The Black Cat’s Eye – The Empty Space Between A Seamount And Shock-Headed Julia
Tonzonen Records
2023
Palabras De Oro
The Black Cat’s Eye – The Empty Space Between A Seamount And Shock-Headed Julia
Près de deux mois sans chroniquer (c’est comme ça quand on est multitâches), il me fallait frapper un grand coup avec un band à la réputation planétaire : The Black Cat’s Eye ! Comment ? Vous ne les connaissez pas ? Ah, ah ! C’est pas mon genre de faire le buzz avec une grosse pointure. Alors, j’ai fait appel à mes souvenirs et à ce mail que j’ai reçu en mars dernier et que j’avais gardé dans mes cartons après en avoir visionné la vidéo bandante. Là, des yeux de chat noir m’hypnotisaient et semblaient me dire « S’il te plait miaou ami, chronique miaou ». Alors, pour ne pas que The Empty Space Between A Seamount And Shock-Headed Julia, cet album au nom interminable (c’est cool, il me suffit de l’écrire une dizaine de fois et ça gonfle ma chronique si je suis en panne d’inspiration), ne termine à la SPA, je me suis attelé à la tâche, certes tardivement, mais résolument.
The Black Cat’s Eye est un groupe de cinq Teutons fondé à Francfort-sur-le-Main en 2018. Après un EP éponyme sorti en 2019, The Empty Space Between A Seamount And Shock-Headed Julia est leur premier LP. Le combo est formé d’un batteur (Stefan Schulz), d’un bassiste (Jens Cappel) et de… trois guitaristes (Christian Blaser, Wolfgang Schönecker et Steffen Ahrens), mais ils ne donnent pas dans le style Iron Maiden. Leur truc n’est pas de coller les lignes de grattes les unes aux autres pour avoir un gros son ou de la twin, mais plutôt de les combiner pour créer des mélodies complémentaires et entrelacées, chacun jouant un peu son truc. C’est ce que l’on peut remarquer sur le mid lourdingue « In My Dreams The Wind Chases Away The Clouds » : le son est gros et pourtant on peut noter que les trois grattes ne jouent pas le même riff. Tout cela est très maîtrisé, car, qu’on se le dise, The Black Cat’s Eye n’est pas un groupe d’impro même si on en a souvent l’impression, surtout que leur crédo est le rock prog psychédélique 60’s et 70’s, un genre dans lequel les jams sont monnaie courante. Pour autant, leurs expérimentations peuvent les entraîner très loin et durer même… très longtemps !
Leur truc n’est pas de délivrer des messages ou des sources d’inspiration, mais plutôt d’inciter l’auditeur à voyager dans sa tête. Il faut dire qu’ils assènent un énorme coup de massue d’entrée avec le pavé « Kill The Sun And The Moon And The Stars ». Sa première partie est super planante et interminable, une sorte de florilège d’accents aériens de guitares avec certains bends gilmouresques. L’arrivée progressive d’un riff entêtant est jouissive et m’a rappelé les fantastiques progressions de la pépite Giant Sky (si l’on veut bien remplacer dans sa tête les sonorités electro par des six cordes). Ce « Cat » semble raffoler de la Soup au Floyd. Ce morceau recèle vingt minutes psychédéliques instrumentales d’une classe ébouriffante dont la puissance atteint son paroxysme lors d’un solo rageur et bluesy qui nous prend aux tripes. Je suis conquis, j’ai des frissons dans tout le corps, je suis redevenu un ado éberlué et pris de court devant tant de magnificence alors que les tableaux s’enchaînent en fading en étant toujours plus prenants. Le final céleste et vaporeux de ce titre me laisse sans voix, mais qu’est-ce qui m’arrive ? Je suis revenu à la grande époque 70’s où l’on ne se posait pas la question de la durée d’un morceau. On jouait pour le plaisir jusqu’à n’en plus finir. Mes pieds ne touchent plus terre, mon dieu, mais je vole… Il faut dire que l’album a été mastérisé par Eroc, une légende du indie psychédélique et néo-Krautrock. Vous l’aurez compris, le grand coup dont je parlais plus haut, il est là, dans ce morceau incroyable.
Changement total de décor avec « Katla », un titre punchy qui démarre sur une rythmique à la Frost* (là encore si l’on fait fi de l’electro) et montre le côté énervé du chat lorsqu’il sort ses griffes. Ciel, mes rideaux et mon canapé sont en lambeaux ! Nouveau virage à 180° avec le délicieusement 60’s « Winter Song », une petite ritournelle folk chantée. Décidément, nos Germains ont plus d’un tour dans leur sac quand ils balancent « In My Dreams The Wind Chases Away The Clouds » dont la description pourrait se résumer à « groove de ouf et riffs de folie ». Dixit le groupe, ça n’est donc pas une jam, mais qu’est-ce que ça y ressemble. Arrive le tour du bizarre « Lostlostlostlostlostlostlostlost » qui est une cover, mais non, c’est pas une cover… m’enfin il y a plein d’accents de chant et de gratte qui rappelle le fameux « Heroes » de Bowie bien que ça n’en soit pas une reprise, plutôt une sorte de digression libre basée sur ce titre mythique. C’est un peu l’OVNI final de l’album.
Si je résume, du planant versatile, un chef-d’œuvre protéiforme de vingt minutes, de l’énergie, du rétro, du groove et de la pop psyché, wow, ça tape dans toutes les directions avec autant de bonheur et d’efficacité. The Empty Space Between A Seamount And Shock-Headed Julia est une leçon collective de guitares éclectiques de la part d’un groupe hors norme qui vaut vraiment le coup qu’on s’y attarde… au moins pendant vingt minutes, voire plus si affinités.
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