Devin Townsend – Lightwork

Lightwork
Devin Townsend
Inside Out Music
2023
Fred Natuzzi

Devin Townsend – Lightwork

Devin Townsend Lightwork

Empath, le précédent effort de notre Canadien préféré, avait laissé un goût étrange. En effet, on savait Devin Townsend enclin à proposer des choses limites grotesques pour en extraire toute la substance folle et les amener vers le génie, comme Ziltoid. Empath, qui sortait après la dissolution du Devin Townsend Project, montrait un créateur en roue libre, allant de l’ambient au metal en passant par des récréations dignes de Disney. Où voulait-il en venir ? Cette question perdurait tout au long du disque. Même la tournée qui avait suivi n’allait pas au bout de cette folie. Album de transition donc où Devin se cherchait. Puis vint les périodes de confinement qui abrégèrent et reportèrent la tournée. Deux lives furent mis sur le marché, tous deux très bons. Il y eut ensuite The Puzzle (collage de sons) et Snuggles (ambient) en 2021 pour faire patienter jusqu’au nouveau disque. 2023 marque ainsi la sortie de Lightwork. Déjà la pochette fait peur: un phare sur fond très clair et une espèce de pieuvre. On annonce aussi « l’album le plus accessible de Devin Townsend ». On se souvient des opus soi-disant les plus accessibles, comme Ki ou Casualty Of Cool, deux albums peu convaincants (pour ma part). Alors attention danger. Eh bien, j’ai été plutôt (pas) surpris, car cet album ressemble… à du Devin. Certes, il y a beaucoup de mélodies claires mais il y en avait énormément dans DTP (à ne pas confondre avec DTC où c’est beaucoup plus obscur).  Devin s’applique, chante avec sa voix magnifique, mais pousse aussi le curseur dans des retranchements connus et appréciés de tous. Lightwork possède quelques morceaux victimes d’Empath, mais ils restent attachants. La recherche sonore est toujours là. Et que dire du second cd, Nightwork, bonus maintenant habituel chez Devin. Il propose certaines chansons qui auraient pu figurer dignement sur le premier. Et puis on retrouve la charmante Anneke Van Giersbergen sur le premier titre. Dès que j’entends sa voix, je me sens tout chose. Sans doute mes souvenirs de jeune adulte l’écoutant et l’admirant, souvent aussi en vrai, en concert, dans The Gathering.

« Moonpeople » prépare le voyage en avançant avec des sons électroniques sur une gentillette mélodie. Comme d’habitude, l’univers sonore est riche malgré l’apparente simplicité qui se dégage du titre. Progressivement, la batterie et la guitare électrique s’invitent dans le paysage et finalement, « Moonpeople » est attachant. Tout ça avant l’intro symphonique (peut-être que c’est un poil trop déjà Devin, non ?) de « Lightworker » qui se calme tout de suite. Là aussi, simplicité de la mélodie et lancement en orbite de la voix de Devin, en majesté, pour redescendre très vite. Les séquelles d’Empath se sentent, mais exploitées plus habilement. Le refrain est imparable et la folie guette. Devin hurle et c’est tant mieux. On avait peur de l’extinction de voix, il n’en est rien. Quelques gazouillis d’oiseaux plus loin et « Equinox » prend le relais. Mélodie de haute volée pour ce titre avec un Devin qui se prendrait pour un chanteur de ritournelles soft FM années 80. Le thème musical d’intro et central est merveilleux. Et finalement, on se dit, c’est bien aussi quand Devin hurle ses paroles tout en restant mélodique. Devin pourrait choisir, mais Devin est comme Chuck Norris, rien ne lui résiste. « Call Of The Void », c’est ce qu’entendent beaucoup de musiciens en général (« l’appel du vide ») mais pas Devin. Même ses morceaux les plus faibles contiennent assez de musique pour remplir l’espace sonore d’une barre de son Nakamichi Dragon !

Devin Townsend Lightwork Band 1

« Heartbreaker » n’a rien avoir avec Led Zeppelin et m’emmène voir ailleurs si j’y suis. Mauvaise nouvelle, je n’y suis pas. Enfin j’arrive un peu en retard. Bah oui, faut pas m’en vouloir, j’ai eu du mal à m’habituer à mon environnement. Finalement, je suis curieux et je finis par contempler les décors délirants du titre, comme si j’étais dans Charlie Et La Chocolaterie. Willy Wonka est chauve ? Ben merde alors ! « Dimensions » m’embarque un peu mieux dans son metal électronique et progressif avec sa voix maîtrisée dans tous les styles. Ça dure un peu trop quand même. « Celestial Signals » possède une mélodie plus conventionnelle avec des guitares 80’s (mais qu’est-ce qui arrive à notre bon vieux Dev ?). Il n’empêche, le titre fait du bien, surtout que Devin s’époumone bien et c’est efficace. Du coup, le 45 tours de « The Final Countdown » des chevelus d’Europe restera bien au chaud, serré avec les autres dans son carton. Tiens, parait qu’ils reviennent (encore) ceux-là. Bon c’est une autre histoire… « Heavy Burden » enchaîne un patchwork metal et électronique aux voix féminines sympathiques, mais le titre est un foutoir. Où est le cucul où est la têtête comme dirait l’autre. On attend que ça passe et on part en « Vacation », guitare acoustique à l’appui. C’est léger, c’est plus simple, pas folichon pour autant, mais ça montre un Devin plus sage, avec une batterie stéréotypée et qui prend trop d’espace. Dommage j’étais à deux doigts de craquer. « Children Of God » et ses dix minutes finalisent l’opus. Avec Devin il peut s’en passer des choses en dix minutes. D’abord, il y a l’armée qui débarque. Ah oui, moi, j’entends les hélicos d’Apocalypse Now et les guerriers à cheval du Seigneur Des Anneaux. Oui bah moi aussi, je peux partir dans mes délires, Devin n’en a pas l’apanage ! (si tu ne sais pas ce que ça veut dire, cherche sur Google). Grosse ampleur lyrique musicale sur une mélodie toute simple. Encore la magie de Devin qui transforme tout en un gigantesque péplum. Certains trouveront l’ensemble boursouflé, d’autres seront plus enclins à plonger dans cet univers sonore qui reste assez unique quand même.

Mettons vite le second cd pour trouver un titre que personnellement, j’aurais inclus sur le disque principal. « Starchasm Part 2» avec la belle Anneke ! Mmmmmm…. Bah voilà du Devin comme j’aime (ta gueule Castaldi). Sa double grosse caisse, ses coups de tatane dans la gueule, ses riffs de guitares tranchants, cette voix énorme et Anneke… Mmmmmm… Bon, il passera en boucle celui-là. Le début de Nightwork fait donc du bruit, mais reste bien délirant quand même, notamment avec « Factions » et sa grande intensité sonore. J’adhère, ça fait du bien ! Et en sus (non ne t’affole pas), un beau solo de guitare.  Mmmmmm… On n’aura pas mieux sur le reste des morceaux. Allez, je signale la suite de « Children Of God » intitulée « Children Of Dog ». Oui, il a osé. Mais c’est plutôt intéressant. Alors oui, Devin c’est un charcutier qui vous dit « y en a un peu plus, j’vous l’met quand même ? » et qui n’attend pas la réponse pour vous imposer le surplus. Résultat, un second cd avec des titres dispensables. Mais comme bonus, ça se pose là quand même.

Devin Townsend Lightwork Band 2

Avec Lightwork et son cousin Nightwork, Devin Townsend continue de laisser libre cours à sa folie créatrice. Sous l’estampille « disque le plus accessible de Devin », il faut lire en fait « mélodies accessibles ». Car pour tout auditeur non averti, les baffes pleuvent et risquent d’assommer les moins téméraires. Lightwork est certes moins fou qu’Empath mais c’est quand même bien barré. Saluons l’inépuisable manne créatrice de Devin Townsend et vive Anneke !

https://hevydevy.com/

Et pour la forme…

 

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