Robert Jon & The Wreck – Ride Into The Light

Ride Into The Light
Robert Jon & The Wreck
Journeyman Records
2023
Thierry Folcher

Robert Jon & The Wreck – Ride Into The Light

Robert Jon & The Wreck

Je viens de voir Robert Jon & The Wreck sur scène (salle Cap Caval à Penmarc’h dans le Finistère) et j’ai « Free Bird » de Lynyrd Skynyrd qui tourne inlassablement dans ma tête. Mais cela aurait très bien pu être les Allman Brothers Band, les Doobie Brothers, Bob Seger, ou encore le Tedeschi Truck Band dont ils disent s’inspirer. Faut dire qu’ils possèdent en la personne d’Henry James Schneekluth un sacré lead guitariste capable de ressusciter les interminables chevauchées dévastatrices d’Allen Collins et de Gary Rossington (ce dernier venant de nous quitter cette année). Donc, qui dit concert dit passage obligatoire par la case shopping et son bel étalage de tee-shirts et de CDs. Je fais aussitôt l’acquisition de Ride Into The Light, leur septième et dernier album en date venant compléter une belle série d’enregistrements commencée il y a un peu plus de dix ans. Alors je peux vous dire qu’après écoute de ce petit joyau, on n’a pas de soucis à se faire, la relève est là et même si on lorgne parfois vers un passé de toute façon révolu, le southern rock, le blues rock, le hard country rock, appelez ça comme vous voulez, est toujours vivant et bien vivant. Robert Jon & The Wreck a commencé sa carrière en 2011 en Californie du Sud et après une série de concerts mémorables, il fut désigné comme « meilleur groupe live » aux Orange County Music Awards de 2013, et je comprends aisément pourquoi. Ça ratisse, ça dégomme, ça nettoie tout sur son passage pour ne laisser qu’une foule abasourdie, les yeux pétillants de bonheur. Le rock, le vrai, est fait de ces moments-là où le martellement d’une batterie vous entraîne inexorablement vers un lâcher prise immédiat et bienfaiteur. Là aussi, Andrew Espantman, le préposé aux baguettes, s’y connaît pour donner le tempo et lancer à tout berzingue une machine digne du terrible truck de Steven Spielberg dans Duel (1971).

Maintenant, la grande question est de savoir si l’on va retrouver en studio la même fougue et la même hargne chez un groupe qui s’exprime si bien sur scène. Une situation déjà connue et parfaitement gérée chez les Stones, Springsteen, Arcade Fire, Phish ou même tous les groupes cités plus haut. De ce fait, ce n’est pas par hasard si l’équipe de Robert Jon Burrison sort en parallèle à Ride Into The Light leur premier live officiel intitulé Live At The Ancienne Belgique. Comme ça, la panoplie est complète et tout le monde est content. Ce nouvel album est court (32 minutes seulement) et ramassé. Il s’apparente à une sorte de carte de visite disant : « voilà à quoi ressemble notre musique et maintenant, venez nous rejoindre sur la route pour l’écouter ». Alors, même si les formats studio paraissent plus condensés, ils n’en demeurent pas moins bourrés de qualités. Un peu à l’instar de la production, belle et directe, qui retranscrit à merveille le son et l’esprit « roots » voulus par le groupe. A l’image aussi de ce « Pain No more », produit par Dave Cobb (Greta Van Fleet, Chris Stapleton) qui nous fait entrer dans le vif du sujet sans fioriture ni calculs. Ce premier morceau démarre pied au plancher, joué par une équipe soudée et consciente désormais de son potentiel haut de gamme. Le tempo est fiévreux, les riffs puissants et le chant, tout aussi tonique que troublant. On le verra tout au long de ce disque, les compositions sont ultra carrées, les mélodies simples à retenir et l’interprétation sans faille ni remplissage. C’est un peu KO debout que l’on se cale dans un coin du ring pour recevoir « Who Can Love You », la facette Americana et plus tranquille de nos amis californiens. Ici, c’est l’illustre Don Was (Rolling Stones, Bonnie Raitt) qui est aux manettes pour nous offrir une jolie ballade que les Eagles n’auraient pas reniée. Il faut signaler que la voix de Robert Jon Burrison rappelle par moments celle, légèrement voilée, de Don Henley.

Robert Jon & The Wreck Band 1

Une trêve de courte durée, car l’appel du rock’n’roll de « Come At Me » rugit avec insistance pour nous ramener au pays des rythmes effrénés et des slogans sans détours. L’invitation est franche, donc pas question de tergiverser, on avance tous ensemble. Qui dit rentre dedans ne veut pas dire brouillon pour autant. L’écriture est soignée, les guitares bien en place, la basse de Warren Murrel calée au bon endroit et le chant toujours aussi impeccable. Du bon boulot qui nous arrache du sol et nous projette très loin en arrière, aux temps anciens où la côte ouest vibrait de ces mêmes décibels et de cette même adoration pour une musique blues réinventée. Le décrassage continue avec « One Of A Kind », un autre brûlot ultra dynamique construit pour faire onduler un public en transe. Henry James passe sans problème des glissements du bottleneck à la dextérité de ses doigts sur ce titre à la spontanéité éclatante. Ensuite les choses vont se calmer un petit peu, tout d’abord avec « Bring Me Back Home Again » produit par Kevin Shirley (Iron Maiden, The Black Crowes), un super morceau mettant en avant les belles harmonies vocales et les jolies phrases mélodiques dont le groupe est aussi capable de produire. À noter la présence sur ce titre de Jake Abernathie, le nouveau préposé aux claviers désormais intégré à part entière dans le casting de Robert Jon & The Wreck. Et puis, le ton s’adoucit vraiment avec le magnifique « West Coast Eyes » produit par Josh Smith & Joe Bonamassa, ce dernier venant de fonder Journeyman Records, le tout nouveau partenaire du groupe. Sur cette chanson ensoleillée, la musique ne se veut pas innovante, mais juste conforme aux schémas bien rodés, légués en héritage à cette jeune génération dont la maturité étonne et rassure. Le temps a passé très vite et nous voilà repartis au galop avec « Don’t Look Down », un autre coup de poing à la construction typique des partages avec le public. L’album se termine avec le morceau titre « Ride Into The Light » et ses twin guitars en intro (une des spécificités du groupe). Ultime étape, en forme d’hymne joyeux et communicatif pour un album sans fausse note ni remplissage inutile.

Robert Jon & The Wreck Band 2

Ride Into The Light de Robert Jon And The Wreck ou comment prouver au monde entier que le rock’n’roll n’est pas mort et qu’il a de beaux jours devant lui. Comme je le disais plus haut, le groupe vient de rejoindre Journeyman Records, la nouvelle écurie de Joe Bonamassa et Roy Weisman dont la particularité est d’aider les nouveaux talents en leur apportant des producteurs aguerris ainsi qu’un marketing et une gestion à l’ancienne. Sur Ride Into The Light, ce ne sont pas moins de cinq ténors des manettes qui se partagent la galette de façon tout à fait habile et cohérente. Ce nouveau partenariat est une aubaine pour le quintet californien qui pourrait ainsi passer dans une autre dimension. L’avenir nous le dira. Enfin, si vous faites l’acquisition de ce disque, je ne saurais trop vous conseiller de vous précipiter sur leur Live At The Ancienne Belgique (CD+DVD) pour que vous ayez une petite idée de leurs capacités sur scène. A moins qu’une date de concert ne s’affiche pas très loin de chez vous, alors là, pas d’hésitation, allez-y !

Coup-de-Coeur

https://robertjonandthewreck.com/

 

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