Kode – Discrete Transformation
Division Records
2019
Christophe Gigon
Kode – Discrete Transformation
Produit par Julien Fehlmann (Unfold, The Ocean, Dirge, Coilguns, Kehlvin), Discrete Transformation est le premier album des Suisses romands de Kode, deux ans après la parution de leur E.P. Random Zero. Il s’agit de rock alternatif plutôt noisy, affublé de basses vrombissantes et dirigé par une voix féminine lancinante et présente. Le clip de leur single « Heloïse », réalisé par la Chaux-de-Fonnière Camille de Pietro – à la renommée montante –, vaut le coup d’œil et permet de situer assez vite les ambitions esthétiques de cette jeune formation lausannoise. On ne va pas crier « à l’originalité » à l’écoute des dix titres de ce disque tant le tout semble homogène et décidé. A l’écoute de la troisième piste, « Stars », on pensera à Hole ou même à The Gathering (l’élégance et la grâce de la voix d’Anneke van Giersbergen en moins). Entre ces deux formations, il reste de la place pour citer Foo Fighters ou My Bloody Valentine. Le spectre est donc plutôt large.
Les compositions les plus lentes apparaissent comme les plus réussies : « Small Little Pieces » trace son sillon avec force et douceur. « Let It Go », articulé autour d’une ligne de basse aérienne, dépose un climat « à la Morcheeba » et crée une bande-son idéale pour un hypothétique long-métrage en noir et blanc, qui serait tourné dans une zone industrielle de la banlieue de Manchester. La basse grondante et pénétrante semble constituer l’ossature principale de ces compositions lourdes et légères, éthérées mais robustes. Une sorte de trip hop sous stéroïde qui dévoilerait son pouvoir de séduction à force d’écoutes répétées.
Par moments, la voix de Saskia Fuertes s’essaie à davantage de variations et peut faire ainsi penser à une autre grande artiste suisse : Olivia Pedroli, auteure du sublime The Den, paru en 2011. Avec « On Your Side », les racines plus « garage » du trio se font sentir et la brièveté-même du morceau constitue tout un programme : moins de deux minutes au compteur ! « Fire » est du même baril. Contrairement à « Water » qui sait développer une ambiance étrange et plutôt bienvenue après ces quelques minutes de rock basique. Discrete Transformation finit avec cinq minutes de musique plus aventureuse même si on n’oserait pas parler de rock progressif. Cependant, par moments, on n’est pas si loin d’un Steven Wilson. Il s’agit d’un compliment, naturellement.
Une galette équilibrée, maîtrisée et posée mais qui ne révèle pas un talent inattendu ni même inentendu. Kode maîtrise les codes du genre musical dans lequel il a choisi d’évoluer. Mais, sans évolution notable, la formation vaudoise risque de se perdre dans les brumes de cette musique qui ne parvient jamais vraiment à se différencier de la masse produite depuis le début des années quatre-vingt-dix. Une transformation moins discrète est attendue.
https://followthekode.bandcamp.com/album/discrete-transformation