Cross Angel – Interstitium/Alien Intrusion
Autoproduction
2018
Cross Angel – Interstitium/Alien Intrusion
En mars 2015, je vous avais déjà parlé de Michael Sean O’Connor / Cross Angel. C’était à propos de son album Chaosthetic Cosmos. Je vous avais décrit un musicien qui, à force de travail, de talent et de concerts, commençait à émerger au-dessus du lot dans le domaine de l’électro, et que ceci était d’autant plus plaisant que l’intéressé s’était forgé un style bien à lui, mélangeant la puissance du son et du rythme à la texture tantôt délicate tantôt complexe de ses sonorités. Je redirais les mêmes choses dans les mêmes termes aujourd’hui, en y ajoutant un élément essentiel, la générosité. Car à présent, ce n’est pas un album qu’il sort, mais pratiquement deux, disons un album plein à craquer, Interstitium, ainsi qu’un EP bien fourni, Alien Intrusion.
Interstitium est le résultat d’un travail acharné sur les Electribes sur lesquels il joue depuis 2007, année de la première acquisition. Si bien que ce qu’il en sort est véritablement son art très personnel sur ces machines. Selon le compositeur lui-même, le concept d’Interstitium est d’emmener l’auditeur vers différents interstices de la réalité. On part de la Terre avec un hommage à tous les enfants, victimes innocentes de la barbarie humaine.
Tous les morceaux étant enchaînés, on passe d’une réalité à une autre comme si l’on sortait de son corps pour visiter d’autres dimensions. Ainsi, « Liminality », qu’il avait composé la semaine du décès de son père, évoque cette barrière, limite de notre seuil de perception, entre notre monde et l’autre monde. « Liminality » est l’interstice où nous pourrions capter les idées intuitives et, pourquoi pas, communiquer avec l’au-delà. Ce morceau est suivi par « Interstitium », moment véritable de la sortie extracorporelle, où l’on commence donc à quitter notre réalité. Sur cette base d’idée, le corps dématérialisé va être comme aspiré par une porte qui mène directement vers l’île d’« Avalon ». Une fois ressentie la magie de cette île, on va dans ses souterrains pour découvrir la ville « Pandemonium », à la fois scintillante et oppressante, une cité attrayante autant que dangereuse, à l’image du papillon de nuit qui se brûle les ailes et le corps à s’approcher trop près de la lumière. En quittant ce royaume des morts, qui est aussi producteur de vie, car la lave fertilise, l’auditeur est emmené vers une observation de « l’Univers Global », d’où le terme « Magnus » pour illustrer le côté majestueux du Cosmos. Au sein de ce cosmos, les vies renaissent de l’infiniment petit, d’où « Risen » suivi par « The Next World », sorte d’atelier cosmique de fabrication de particules, d’ADN et de molécules complexes. « Starlight Wavicles » finalise l’album. C’est la renaissance des étoiles et donc de la vie. Ensuite le cycle peut continuer en repartant d’une nouvelle Terre. Une odyssée grandiose de 1 heure 17 minutes.
Quant à l’EP Alien Intrusion, toujours selon les termes mêmes du compositeur, c’est une critique sociale imagée de manière paranormale. L’ordre des morceaux a été pensé de la manière suivante : « 1- Black Out », « 2- Liberation », « 3- Psychic Intrusion », « 4- Medusa », « 5- Battle Fields » et « 6- Idyll ». « Black Out », c’est l’arrivée des extra-terrestres, provoquant des coupures de courant et déformant l’espace-temps autour d’eux. « Black Out », c’est le symbole de la technologie, des réseaux électriques et de la puissance des véhicules spatiaux. « Liberation », c’est l’émerveillement des gens devant une race supérieure et évoluée technologiquement. Ils les pensent comme des sauveurs, des êtres évolués qui vont apporter des solutions à leurs difficultés d’humain. C’est donc le moment des abductions, la sensation d’être un heureux élu prêt à découvrir la vérité et à parcourir ce chemin de l’espoir. « Psychic Intrusion », c’est la réalité qui broie tous les espoirs, car les abductés vont subir des expériences violentes, se sentant donc totalement rejetés, abusés et au final broyés psychologiquement. Et le compositeur de préciser : « Le parallélisme avec ce que vivent beaucoup de citoyens du monde est évident, nul besoin de vous le conter. » Cet EP dénonce donc, pour lui, l’attitude arrogante de nos sociétés, dites évoluées sur le plan technologique et économique, qui promettent beaucoup et à tous, mais ne tiennent que si mal leurs promesses.
Rappelons, même si c’est la musique qui compte avant tout, que Michael Sean O’Connor / Cross Angel a réalisé tout ceci sur des petites machines, des Korg Electribe EMX-1, ESX-1 et Electribe 2. Du gros boulot, patient, minutieux, mais au final impressionnant. Chapeau l’artiste !
Frédéric Gerchambeau
http://www.zicmeup.com/groupe/crossangel/bio
C’est une belle description de son travail, merci pour cet article. Effectivement quand je l’écoute je me projette immédiatement dans des scenarii de films à sensations. Je trouve que son style épouserait à merveille le cinéma sci-fi ou les grands documentaires! Ou accompagné à merveille les longs trajets en voyage…
Merci beaucoup pour cette chronique ainsi que les compliments, très encourageant, qui nous donnent la force de perseverer.
Pour obtenir l’album il faut aller sur bandcamp. Voici le lien : https://crossangel.bandcamp.com/merch
Musicalement.
MichaelSean.
Quel bel article définissant parfaitement cet album ! Inspiration, créativité, minutie le caractérise en effet, aucun détail n’est laissé au hasard, tout est réfléchi, pour le plaisir de nos oreilles !
Superbe musique qui vous emmènera dans un nouvel univers. Envoutement garanti.