Lou Reed – Metal Machine Music

Metal Machine Music
Lou Reed
RCA Records
1975
Palabras De Oro

Lou Reed – Metal Machine Music

Lou Reed Metal_machine_music

Fracassé par un début de parcours alcoolo/junkie avec le Velvet Underground, Lou Reed se lance dans une carrière solo qui peine à décoller avec la sortie de son premier album éponyme chez RCA Records en 1972. La même année, sa rencontre avec David Bowie le propulse de façon inattendue en haut des charts avec le remarquable album Transformer et son tube indémodable « Walk On The Wild Side ».
Confiant en sa créativité bouillonnante, Lou Reed s’investit dans un projet beaucoup plus personnel. C’est le très sombre et conceptuel Berlin qui sort l’année suivante. Malheureusement, celui-ci déroute ses fans et génère beaucoup de déception chez son label qui exige de lui un album live en contrepartie. C’est le furieux Rock’n’Roll Animal (chroniqué très récemment dans ces colonnes par notre ami Thierry) qui sera donné en pâture à tous ces ignorants, que dis-je, ces ignares ! En effet, Berlin, produit par le débutant d’alors, Bob Ezrin, est un véritable chef-d’œuvre sur lequel le temps n’a que peu de prise. Que celui qui n’a jamais été sur le point de verser une larme à l’écoute de « The Kids » me jette la première pierre. On entend d’atroces pleurs d’enfants. Il s’agirait de ceux de Bob Ezrin, à qui il aurait fait croire qu’ils ne reverraient plus jamais leur mère. Légende ou horrible vérité ? Et cette science du « chanter faux » que le natif de Brooklin éleva au niveau d’un art (« Lady Day »). Étonnant non ?

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Mais cette chronique n’est pas celle du monument qu’est Berlin. Lou Reed est et restera jusqu’à son décès en 2013 un marginal incontrôlable et instable. De plus, il est rancunier et jaloux de son propre succès rencontré avec le commercial Transformer et le sauvage Rock’n’Roll Animal. Or, il doit encore un album à RCA Records. Aussi, il décide la pire chose qu’un artiste peut faire : enregistrer un album inécoutable pour faire chier son label. Ce sera Metal Machine Music, un double vinyle d’environ une heure de larsens et de distorsions de guitare en boucles successives ou superposées… une blague ou un fuck à son label ? Lorsque MMM sortira, Lou Reed dira : « Celui qui a réussi à écouter jusqu’à la quatrième face de l’album est encore plus malade que moi ». Mais Thierry, le même que cité plus haut, m’a glissé l’anecdote suivante : « Sur le pressage originel américain de MMM, le sillon de la face 4 du vinyle se terminait par une boucle, rendant impossible l’arrêt automatique du disque. Il fallait donc se lever et le faire manuellement sous peine de vivre la torture indéfiniment. Certains chroniqueurs de l’époque se sont fait avoir et sont allés beaucoup plus loin que les seize minutes de la face 4. Comme quoi, MMM avait peut-être réussi son approche hypnotique et célébré de cette façon le caractère avant-gardiste de l’écoute musicale. » Ce faisant, il a oublié la chose la plus importante pour un artiste : ses fans ! La déception de ceux-ci sera immense à une époque où il était difficile d’écouter un album avant de l’acheter. Quand vous n’aviez que trois francs et six sous dans votre poche et que ce petit pécule partait entièrement dans la musique (je sais de quoi je parle même si je n’ai pas acheté MMM), tomber sur un album qui trahissait la confiance mise dans un artiste était impardonnable pour un fan. Je me souviens d’un ancienne interview de Steve Hogarth qui reconnaissait que Marillion avait bâclé Radiation parce que c’était le dernier album qu’ils devaient à un label dont ils se séparaient. Steve disait qu’ils l’avaient amèrement regretté, car ça avait été hautement irrespectueux pour leurs fans. On était pourtant à des années lumières d’un Metal Machine Music. De plus, le titre de l’album était extrêmement alléchant pour un public précurseur du mouvement metal qui déchantera sévèrement à l’écoute de cette bouillie sonore. Devant un tollé général y compris de la part des médias, RCA retirera l’album des bacs peu après sa sortie et poursuivra Lou Reed en justice. Ce dernier perdra également tout le bénéfice de sa notoriété obtenue à juste titre grâce aux albums précédents. Il mettra beaucoup de temps à regagner la confiance d’une fan base devenue très méfiante.
Pour autant, certains, et ils sont de plus en plus nombreux depuis que l’ambient, le noise et l’indus sont devenus des genres à part entière, l’ont pris très au sérieux. L’album a même été réédité en 1998 et en 2000 puis joué en live par le groupe allemand de musique contemporaine Zeitkratzer au festival de Mulhouse en 2016. Il y a donc ceux qui ont pris Lou Reed au sérieux et ceux qui s’en sont moqués (lui-même a balancé entre les deux positions). Pour la seconde catégorie, il suffit de s’amuser à lire les avis sur YouTube. Ainsi « Un jour j’ai laissé tomber ma guitare et j’ai joué involontairement une cover de MMM » côtoie « Mon grand-père a eu ses appareils auditifs qui ont fait des larsens pendant une heure sans qu’il s’en aperçoive, je pense que c’est un fan secret de Lou Reed » ou encore « Cela me rappelle quand je suis resté avec le KGB durant 157 jours. Ils jouaient ça tout le temps ! Wow, ça me rappelle vraiment des souvenirs… ».

Lou Reed Metal_machine_music band1
Je vous rassure, je n’ai jamais réussi à aller jusqu’à la quatrième face de MMM. Je tenais à ma santé mentale. Alors oui, c’est la première fois que je chronique un album sans l’avoir entièrement écouté. Veuillez m’en excuser platement, mais faut un début à tout. De toute façon, MMM ne se chronique pas, il s’écoute, car il est indescriptible. Bon courage !

https://loureed.com/

 

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