Joni Mitchell – Love Has Many Faces
Joni Mitchell
Rhino Records
Chez Rhino Records, comme toujours, on sait concocter ce qui fera plaisir au mélomane complétiste qui ne sait (heureusement) pas se contenter d’un pauvre album en format MP3. Les rééditions, anthologies et autres coffrets aux délices produits par cette remarquable maison de disques américaine font toujours référence. Une fois de plus, le fan transi en aura largement pour son argent. Imaginez-vous, une compilation qui couvre l’essentiel de la carrière de cette grande dame du songwriting transatlantique en quatre actes : acte 1 : « La naissance des jours rock’n’roll », acte 2 : « La lumière est difficile à trouver », acte 3 : « L’amour a beaucoup de visages » et, enfin, acte 4 : « Si vous me cherchez, je suis au bar ». Ce découpage en quatre actes a été opéré avec la plus grande clairvoyance tant la musique polymorphe de la Canadienne a su s’abreuver à toutes les sources de la musique du XXe siècle : folk, jazz, chanson, blues, rock ou pop. Toutes les ambiances sont présentes tout au long de la cinquantaine de pistes proposées dans ce somptueux objet.
Ce n’est pas pour rien que cette dame se permet le luxe d’être régulièrement citée comme la meilleure guitariste américaine (écouter pour s’en convaincre les accords tortueux ainsi que le finger picking diabolique que la fée sait créer de ses doigts graciles) ainsi que comme la chanteuse la plus complète (une voix de cristal qui ne ressemble à nulle autre.). Le mélange de ces mélodies aériennes, aux constructions extraterrestres, à cette voix maîtrisée mais si fragile offre un ensemble sonore absolument unique. Et on n’a encore pas parlé des textes somptueux ni de la production léchée qui font de chaque morceau de Joni Mitchell une perle rare. Certes, on pourra reprocher, parfois, principalement pour les titres issus des années quatre-vingts, des arrangements plus clinquants et, de fait, plus datés. Mais qui a su véritablement éviter ce piège pendant cette décennie synthétique ?
Le livret luxueux propose, en plus de l’intégralité des textes des chansons, des reproductions en couleur de magnifiques peintures réalisées par l’auteure elle-même qui, décidément, possède plus d’une corde à son arc-en-ciel. L’auditeur novice saura déceler, ci ou là, des séquences qui auront inspiré des musiciens évoluant pourtant dans d’autres stratosphères (Marillion, Mark Knopfler, Tori Amos ou Sting).
Quatre disques : un quartette, un ballet et des chansons à danser, voilà comment, en toute simplicité, la maîtresse de cérémonie, sur la couverture de l’objet, présente la somme musicale éditée. Maestria, modestie et miracle : les trois mots en « m » qui semblent définir cette très grande dame à la beauté diaphane éternelle. Il manque un mot : Merci !
Christophe Gigon (8/10)
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