Dax Riggs – 7 Songs For Spiders
Fat Possum Records
2025
Lucas Biela
Dax Riggs – 7 Songs For Spiders
Je vous l’avais annoncé dans une brève l’année dernière, Dax Riggs sort en 2025 un nouvel album solo après 15 ans de silence. Celui qui a fait parler de lui dans les années 90 avec Acid Bath n’a pourtant pas chômé après la dissolution de ce groupe-phare de la scène sludge metal. On l’a en effet vu avec des formations comme Deadboy & the Elephantmen et Agents Of Oblivion, puis en solo. Mais le temps passait depuis son dernier album, et il était légitime de se demander si l’inspiration autrefois si abondante du talentueux chanteur / guitariste / compositeur ne s’était pas tarie. Et le voilà maintenant avec un troisième album solo, en plus de reprendre du service sur les planches avec son groupe des débuts.
En solo, la musique de notre Lafayettien s’est affranchie des vociférations présentes dans Acid Bath, pour mieux mettre en valeur une voix claire que la profondeur et la douleur pourraient rapprocher de celle du regretté Layne Staley d’Alice In Chains. Sur ce nouvel album, 7 Songs For Spiders, le line-up est encore différent des deux précédents, comme s’il s’agissait de créer un univers toujours unique d’un opus à l’autre. Ici, l’on retrouve des ambiances bien poisseuses, à l’image des marécages du pays cajun, mais également en clin d’œil au sludge d’Acid Bath. Ce sont les guitares dronées, associées au rythme lent, qui donnent cette impression d’embourbement, en plus de suggérer un temps orageux. A la surface de cet océan de douleur, sur lequel le quatuor parvient à naviguer avec dextérité, l’on note cependant des ouvertures optimistes. Prenons l’exemple d’« Even The Stars Fall ». Bravant le bourdonnement inquiétant des guitares et redonnant espoir à la batterie prudente, Dax montre la voie de la lumière dans un chant où l’enthousiasme triomphe du constat amer de la chute des étoiles. De même, avec « Ain’t That Darkness », autour des guitares grinçant des dents et d’un rythme restant sur ses gardes, Dax tente de rassurer dans les échos conciliants de son chant.
Sur « Deceiver », les belles mélodies insufflées par le chant versatile de notre Louisianais libèrent définitivement le morceau de la noirceur dans lequel il était enfermé. Dans « Pagan Moon », ce n’est plus simplement le ton progressivement prévenant de la voix qui fait tourner les yeux vers un ciel dégagé, mais également les belles lignes captivantes des synthétiseurs. « Graveyard Soul », de son côté, est surprenant. Autour des guitares tumultueuses, la batterie s’inscrirait presque dans un schéma de marche funéraire si ses débordements petit à petit chaloupés n’incitaient pas au déhanchement. Assisterait-on ici à une danse macabre ? Sur un morceau comme « Blues For You Know Who » en revanche, l’atmosphère est certes trouble mais la manière tendre avec laquelle elle nous berce nous met d’emblée à l’aise. Tout est bienveillance dans ce titre, depuis les nappes choyantes de guitare et le rythme doux de la batterie jusqu’aux envolées exaltées du chant. Le même effet de bercement peut être observé avec « Sunshine Felt The Darkness Smile », notamment par le biais de ses claviers brumeux et de son petit signal cajolant. Les magnifiques lignes de chant concluant ce morceau sont d’ailleurs gorgées d’une sorte de jubilation mystique.
Vous l’avez compris, de l’apparente obscurité qui enveloppe ce 7 Songs For Spiders jaillissent de nombreux éléments lumineux qui offrent de beaux contrastes tout du long. Tourments et félicité se mêlent et se démêlent dans des tableaux où les sentiments pleuvent. Avec sa voix gorgée d’émotions et son univers si singulier, Dax Riggs sait manier comme personne des langages contraires, et cette nouvelle œuvre ne déroge pas à la règle. Espérons que ce « réveil » augurera d’autres pépites dans un univers proche.