Orphaned Land – Unsung Prophets & Dead Messiahs

Unsung Prophets & Dead Messiahs
Orphaned Land
Century Media
2018

Orphaned Land – Unsung Prophets & Dead Messiahs

Orphaned Land – Unsung Prophets & Dead Messiahs

Orphaned Land, le groupe israélien le plus respecté dans le monde arabe, ne lâche pas l’affaire. Vingt-six ans qu’il s’appuie sur son hybride musical de metal oriental pour dénoncer à coup de riffs ravageurs et de paroles écorchées vives les travers de l’humanité en particulier au Moyen-Orient.

Unsung Prophets & Dead Messiahs (UPDM) n’échappe pas à la règle pour un groupe qui a toujours associé qualité des textes à la qualité musicale. Bien que parfois désabusé par l’immensité de la tâche qu’il s’est auto-attribuée, Orphaned Land est toujours aussi vindicatif pour faire prendre conscience au monde entier de l’inutilité des guerres surtout lorsqu’elles sont fratricides et religieusement absurdes.

Orphaned Land band1

Kobi, leur emblématique chanteur n’est jamais en panne d’inspiration vocale en chant clair ou en growls qui ont fait leur réapparition sur cet album après un All Is One plus direct et consensuel d’où ils avaient pratiquement été exclus. Les phrases-chocs s’égrènent tout au long de ses interviews (l’un de ces entretiens a été intitulé « Nous devrions combattre le terrorisme et non la religion ») et de ses lyrics et il n’est pas prêt de se taire, lui qui considère son groupe comme « le véritable ambassadeur d’Israël dans le monde car le seul à pourvoir associer à son pays un sentiment de fraternité ». Pourtant, pas question de s’en glorifier devant un Syrien qui le remercie pour tout ce qu’il a fait dans son pays car « même s’ils n’ont pas sauvé un seul enfant là-bas, ils y ont apporté l’espoir ».

Il ne faut donc pas s’étonner si des fans, à travers tout le Moyen-Orient, sont allés jusqu’à réclamer l’attribution du prix Nobel de la paix à Orphaned Land, sans succès jusqu’à présent. Quoi de plus normal mais peut-être dérangeant pour les pontes de cette institution que de récompenser un groupe qui clame : « Pourquoi l’humanité doit toujours combattre pour survivre au lieu de prospérer ? La réponse est simple : Il est plus facile de contrôler une nation non éduquée. » À cela, j’ajouterais modestement que même dans des nations soi-disant « éduquées », ça demeure facile. Il suffit de voir les résultats des élections « démocratiques » ici et là…

Si All Is One était un vœu pieu pour un mix de toutes les religions empreint de respect mutuel, UPDM est un volcan nourri par la colère et l’impuissance devant ceux qui nous gouvernent mais surtout face à la masse silencieuse et soumise de l’humanité, celle qui « en sait plus sur les fesses de Kim Kardashian que sur les enfants qui meurent de faim et de soif en Afrique ». Mais, au fait, qui est donc Kim comment déjà ?

Déjà cinq paragraphes et pratiquement pas un mot sur leur musique. Il faut dire que le discours d’Orphaned Land m’a toujours beaucoup touché personnellement, moi qui suis souvent au contact de ces populations déracinées par les guerres intestines qui défigurent des pays ayant été magnifiques à une époque. Oh et puis, peut-être qu’à choisir, Orphaned Land préfère que l’on parle plus de ses messages que de sa musique.

Il me faut pourtant vous décrire musicalement ce magnifique opus dans lequel nos amis orphelins semblent avoir atteint une certaine plénitude musicale en réalisant l’alchimie parfaite entre le metal, le folk oriental, le rock mais aussi le prog bien que le genre metal progressif dans lequel je les ai classés (un peu par défaut) ne soit pas celui qui les qualifie le mieux du fait que ses codes et polyrythmies ne constituent pas la colonne vertébrale d’UPDM.

Orphaned Land band2

L’œuvre (n’ayons pas peur des mots) est lancée par cinq morceaux assez directs où l’accrocheur « The Cave » est un prélude à l’emprise des growls de Kobi Farhi et des riffs de Idan Amsalem sur « We Do Not Resist » avec son intro façon Passion de Pendragon. Ensuite, le manifeste « Propaganda » s’oppose judicieusement au médiéval « All Knowing Eye » dont le solo de Chen Balbus est sublime avant un « Yedidi » non composé par le groupe mais qui lui va comme un gant, tel un « Sapari » en mode moins ambitieux toutefois.

Le morceau de bravoure est constitué par un « Chains Fall To Gravity » qui donne des frissons de plaisir et d’émotion à de multiples reprises par son refrain prenant et ses accents plaintifs ou parfois andalous de guitares de Steve Hackett dont la contribution ne passe pas inaperçue, loin s’en faut.

Celles d’Hansi Kürsch sur un « Like Orpheus », dans lequel on mesure bien l’opposition des styles entre les chants d’Hansi et Kobi, m’a rappelé que c’était lors d’un concert parisien avec ces deux groupes à l’affiche que j’ai vu pour la dernière fois Orphaned Land sur scène. Je me souviens avoir été un peu déçu du peu de place laissé en première partie aux Israéliens au niveau des lights et du son. Hansi a-t-il voulu compenser ?

La grandiloquence semble être plus prégnante dans la seconde partie du CD en particulier au niveau des chœurs et de l’orchestration (« Poets Of Prophetic Messianism », « My Brother’s Keeper », « The Manifest – Epilogue ») bien qu’Orphaned Land y ait encore glissé un « Left Behind » très entraînant sur lequel on mesure tout le travail de la solide section rythmique impulsé par Uri Zelha et Matan Shmuely.

Si l’on n’est pas spécialement sensible aux messages de paix délivrés par Orphaned Land, on le sera forcément à sa musique qui est sortie des sentiers battus il y a plus d’un quart de siècle en osant fondre dans le même creuset metal et oriental. Il s’agit d’un mariage qui n’est pas contre-nature car, depuis « Kashmir » de Led Zeppelin, on sait que ces deux styles sont faits pour s’entendre. Encore fallait-il avoir osé pousser cette fusion aussi loin qu’Orphaned Land l’avait fait à l’époque.

Nos Israéliens préférés savent se renouveler dans la constance avec un Unsung Prophets & Dead Messiahs dont les facettes musicales ne dépareilleraient pas la caverne d’Ali Baba.

Je ne terminerai pas sans une dernière citation qui n’est pas d’Orphaned Land mais de Platon et constitue les lyrics de « Poets Of Prophetic Messianism », à savoir : « Celui qui a un véritable avis sans compréhension est comme un aveugle sur une route toute tracée. »

Rudy Zotche

Coup de Coeur C&O

http://www.orphaned-land.com/

https://www.facebook.com/OrphanedLandOfficial/

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