Marillion – Less Is More

Less is more
Marillion
2009
Intact records

Marillion – Less Is More

Depuis ces derniers mois, les cinq musiciens de Marillion ont publié régulièrement sur leur site un journal vidéo suivant pas à pas la genèse de leur nouveau projet : la réalisation d’un album de reprises issues de leur propre répertoire. « Less Is More », disque entièrement acoustique ou presque, est aujourd’hui fin prêt et disponible. Rien de bien neuf ni de très original dans cette démarche me direz-vous, mais pourtant, cette sélection de morceaux datant des dix dernières années du groupe crée la surprise, quand elle ne touche pas tout simplement au sublime. Marillion nous avait annoncé ces versions comme des quasi nouvelles chansons, et c’est presque finalement le cas, tant les titres ont été radicalement revisités au niveau des arrangements, du choix des sonorités, des changements de tons, de rythmes ou d’atmosphères. C’est Go !, l’un des tous meilleurs titres du fort bancal mais bien produit « Marillion.com » qui ouvre l’album. Petite pulsation de glockenspiel, notes de guitare classique, ensemble de cordes et voix enchanteresse de Steve Hogarth, on se croirait presque arrivé au pays des fées. L’ambiance si particulière du minimaliste et extraordinaire « Kuur«  des islandaises Amiina, cousines et complices de Sigur Ros, n’est pas bien loin ! « Interior Lulu », passionnant morceau à tiroirs issu du même « Marillion.com », poursuit dans une veine proche, réalisé avec le même genre d’instrumentarium, dulcimer, piano et orgue hammond en renfort. L’enchainement des chefs d’œuvres continue avec le classique et très émotionnel « Out of this world » (sûrement mon titre préféré du groupe !) qui ne perd rien de sa puissance ni de sa splendeur sans les envolées mélodiques et saturées du guitariste Steve Rothery et les nappes atmosphériques immenses signées Mark Kelly. D’autres titres, s’ils n’atteignent pas la magie des trois précédents, n’en demeurent pas moins brillants, à commencer par « The Space », cuisiné ici à l’aide d’une sauce jazz/blues assez surprenante mais délicieuse pour les papilles auditives, le heavy-fm « Hard As Love » se transformant miraculeusement en une jolie ballade façon Beatles, ou encore « Quartz » qui perd son énorme groove au profit d’arrangements tout à fait étranges et déroutants lors d’une première écoute !  On retiendra également « This Is The 21st Century » qui, dénué de sonorités trip-hop/électro et transposé à une octave supérieure, change radicalement d’ambiance mais reste tout aussi intense et bouleversant. « Memory Of Water » et « It’s not your fault », nouvelle composition des cinq d’Aylesbury et seul véritable inédit de l’album, resteront davantage anecdotiques dans leur traitement, même s’il s’agit par ailleurs d’excellentes chansons. Quand à l’agaçant « If My Heart Were A Ball », il s’agit à mon sens de la seule faute de goût de « Less Is More », à commencer par sa présence au menu, Mais bon, il faut savoir aussi que j’ai toujours détesté cette compo, alors que d’autres jubileront peut-être  ! Enfin, signalons la présence d’un morceau caché (quelle habitude un peu débile !) qui n’est autre que l’impopulaire « Cannibal Surf Babe », sorte de clin d’œil déjanté aux Beach Boys, plutôt fun en version acoustique avec son rythme entrainant et sa petite touche finale sympa à l’harmonica. « Less Is More » aurait pu être d’une grande banalité vu son concept de base, mais fort heureusement il n’en est rien. Ce serait sans compter en effet sur l’énorme potentiel créatif des gars de Marillion et leur indéniable aptitude à se renouveler constamment, ce malgré l’étiquette injustifiée de groupe has-been qui leur colle à la peau depuis les années 80 et le « renouveau » du rock progressif. Le club des cinq s’est forgé avec le temps une formidable maîtrise instrumentale et vocale qui, espérons-le, continuera de nous surprendre dans les années à venir. « Less Is More » prouve en attendant leur capacité de dénuder jusqu’à l’essentiel des compositions souvent épiques sans en atténuer la sensibilité à fleur de peau. Avec ou sans électricité, le feeling de Marillion prend aux tripes et la magie opère, encore et toujours. Une nouvelle oeuvre à part entière, à consommer sans modération !

Philippe Vallin (8,5/10)

 

 

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