Sun Caged – The Lotus Effect
Sun Caged
Lion Music
Sun Caged est une sorte d’archétype du groupe estampillé métal-progressif, tant on y retrouve dans sa musique tous les ingrédients incontournables du genre : son puissant, chant lyrique, omniprésence des claviers et guitares virtuoses, compositions extrêmement alambiquées et grosse maîtrise technique de chacun des instrumentistes. Cette formation hollandaise, emmenée par son leader et fondateur, le guitariste Marcel Coenen (ex-Lemur Voice) a fait son apparition sur la scène en 1999, en publiant dans la foulée plusieurs EP’s jusqu’à la parution d’un vrai premier album plutôt bien accueilli par le public et la critique. De grands espoirs sont alors placés dans cette nouvelle formation au potentiel musical indéniable, affichant d’entrée de jeu un professionnalisme rigoureux, mais dont la première livraison studio est peut être encore trop inspirée par l’indétrônable Dream Theater, chef de file du mouvement. Quatre ans plus tard, Sun Caged transforme l’essai en revenant avec « Artemisia », un très bon disque fleuve de 70 minutes (et un line-up déjà modifié), mais où les citations de son modèle américain sont encore assez envahissantes, ce qui forcément en ravira certains et en agacera d’autres, pour ne pas dire plus. Qu’en est-il donc aujourd’hui avec ce « The Lotus Effect » qui, une fois n’est pas coutume, atterrit dans les bacs exactement quatre années plus tard ?
Premier constat, si le personnel du groupe a encore changé (Roel Vink cédant sa place de bassiste à Daniel Kohn, laissant Marcel Coenen seul survivant de la formule originale), la musique elle, n’a encore pas bougé d’un iota. Sun Caged reste un groupe de haute volée qui impressionne de par ses qualités d’écriture et ses prouesses instrumentales, mais qui n’arrive pas à sortir de l’ombre du théâtre des rêves à l’apogée de sa créativité. Les nostalgiques et les déçus du Dream Theater actuel pourront quelque-part éventuellement s’en réjouir et se rabattre sur Sun Caged, tant celui-ci exploite jusqu’à la moelle, mais avec un talent indéniable, les bonnes vieilles recettes qui ont fait la gloire d’un « Images And Word » ou d’un « Awake ». Même la production sonne exactement comme celle qui se pratiquait couramment par les groupe heavy-progressif dans les années 90 ! Aussi, il semblerait donc que nos amis bataves se complaisent dans cette démarche tout aussi respectable, qui consiste à composer et à jouer sans trop se poser de questions la musique qu’ils chérissent par dessus tout, en affichant un malin plaisir à en faire des tonnes, en toute confiance car se sachant pleine possession de leurs moyens (aucune faiblisse en effet à déplorer dans le jeu de chacun des musiciens, absolument parfaits et millimétriques, et un chanteur à la voix agréable qui s’en sort plus qu’honorablement dans un registre lyrique).
Les amateurs de musiques compliquées et en constante ébullition, à grand renfort de métriques rythmiques impaires, seront à coup sûr aux anges, car c’est encore à un véritable déluge instrumental auxquel Sun Caged les convient, parfois au détriment de la mélodie. Au moins, on ne pourra pas reprocher aux néerlandais de se laisser aller à la tentation des refrains simplistes et commerciaux ! Il en devient même difficile de retenir dans ce nouveau pavé un titre en particulier, même après plusieurs écoutes, tant cela part dans tous les sens, les musiciens jonglant constamment avec les climats, tantôt calmes, tantôt fougueux, mais dans une ambiance générale plutôt volcanique qui à la longue peut s’avérer éreintante pour l’auditeur.
Pour conclure, je dirais que « The Lotus Effect » est un bon disque, maitrisé de bout en bout, mais auquel on peut reprocher une réelle absence de prise de risque et donc d’innovation. Si le groupe ne se renouvelle pas, il risque de n’entraîner que lassitude à la longue et ainsi de perdre une partie de son public, en quête de surprises et de nouvelles émotions. Verdict dans quatre ans ?
Philippe Vallin (7,5/10)
Site web : http://www.myspace.com/suncaged