Killing Joke – Pylon
Killing Joke
Spinefarm Records
Chantres d’un post-punk engagé (et enragé), malgré la pause « new wave » inévitable de la deuxième moitié des années 80 qui leur a cependant été salutaire en terme de ventes, les énigmatiques Killing Joke continuent à faire parler d’eux. Relevant sans cesse le défi de se renouveler depuis leur retour aux guitares au tournant des années 90 (l’excellent « Extremities, Dirt, And Various Repressed Emotions » dont la violence a du surprendre plus d’un fan), c’est avec le line-up d’origine que le leader charismatique Jaz Coleman a amorcé la deuxième décennie des années 2000. L’objectif était alors de revenir aux fondamentaux du groupe : des hymnes imparables sur des rythmiques aussi bien tétanisantes qu’enivrantes, sur fond de guitares oppressantes. Ici, cependant, le maître à penser ne semble plus vouloir s’attacher à l’une ou l’autre des formules qui a émaillé le parcours de son bébé. Le temps est venu de rassembler les pièces du puzzle pour en dévoiler le sujet.
Ainsi, quand, depuis les « tréfonds de l’enfer », la cornemuse du morceau d’ouverture fait résonner des « Hosannas », l’entrain d' »Euphoria » nous donne le goût d' »aimer comme le sang ». Par ailleurs, là où « Delete » signale un nouveau « millénaire » dans un « Pandemonium » qui fait danser ses occupants sur des « motorik beats » soutenus par des guitares robotiques, c’est un « Big Buzz » trépidant mais « plus éclatant qu’un millier de soleils » qui nous éblouit.
En outre, les cadences à se trémousser de « War On Freedom » font « tourner au rouge » les débuts dub du quartet. « Mais alors », me direz-vous, « à vous lire, le résultat doit être assez déroutant ? ». Et en fait non, il n’en est rien, la formation réussissant à couler dans un même moule toutes les diverses ambiances qu’elle a su créer au fil de sa discographie. Le registre vocal surprend toujours autant, entre espoir et désespoir, entre sérénité et agitation, gardant cependant comme dénominateur commun cette vigueur qui rend Jaz si convaincant dans son rôle de prédicateur pétri d’ésotérisme.
A la manière du bouffon triste de Marillion qui noie son chagrin dans l’alcool avec ses compagnons d’infortune, le joker aux plaisanteries fatales, reprenant son jeu de cartes avec ses compagnons des débuts, vient à nouveau frapper à la porte de notre esprit pour partager ses inquiétudes. Il le fait avec une telle éloquence et avec autant de passion que nous sommes sous le charme. Nouveau coup de poker pour notre joker !
Lucas Biela
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