Alex’s Hand – Alex’s Hand Presents : The Roaches
Alex's Hand
Autoproduction
Alex’s Hand est une formation américaine, mais basée à Berlin, qui incorpore de nombreux styles pour créer un univers défiant toute description. Ce type de rencontres étant rare, il est intéressant de se pencher sur leur dernière production en date. Entre sérénité et tourments, les notes qui se déroulent expriment les vicissitudes de l’âme. Les instruments qui les soutiennent n’en sont d’ailleurs pas moins versatiles. Plus que l’impression d’un grand boeuf, c’est la spontanéité du jeu et la diversité du répertoire présenté que l’on retient. Ainsi, quand le bipolaire « Pirate Jazz » fait succéder des voix tour à tour éthérées, anxieuses et autoritaires, c’est l’univers fantaisiste de Frank Zappa que l’on retrouve dans l’histoire qui nous est narrée de manière solennelle sur le rythmé « Cop ». De même, là où une valse menaçante établit ses quartiers (« Pirate Jazz »), c’est une polyphonie bienveillante de l’Ars Subtilior qui s’invite (« Pools »). Ainsi, par une grande variété dans les voix et les ambiances musicales, ce sont de nombreuses humeurs, styles et époques qui se télescopent dans la galaxie Alex’s Hand.
Loin de déconcerter, et tel un aventurier qui n’est jamais au bout de ses surprises, ce patchwork fascine par son côté imprévisible et un hétéroclisme qui nous fait voyager dans des terres toutes plus diverses les unes que les autres. Avec ses longues plages à tiroir, introduites par des dialogues truculents, des extraits d’émissions de radio ou des narrations, « Alex’s Hand Presents: The Roaches » pourrait en fait être la bande-son parfaite d’un pulp haut en couleurs porté à l’écran (revoir à ce titre le film de référence « Pulp Fiction »). C’était d’ailleurs probablement l’objectif de nos lascars, tant le propos débridé où se croisent des constructions musicales aussi riches en rebondissement que des tranches de vie mouvementées se rapproche de l’univers fantasque de ces magazines.
Avec décalage et éclectisme, Alex’s Hand créent un univers bien singulier. Certes, le jazz en est le fil conducteur, mais à la manière de Frank Zappa ou Mr Bungle, ils ont su s’affranchir de toute étiquette pour exprimer autant de sensibilités musicales qu’ils le souhaitaient, sans cependant tomber dans le piège du gavage émétique.
Lucas Biela (10/10)