Isbjörg – Glacier
Autoproduction
2017
Après un premier EP et un single chroniqués par mes soins sur C&O, j’attendais un LP et… il faut bien le dire, Isbjörg aussi ! Pourtant, c’est de nouveau un EP qui est sorti de leur machine à glaçons. J’avais trouvé la production de leurs précédents efforts plutôt satisfaisante mais c’était sans compter avec le côté perfectionniste du groupe. En effet, estimant que le producteur précédent n’avait pas su cibler le son que les six Danois souhaitaient, ils ont tout bonnement décidé d’assurer eux-mêmes le mix et le mastering de Glacier. Du coup, sortir un LP leur semblait trop risqué. C’est donc pourquoi seuls quatre icebergs se sont détachés de la banquise, un peu comme un galop d’essai pour roder la technique avant d’accoucher certainement d’un LP la prochaine fois.
Effectivement, dès l’intro « Cross », on prend de plein fouet dans les esgourdes l’évolution de la production d’Isbjörg. Sans pousser pour autant tous les « potars » à 11, Isbjörg a construit un mur sonore plus musclé, renforcé par les guitares endiablées de Lasse Gitz Tingholm et de Dines Dahl Karlsen et par des cris d’une agressivité frisant les growls. Force est de reconnaître qu’ils sont parvenus à leur but en proposant un gros son sans pour autant l’avoir comprimé à outrance lors du mixage et du mastering.
Revenons à cette intro : elle aurait pu faire pleinement partie du titre éponyme qui lui est enchaîné tant elle lui est intimement liée. J’ai eu un peu de mal à accrocher au chant assez plat de Michael Juul Hagerup sur le début qui, cependant, se rachète par la suite en proposant un refrain et quelques harmonies plus bandants. Il fait également preuve d’une plus grande versatilité sur l’excellent « Collective Egoism », parvenant aisément à dominer, là encore, un mur sonore d’une grande richesse mélodique. On ne pourra reprocher à ce morceau que sa durée trop courte. Isbjörg continue à donner une place de choix au piano de Mathias Bro Jørgensen qui est pratiquement toujours au centre des schémas sonores notamment sur chaque break, les autres instruments semblant être constamment à son service. Après ces trois titres démontrant les progrès réalisés par le groupe, « Marooned » m’a un peu déçu par ses trop nombreux breaks qui tirent en longueur, empêchant ce morceau de plus de huit minutes de véritablement décoller. De ce fait, certains bons passages sont noyés dans le manque général de rythme du titre. On a l’impression d’un patchwork d’idées sans véritable ligne directrice. Ainsi, la dernière partie chantée semble peu inspirée et le final au piano tombe un peu comme un cheveu sur la soupe.
En se concentrant sur la production, Isbjörg n’aurait-il pas parfois oublié la création artistique ? C’est la question que l’on peut se poser à la fin de l’écoute de Glacier. Maintenant que la production est au top, il va falloir l’être également d’un point de vue mélodique pour le LP tant attendu et parfois simplifier le propos sous peine de perdre l’auditeur en chemin. Heureusement qu’Isbjörg a confirmé en avoir le potentiel sur les trois premières plages de Glacier qui m’ont fait frissonner de plaisir, brrrrrr !
Rudy Zotche