Live report Emily Jane White à La Cave d’Argenteuil le 5 mars 2024

Live report Emily Jane White à La Cave d’Argenteuil le 5 mars 2024
Emily Jane White
2024
Lucas Biela

Live report – Emily Jane White à La Cave d’Argenteuil le 5 mars 2024

Live report Emily Jane White

Alerté par la page Facebook de La Cave d’Argenteuil du passage d’Emily Jane White, je me rappelle avoir vu ce nom dans les colonnes de Clair & Obscur. C’est Jean-Michel Calvez qui en avait parlé, et connaissant ses goûts, je savais que l’univers de la Californienne conforterait mes oreilles. Effectivement, loin du soleil de son domicile, j’y trouve une mélancolie proche de celle de Marissa Nadler (une de mes plus grandes découvertes du mitan des années 2000). Le 5 mars 2024, c’est à La Cave d’Argenteuil que la chanteuse a donné rendez-vous aux Franciliens. C’est déjà la cinquième date de sa tournée européenne, qui ne passe cependant que par la France. A ce sujet, j’apprends de la belle qu’elle a déjà tourné dans le passé en Allemagne, aux Pays-Bas et en Suisse, mais que c’est en France qu’elle revient le plus souvent, puisque son public y est le plus nombreux. Pour cette soirée dans la cave dimière, on pourra admirer non seulement les magnifiques compartiments voûtés, mais également la superbe prestation d’Emily et de son partenaire, Francesco Echo. Exit les arrangements des derniers albums, le concert se veut intimiste, même s’il passe en revue des morceaux de l’ensemble de sa carrière. La voix d’Emily porte en elle cette affection que l’on retrouve dans la voix d’une mère chantant une berceuse à son enfant. Elle nous garde cependant en éveil par ses modulations et son timbre à la fois lamenté et grave, comme venu du plus profond de son âme. Voilà, avec les mots « grave » et « lamenté », l’ambiance est posée : ce sera une soirée placée sous le signe de la mélancolie. Il faut dire que les thèmes que traite l’Américaine (je vous renvoie aux chroniques de Jean-Michel Calvez) ne prêtent guère à sourire. Et c’est tant mieux, car ce style introspectif nous place dans une relation affectueuse (on en revient à la mère chantant à son enfant), avec des mots qui nous sont glissés avec douceur à l’oreille.

Live report Emily Jane White Band 1

Emily sera tantôt debout avec sa guitare, tantôt assise devant son clavier. Dans les deux cas, les notes qu’elle jouera avec son instrument feront rentrer les chansons dans un cadre rythmique, là où les notes sortant de la guitare de son compagnon s’étireront pour faire sortir les chansons de leur cadre. Je m’explique. Avec ses pédales, Francesco permet à son jeu de faire durer les notes (pensez à l’infinite guitar de Michael Brook), plaçant les chansons dans un cadre plus large (il est toujours là le cadre mais il est plus grand). D’un côté, le jeu rapide et cyclique d’Emily corsète les notes, de l’autre celui allongé et plus diffus de Francesco les libère. Beau contraste entre les deux compères qui permet de faire co-exister l’introversion et l’extraversion. Contraste que l’on retrouve également entre d’un côté les motifs répétés à la guitare de la vedette de la soirée, et de l’autre un chant où les mots se déroulent lentement et se voient prolongés par des harmonies de toute beauté. On notera par ailleurs que dans la voix d’Emily, ce sont les notes basses qui ressortent le plus souvent. Quand elle s’aventure sur un terrain plus aigu, les graves viennent vite reprendre le dessus. Ces notes donnent une consonance mélancolique à ses chansons, pour un univers qui parle à nos âmes endolories par les difficultés que l’on rencontre dans la vie et dans le monde qui nous entoure.

Live report Emily Jane White Band 2

Le cadre architectural gothique qui porte cette voix ce soir se prête tout particulièrement à l’univers gothique de la compositrice – gothique par la noirceur et le spleen romantique que l’on pouvait retrouver chez Emily Brontë. Je parlais des instruments de l’autre Emily pour évoquer leur côté rythmique. Mais quand la musicienne passe de la guitare aux claviers, on ne peut s’empêcher de noter que ses doigts préfèrent appuyer sur les touches de la gamme des graves plutôt que de la gamme des aigus. On retrouve là cette propension à s’enfermer dans un cocon où une âme trouve le réconfort en partageant ses peines et ses douleurs. A ce propos, un des moments forts de la soirée vient quand une version ralentie (Emily dira « slowed down ») et épurée (seule sa voix accompagnera la guitare de son comparse) d’un morceau aux arrangements plus complets nous marquera par la noirceur et la clarté qui s’y mêlent.

La voix d’Emily Jane White ayant trouvé écho en France, nous avons la chance d’y croiser sa route souvent. N’hésitez donc pas à vous déplacer pour vous plonger dans son univers à la fois sombre et chatoyant. Et entre-temps, vous pourrez également savourer sa production au casque : elle est assez conséquente et tout aussi riche.

https://www.facebook.com/emilyjane.white.9

 

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