Jekyll Wood – Smokescreen
Time Is Out
2022
Rudzik
Jekyll Wood – Smokescreen
Déjà mars et voici enfin, avec l’EP Smokescreen de Jekyll Wood, ma première chronique d’un album sorti en 2022. À croire que la production de 2021 a été si intéressante que j’ai dû jouer les prolongations cette année pour lui rendre hommage. Honneur donc, à un Tourangeau, un compatriote de ma région d’adoption qui m’avait déjà enchanté en 2018 avec l’étonnant Who You Are. À vrai dire, la pandémie a cet effet inattendu de considérablement accélérer le rythme des sorties studio. Aussi il faut avouer que toute l’équipe de Clair et Obscur croule sous les sollicitations inflationnistes des groupes et labels.
Alors assez de procrastination et place à Jekyll Wood et même à Gaspart Elliot, son complice dans l’ombre, sur et en dehors de la scène. Smokescreen est le second volet du tryptique d’EP qui se terminera fin 2022 avec One Day Out Of The Cave, l’album complet. Exit l’étiquette folk qui caractérisait principalement ce multi-instrumentiste exceptionnel, car hormis en partie « Not Me » qui le clôture, le propos musical de cette galette est résolument très rock. Si les parties musicales sont classieuses et complexes sur des rythmiques plus basiques, ce qui m’a le plus frappé est la richesse et la variété des vocaux. Ainsi, « Thirteen » est un mix de rythmique de guitare funk avec un chant mâtiné d’effets 60’s à la Elvis Presley, s’interrompant le temps d’un pont beaucoup plus émotionnel. Le redémarrage progressif à la guitare offre une seconde vie au morceau. La rythmique du début est retrouvée, mais les harmonies vocales se font plus aériennes conférant à « Thirteen » une aura plus planante. Ce titre bénéficie d’un clip d’animation mettant en scène un guitariste androïde dénudé, rappelant celui des Queens Of The Stone Age dont l’âme, le frontman Mark Lanegan, vient tristement de nous quitter (R.I.P. Mark). Si Jekyll Wood envisage, à l’instar du bassiste de Gronibar, de réaliser des shows dans la tenue d’Adam, moi je suis OK pour lui booker un concert privé ! (hahaha)
« Friends Don’t Lie » propose tout au long de son groove lent imprimé par une solide basse des passages de talkbox à la E.L.O. en alternance avec des chœurs floydiens (faut oser !) pour habiller le chant enchanteur de son créateur avec en prime un super solo de guitare. Une mélancolie façon The Pineapple Thief imprègne « How Much » dont le chant rappelle furieusement celui de l’excellent Bruce Soord. Décidément, Jekyll Wood a un répertoire vocal incroyablement étendu qu’il développe avec une facilité déconcertante. Certes, les effets qu’il emploie régulièrement n’y sont pas étrangers, ce qu’on remarque facilement sur la plage la plus rock et lourde qu’est « Just A Little More ». On pense alors très naturellement à Lenny Kravitz. Enfin, un folk léger et simple reprend sa place sur « Not Me » quoique les harmonies vocales (en particulier le doublage du chant) se complexifiant incroyablement au fil du morceau, ce titre apparaît finalement beaucoup plus ambitieux qu’il ne le semble au premier abord.
En définitive, ce qui caractérise Jekyll Wood, c’est cette palette sans cesse plus étendue de ses inspirations, colorée de folk bien sûr, mais surtout de rock, de blues, de pop, d’indie, de sonorités modernes et vintage de tous horizons et même, si j’osais, de crossover progressif. Je ne le redirai jamais assez : les artistes qui évoluent sans cesse et qui osent sont véritablement ma tasse de thé. Avec Who You Are, nous avions eu un savoureux Oolong à siroter, Smokescreen est un Darjeeling profond et riche, alors pourquoi ne pas espérer un Da Hong Pao (qui se vend plus d’un million d’euros le kilogramme) pour One Day Out Of The Cave attendu à la fin de cette année ?
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