Ulver – The Norwegian National Opera

he Norwegian National Opera
Ulver
2011
Kscope

Ulver – The Norwegian National Opera

Ulver n’a jamais été un groupe de spectacle. En l’espace de plus de quinze ans, les Norvégiens ne sont jamais montés sur scène (allez, une fois en 1993 !), n’ont donné aucun concert, se concentrant principalement sur leurs efforts studios. À vrai dire, on n’a jamais ressenti le « besoin » de voir Ulver en live, chaque album étant un univers en soi, un film personnel, un fragment aléatoire et impénétrable, pouvant prendre ses distances d’un disque à l’autre. Difficile dès lors d’imaginer une unité d’ensemble durant plus d’une heure, sans compter l’infrastructure démente nécessitée. Pourtant, depuis 2009, Ulver est devenu une entité de scène, un spectacle rodé aux petits oignons, avec projection vidéo, artifices théâtraux, éclairage travaillé dont l’intensité lumineuse et la colorimétrie varient en fonction de l’album et de l’émotion. Bref, sachant que sa discographie possède de nombreux visages (on gicle volontairement la période black metal) et plus encore de grimaces, il faut bien un contrepoint visuel qui claque, histoire d’avoir une ligne directrice plus ou moins tenue.

Passé trois années sur les routes et les salles de prestige, peu de temps après la sortie de « l’erreur », le bien trop propret « War Of The Roses« , Ulver annonce la sortie DVD et Blu-ray d’une soirée enregistrée à Oslo à l’Opéra National. Fans surchauffés, prévente explosée, trailer youtubé et youpi ! Inutile de vous dire que l’image frôle la perfection. Bien sûr, le son, clair et puissant, copule avec des basses et une reverb qui frottent. Mais, plus encore, il est intéressant d’écouter d’une part sur disque ce best-of de dix ans de carrière et, d’autre part, d’être captivé par le visuel (montage soigné, lumière enivrante).

Autant être clair, le groupe a sorti le grand jeu : dix musiciens, des tonnes de claviers, la participation de Christian Fennesz et de sa guitare, un lieu prestigieux entre grandiloquence et intimité. Et, y’a pas à dire, c’est fort, esprit bobo sur les bords mais avec une atmosphère prenante indéniable. Piano léger et mélancolique, Garm manifestement en forme et pas trop intimidé, passage ambient de toute beauté alors que s’enchaînent les meilleurs moments de « Shadows Of The Sun », « Perdition City » ou « Blood Inside ».

On aura même droit à des extraits des travaux les plus aventureux de « Teaching In Silence » ou de « Marriage Of Heaven & Hell » (bien que celui-ci ait beaucoup perdu de sa superbe avec le temps). On pourra toujours rétorquer qu’on passe du coq (au vin) à l’âne (en saucisson) sans réel temps mort, le groupe étant peu communicatif. Néanmoins, on retrouve (enfin) ce côté mystérieusement suave et sensuel, et certains titres revêtent de beaux atours surréalistes (« A Cold Kiss », « Hall Of Hallways », « Little Blue Bird », entre autres). Le groupe achève son show sur le spectral « Not Saved », suivi de « The Leg Cutting Piece », magique à souhait, tout en douceur mélancolique, une pièce qui donne juste envie de fermer les yeux.

« The Norwegian National Opera » permet à la fois de survoler dix ans de carrière au service d’une musique qui change de peau à sa convenance, mais aussi d’apporter une lumière, certes blafarde et diffuse, aux néophytes du groupe (un cauchemar pour les fondus d’étiquettes musicales). Bizarrement, un disque qui revient souvent les soirs de grande chaleur, et un DVD classe qui fait bien pour épater ses amis blasés. Ulver quoi !

Jérémy Urbain (7,5/10)

http://www.jester-records.com/ulver/

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