Niels Mori – Varinka

Varinka
Niels Mori
Autoproduction
2014
Frédéric Gerchambeau

Niels Mori – Varinka

Niels-Mori Varinka

Niels Mori : deuxième partie

Varinka, sorti en 2013, est une sextuple illustration musicale de la réponse que m’a faite Niels Mori quand je lui ai posé cette question, que je croyais bien naïvement anodine, à savoir ce que représente pour lui le minimalisme. Je m’attendais, en plus savante et développée, à la réponse classique qui est de dire que le minimalisme consiste à atteindre des résultats complexes avec des moyens simples. Mais ce ne fut pas cela du tout. Me prenant à contre-pied, il répondit qu’il voulait bien être considéré comme un répétitif mais pas comme un minimaliste, tout simplement parce qu’il ne comprend pas ce qu’on désigne par minimalisme, pour autant que le minimalisme existe. Je dois avouer que cette réponse m’a plongé dans des tourbillons de réflexions éreintantes.

J’ai d’abord cru à une posture, voire à une imposture. Allons bon, comment nier l’existence du minimalisme ? Reich, Glass, Riley ou La Monte Young, c’est bien des minimalistes, hein ? Donc le minimalisme existe. CQFD, non ? En fait, l’affaire est plus complexe. Car il n’y a pas un minimalisme, mais autant de minimalismes qu’il y a de minimalistes. Et encore, à condition que ces musiciens se considèrent eux-mêmes comme des minimalistes. Et c’est là où les frontières deviennent floues. Qui est minimaliste ? Qui ne l’est pas ? Pour le savoir, encore faudrait-il définir le minimalisme d’une manière sûre et documentée. Sauf qu’aucun minimaliste ne fait la même chose que son voisin. Et si Niels Mori avait raison ? Et si le minimalisme n’était qu’un mirage, un concept séduisant mais sans réalité concrète ?

Niels-Mori Varinka band1

L’écoute de Varinka éclaire la réponse de Mori tout en la rendant plus complexe, sinon plus énigmatique. La beauté de l’album s’impose tout d’abord. Puis, en le réécoutant, on apprécie mieux la fine mécanique des boucles et leur simplicité. Enfin, a priori. Car en réécoutant encore on se dit que ces boucles sont assurément des boucles, mais on ne comprend dès lors plus comment leur simplicité s’arrange pour produire un résultat aussi subtil, envoûtant et quelque part déroutant. Et si ces boucles n’étaient pas aussi simples qu’on voulaient le croire ? On réécoute encore, on scrute, on détaille, on veut comprendre et on comprend de moins en moins. Seule reste intacte la beauté tranquille de l’album.

Voici donc Varinka. Six morceaux très différents les uns des autres mais chacun lié à un dénominateur commun : la boucle. Et plutôt que de simplifier la compréhension de l’album, elle en épaissit le mystère par les formes variées adoptées par ces boucles et le spectre immense et fascinant des résultats obtenus. Je peux même vous l’avouer avec délice : j’aime à me perdre dans les méandres plus ou moins indolents de Varinka. Et à chaque fois, je me rends mieux compte du redoutable travail d’horlogerie qui a permis cet album. Oui, Niels Mori a mille fois raison dans son ode à la répétition, elle n’a rien de minimale !

https://niels1.bandcamp.com

https://soundcloud.com/nielsmori

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.