Van Morrison – What’s It Gonna Take ?
Exile Productions
2022
Thierry Folcher
Van Morrison – What’s It Gonna Take ?
Il y a des voix éternelles qui vous marquent à jamais. Celle de Van Morrison en fait partie au même titre que Roy Orbison, Bob Dylan, Neil Young, Randy Newman et beaucoup d’autres. Mais à l’inverse des artistes susnommés, Van Morrison n’est pas Nord-Américain même si la méprise est compréhensible tellement sa musique est remplie de soul, de blues, de gospel ou de folk qui fleurent bon les vibrations outre-atlantiques. Van Morrison est né à Belfast en 1945 et sa carrière s’étale maintenant sur plus d’un demi-siècle (ça me fait tout drôle d’écrire ça) avec une immense discographie où ses deux premiers enregistrements Astral Weeks (1968) et Moondance (1970) sont considérés aujourd’hui comme d’incontournables classiques du rock (tous deux classés dans la liste des 500 plus grands albums de tous les temps selon le magazine Rolling Stone). L’actualité de Van Morrison, c’est What’s It Gonna Take ?, un nouvel opus que les fans vont s’empresser de décortiquer et d’ajouter à leurs favoris du moment. Mais si vous êtes moins familiers du bonhomme et que vous voulez réviser vos fondamentaux, vous pouvez plonger tête première dans plus de quarante albums, aux saveurs inégales certes, mais toujours dominés par cette voix claire, puissante et bourrée de feeling. Il y en a pour tous les goûts. Ça jazze, ça swingue, ça se la joue R&B, rock’n’roll, doo-wop, country ou rock celtique. Toute la palette y passe, mais en gardant la même façon de travailler et le même sérieux quel que soit le style. Il ne faut pas oublier que Van Morrison fait partie des plus grands professionnels de la musique populaire encore en activité. Je suis loin d’avoir tout écouté de George Ivan (son vrai prénom), mais en plus des deux chefs-d’œuvre cités plus haut, filez tout droit vers Tupelo Honey (1971), Veedon Fleece (1974), Into The Music (1979) ou pourquoi pas vers le Best Of Van Morrison (1990) qui couvre ses 25 premières années de carrière et qui reste aujourd’hui sa meilleure vente.
What’s It Gonna Take ? est annoncé comme la suite du consistant Latest Record Project, Volume 1 sorti l’année dernière et dont les vingt-huit titres furent diversement, pour ne pas dire fraîchement, accueillis. À 75 ans passés, « Van the Man » continue de porter un regard acéré sur nos dérives sociétales et ne se cache pas pour le dire, quitte à gêner certains soi-disant bien-pensants. Que voulez-vous, lorsqu’on pond des titres comme « Where Have All The Rebels Gone » (où sont passés tous les rebelles) ou « They Own The Media » (ils possèdent les médias) et que l’on affiche son soutien à Eric Clapton en lui écrivant un « Stand And Deliver » sans équivoque, il faut s’attendre à faire grincer des dents. Anyway ! Comme on dit là-bas, on ne changera pas le monde ni la nature humaine. Par contre, côté musique, on retrouve sur ce disque un savoir-faire et une pêche absolument incontestables. Alors, tous ceux qui comme moi ont écouté et aimé Latest Record Project, Volume 1 ne demandaient pas mieux que de prolonger la fête avec What’s It Gonna Take ? et ses quinze nouvelles compositions. Et pourtant, on baigne dans l’archiconnu, dans des schémas presque éculés mais rien n’y fait, on en redemande tellement c’est beau et envoûtant. La production soignée de Van Morrison y est pour beaucoup, c’est certain. Tout se détache, se place au bon endroit et l’équilibre des voix frôle par moments la perfection. L’enregistrement s’est partagé entre Box (les Real World Studios de Peter Gabriel ) et divers lieux de Bath et de Cardiff. Et puis, les ingrédients principaux sont tous reconduits à savoir un casting first class, des compos classiques mais efficaces et bien entendu, une voix magnifique qui s’est patinée au fil du temps.
« Quelqu’un a dit que j’étais dangereux… » chante Morrison sur le premier titre de l’album. Ses prises de positions controversées durant la pandémie ont abouti à ce « Dangerous » qu’il adresse à Robin Swann, le ministre de la santé nord-irlandais pour lui réclamer des preuves sur ses affirmations. On en est tous là, à se demander si le travail a été bien fait ou si on nous a pris pour du jambon. Van Morrison s’exprime et apparemment ça ne plaît pas. Il reste les huit minutes d’une superbe chanson où flottent quelques effluves de J.J. Cale, cet autre renégat merveilleux. Pour nous, « Dangerous » n’est pas dangereux, bien au contraire. C’est un chant contestataire à la structure rock classique dont le mot Dangerous sert à la fois de rythme et de slogan. Van Morrison a une voix qui porte (dans tous les sens du terme) et je comprends que certains aimeraient qu’il la mette en veilleuse. Dans l’ensemble, les titres de What’s It Gonna Take ? sont légèrement plus longs que sur le précédant opus et c’est bien évidemment une bonne nouvelle. Van prend son temps, on le sent moins dans l’urgence et tout le monde en profite. À commencer par l’orgue Hammond de Richard Dunn et la guitare de Dave Keary qui se baladent un peu plus sur ce disque. Les ambiances sont variées et la coloration blues classique omniprésente sur Latest Record Project, Volume 1, est ici moins systématique et moins définitive. Pour preuve, le rock’n’roll de « Fodder For The Masses » qui change soudainement d’ambiance grâce aux « backings » soul de Crawford Bell, Dana Masters et Jolene O’Hara. Un trio envoûtant que l’on retrouve sur pas mal de titres des deux albums. Les paroles de « Fodder For The Masses » (bourrage de crâne pour les masses), comme pour beaucoup des thèmes repris sur What’s It Gonna Take ?, sont des réflexions sur les manipulations dont nous sommes l’objet. Maintenant, c’est à vous de voir si cela vous gêne ou si vous acceptez que des critiques s’élèvent dans le quasi-néant du show-biz actuel. Pour moi, cela ne me dérange pas, même si je pense que la musique reste l’atout n°1 de cet album.
Et quelle musique ! Sur ce disque, il n’y a aucun temps mort. Les morceaux s’enchaînent dans des constructions classiques mais avec assez d’originalité pour se distinguer les uns des autres. Le doo-wop coloré de « What’s It Gonna Take ? », le funk viril de « Money From America », le piano jazz de « Damage And Recovery » ou encore le rock’n’roll sans âge de « I Ain’t No Celebrity » sont (entre autres) des exemples de la diversité de cet album très festif malgré les sujets abordés. Et c’est ce paradoxe qui en fait une œuvre à part où la musique, pleine de soleil, prend le dessus et en ressort comme la grande gagnante des débats. Mais ça, on le savait déjà. Et puis, il y a des moments forts sur ce disque comme le fameux « Nervous Breakdown » et ses annonces d’instruments toujours amusantes et proches des ambiances live chères à Van. Ou bien cette diatribe personnelle sur « Fear And Self-Loathing In Las Vegas », un rap peu indulgent sur la vie d’artiste, mais qui met en lumière la basse de Pete Hurley et la batterie de Colin Griffin. Et pour finir, le magnifique « Pretending » (faire semblant) un peu désabusé certes mais tellement vrai. Ici la musique est à couper le souffle et d’une évidence presque insolente. Ils sont peu nombreux les artistes capables de rendre l’écriture aussi facile et aussi belle. Et puis, c’est rassurant de savoir que la source où Van Morrison puise ses chansons semble quant à elle, intarissable.
La pochette passe-partout de Latest Record Project, Volume 1 donnait peu d’indications sur son contenu. Par contre, celle de What’s It Gonna Take ? est beaucoup plus explicite et les humains marionnettes à qui l’on demande de se réveiller interpellent aussitôt notre sens critique. La chronique de cet album ne pouvait pas se limiter à la musique, aussi belle soit-elle. Van Morrison a le mérite d’ouvrir un débat passionné, mais qui réclame avant tout de la nuance, d’un côté comme de l’autre. A l’instar d’Eric Clapton, il va se faire descendre c’est certain et la liberté d’expression, comme d’habitude, en prendra pour son grade. Cela dit, je crois qu’il s’en fout, car il aura le sentiment du devoir accompli et même s’il exagère, la pensée unique n’est pas vraiment faite pour lui. Reste un superbe album, un de plus, à déguster sans a priori ni arrières pensées.
Van c’est le maitre absolu, j’ai beau chercher depuis 50 ans c’est LE PLUS GRAND DE TOUS. Même si depuis une paire d’année cela sonne comme du déjà vu, c’est du jamais vu !!!! Comme je le dis souvent à ma belle-fille, dans la vie il y a DIEU et VAN au dessus… Musicalement vôtre.
Pour qu on ne me prenne pas pour Salman Rushdy et ses versets sataniques j ai toujours répondu a tous mes convertis que Van est le dernier prophète que dieu nous a envoye et depuis surnomme ainsi;;;;;vu mon age j ai légué en heritage tous mes vinyles depuis les sixties a mon dernierconverti ( mon fils qui initie le sien a son tour pour perpétuer la tradition) !!!!!
Tout est dit. Excellente chronique (il reste donc des journalistes )
Mon trio c’est van , bob dylan et les Rolling