (le fougueux premier titre « Passion »), majestueux morceau qui exprime une forte dose d’énergie et de sensibilité. Il s’agit là aussi d’un pur mélange passionnant qui dégage une atmosphère sereine et joviale. Ainsi, Nick, essayant de parler français, fait rire tous ses fans… En échange, on lui apprend que « glue » signifie « colle » en français, alors que pour lui, c’est le nominatif qualifiant son collègue Peter. Un peu de sérieux tout de même !
De leur magnifique album « The Masquerade Overture », ils nous proposent l’excellent et désormais classique « Paintbox ». Craig rehausse le niveau en crescendo, et on l’impression qu’il arrive enfin à se faire entendre. Les claviers du maître Clive résonnent comme dans un lieu spirituel, et là, une ambiance harmonieuse se peint. Au final de cette merveille, Craig prend le show en main et nous montre en quelques minutes sa technique absolument incroyable, ainsi que son jeu moins poussif que son prédécesseur. Son style davantage créatif et « technologique » s’adapte parfaitement aux lignes mélodiques du groupe. Nick lui laisse la voie libre et semble satisfait. Craig a joué de façon posée les trois premiers morceaux, voire même timidement, puis suite à son solo, ce nouveau batteur s’est comme fait baptiser par la foule hyper conquise. C’est OK, on l’accepte ! Il a su en quelques instants nous montrer l’étendue de son talent en solo, à la fois technique et puissant. Rempli d’assurance, le rythmicien s’installe ensuite confortablement avec « This Green And Pleasant Land ». Il dégage une belle présence, certes différente de Scott, mais son jeu est à la fois subtil et énergique. Son adaptation au groupe est remarquable : apprendre en quelques jours tout le répertoire de la tournée, chapeau bas M. Blundell !
2ème round ! De leur nouvel opus « Men Who Climb Mountains » (10ème enregistrement studio du groupe en 30 années de carrière), deux titres se succèdent : « Beautiful Soul » et « Faces Of Light ». GRANDIOSE ! Les jeux de lumière s’harmonisent comme par magie à ces nouveaux titres. Pendragon met la guitare au centre de sa musique. Peter et Nick changent très régulièrement d’instruments, adaptés aux besoins des différents morceaux. Alors que les deux albums précédents « Pure » et « Passion » avaient un côté clairement novateur, « MWCM » renoue avec le goût de la mélodie et des thèmes cultivés intensément au fil de morceaux parfois longs. L’ambiance est bon enfant. La communication de Nick avec son public est joviale. Clive, malade quelques jours auparavant, sourit sans cesse et nous montre sa forme en faisant tournoyer ses claviers. Quelle habileté ! En tout cas, le public est très enthousiaste et semble apprécier le show. Pour ma part, ce concert me touche. J’ai toujours cette impression de décoller mes pieds du sol, et me sens dans une bulle parfumée d’émotions.
3ème round ! La magie prend sans attendre quand Pendragon s’aventure vers le grandiose « Breaking The Spell ». Quelle ovation ! On l’attendait de pied ferme celle-là. Les cabrioles guitaristiques débridées nous assaillent d’émotion, appelons cela tout simplement la maîtrise. Quel Bonheur ! Quand vous vous plongez dans un concert dit « progressif », vous êtes ainsi parfaitement transporté et hypnotisé par tout ce qui peut pénétrer vos sens. La musique prend ainsi une tournure émotive, car qui dit « progressif » dit « reflet de l’âme », subtilité enrobée de force, technicité au service de l’émotion, grand talent de musiciens certes, mais aussi de conteurs, de créateurs de plaisir et de rêves… Un troisième titre du nouvel opus s’offre à nous. Ce soir au stand merchandising, l’achat du CD est incontestablement obligatoire. Peter jongle entre sa basse, ses guitares, dont une assez particulière posée sur un socle. L’homme démontre une attitude apaisée. Clive s’éclate sur ses claviers tandis que Craig domine sa monstrueuse batterie. Quant à Nick, son chant très british entraîne royalement cette armada d’instruments. L’art musical prend ici tout son sens. Après « Nostradamus » et « It’s Only Me », le quatuor s’échappe de la scène et le public sans perdre un instant le rappelle de façon déterminée.
4ème round ! C’est alors que, sans surprise, Pendragon surgit et nous dévoile de leurs écrins deux bijoux incontestables : « Indigo » et « Masters Of Illusion ». Ces deux perles représentent à elles seules une âme qu’il semble difficile de ne pas les sublimer comme elles le méritent. Le public est encore une fois conquis ! Quelle belle aventure que ces plus de 2H30 de musique live, entre variations instantanées alliant rock, musique classique et british pop au progressif « de base ».
5 ème round ! Ou la touche finale, celle où les talentueux et généreux artistes se joignent à nous pour partager un regard, un sourire, un moment …pour parler quoi ! Bien qu’il faille connaître un minimum la langue de Shakespeare !! Nick est toujours autant abordable et amusant… « Do you remember last year ? ». Quelle incroyable soirée, et je pèse mes mots car là, encore aujourd’hui, j’en reste… KAO !
Nad Gotti
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Et Domi Léonetti (Lazuli) va pouvoir demander des droits d’auteur pour la barbe tressée !
A part cela, superbe compte-rendu qui donne envie !
Merci
Merci Jean-Luc … J’écris par plaisir et j’essaie de retranscrire au mieux mon vécu, même si c’est difficlle de mettre parfois des mots sur des émotions !
J’ai la même problématique que toi avec les chroniques et autres live-report que j’écris sur un site concurrent et néanmoins ami (du moins je l’espère) !
Dans tous les cas, tes écrits rendent bien compte de la « nouvelle » direction prise avec ce magnifique dernier album.