Voyager – Fearless In Love

Fearless In Love
Voyager
Season Of Mist
2023
Palabras De Oro

Voyager – Fearless In Love

Voyager Fearless In Love

La Scandinavie, le Canada, mais également l’Australie se sont imposés depuis un bon moment comme étant des terres hautement créatrices de prog. Voyager (rien à voir avec l’album de Vangelis) est presque un nouveau venu dans ce genre. Presque, car le groupe a quand-même 24 ans d’existence et Fearless In Love est leur huitième album. Par contre, celui-ci marque une évolution de leur rock metal popisant (le quintette de Perth a défendu les couleurs australiennes lors de l’Eurovision 2023 avec le single « Promise » terminant à une honorable neuvième place) vers une musique hybride incorporant désormais certains schémas progressifs. Ceci est certainement dû aux tournées réalisées en compagnie de groupes comme Leprous, Devin Townsend et Opeth. L’idée était de conserver leurs racines tout en explorant d’autres territoires afin de plaire aux fans de musique complexe ainsi qu’à tous ceux qui voudraient banger directement, un melting-pot particulièrement bien réussi. Il en résulte un album où mélodies sucrées, rythmiques syncopées et metal forment un redoutable alliage avec, comme recette, une opposition bien dosée entre, d’une part, le chant très clair et mélodieux ainsi que les claviers évanescents et 80’s de Daniel Estrin, et d’autre part, des guitares (Simone Dow et Scott Kay), une basse ( Alex Canion) et des percussions (Ashley Doodkorte) assassines.
Quand je lis dans leur bio la citation de Dany « Lorsque vous écoutez Fearless In Love, j’aimerais beaucoup que vous disiez : « Je n’ai jamais entendu quelque chose comme ça auparavant » et que tous les musiciens ont enregistré en direct, j’avoue être assez incrédule. En particulier, l’ombre de Leprous (le groupe qui n’en finit pas de monter et qui a laissé sur le cul l’assemblée du Night Of The Prog cet été) et parfois de Tool plane beaucoup sur les compos notamment sur les riffs et breaks de guitares. Pourtant, je salue la remarquable production de l’opus assurée par Matt Templeman tellement classieuse et propre que j’ai du mal à croire à des enregistrements du band en direct. Quoi qu’il en soit, on s’en fiche un peu tellement le résultat est à proprement parler bluffant. Nous avons droit à onze titres d’un format plutôt ramassé tout le long desquels les changements d’ambiances sont constants, comme sur le fameux « Promise » dont les trois minutes semblent durer bien plus longtemps du fait de changements de rythmes, de percussions syncopées, de growls en contrepoint. Étonnant qu’il ait été si bien reçu à l’Eurovision !

Voyager Fearless In Love band 1
Fearless In Love n’est pas un concept bien qu’il nous emmène dans un voyage sociétal pour nous confronter à notre société empreinte de folie et d’incohérences. Musicalement, les intros des plages sont presque systématiquement réalisées avec des séquences de claviers façon 80’s sur lesquelles Dany pose très tôt sa voix très claire et, semble t-il, très légèrement auto-tunée. Les grosses guitares apparaissent dans un second temps et font enfler démesurément les titres. Ensuite, les changements d’ambiances pop metal et prog sont multiples sur de courtes durées ce qui lui donne une dynamique assez exceptionnelle. En particulier, les trois premiers titres sont épatants. « The Best Intentions » donne le ton en ce domaine alors que « Prince Of Fire » joue encore plus sur les côtés alternatifs et… clair et obscur (décidément, cette musique méritait complètement d’être chroniquée dans nos colonnes). Avec le dansant et sympathique « Dreamer », on a droit au morceau le plus dans l’esprit pop Leprousien sans pompage aucun. Pourtant, cette fructueuse entrée en matière n’est rien à côté de l’étonnant « Ultraviolet » sur lequel je kiffe grave le chant et les séquences de synthés hypnotiques de Dany me rappelant un peu le Kino des débuts. L’enflement du titre préfigurant l’apparition de quelques growls en alter-ego et un solo de guitare en fading taillent ce diamant brut en un joyau brillant de mille feux. J’ai déjà cité « Dreamer » qui annonce une propension plus pop dans la progression de l’album, précédant l’ambivalent « The Lamenting » aux couplets pops, mais aux refrains hyper mélancoliques et tristes à la Bruce Soord (The Pineapple Thief). « Promise » (Eurovision oblige), « Twisted » et « Daydream » démontrent la capacité du groupe à marier judicieusement cette pop au metal. « Submarine » sonne beaucoup plus heavy proposant de furieux soli de claviers et de guitare alors que « Listen » présente un long pont progressif comportant, lui aussi, un joli solo de guitare. Voyager termine son effort par l’unique ballade « Gren (Fearless in Love) » aux lignes de chant bien travaillées lui permettant de franchir aisément l’écueil de la ballade heavy classique et chiante que son thème, « l’amour fait mal, mais il ne faut pas en avoir peur », aurait pu inciter à adopter.

Voyager Fearless In Love band 2
Ainsi, Voyager n’est pas arrivé aux confins de l’espace et ne m’a pas convaincu du fait qu’il crée une musique « jamais entendue auparavant ». Il n’empêche que cette orientation progressive adoptée par le groupe donne un sacré caractère à Fearless In Love dont les influences ne sont, fort heureusement, pas omniprésentes. Se pourrait-il qu’ils deviennent l’un des porte-drapeaux de ce genre hybride metal pop prog qui pourrait constituer l’avenir de la reconnaissance (renaissance ?) du prog dans les medias en compagnie de groupes comme Leprous ou The Pineapple Thief ? Ceux-ci ne renient jamais la complexité prog de leurs compositions tout en réussissant à faire avaler la pilule enrobée d’excipient pop à une « fanbase » beaucoup plus « mainstream » que précédemment (souvent à grand renforts de ho, ho, ho…) Ont-ils même pris une longueur d’avance sur ces groupes avec leur participation toute sauf ridicule à l’Eurovision ? L’avenir nous le dira… peut-être, quand nos chers médias se seront lassés de la pauvreté pop actuelle et seront pris de cours par la contamination covidienne que pourrait générer la fanbase précitée, eux qui ont rebaptisé le prog en art pop, ce qui, à mon sens, constitue un premier pas. En tout cas, il ne faudra rater sous aucun prétexte l’unique show français de Voyager à Paris le 15 octobre prochain dans la salle « Les Étoiles ».

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