Planes Mistaken For Stars – Prey

Prey
Planes Mistaken For Stars
Deathwish Inc
2016

Il y a des potes qui nous attrapent par le colbac, un de ces complices qui se rappellent à notre existence pollinisée, rangée avec son plancher qui grince et ses factures de gaz illusoires.  Par inadvertance, mais avec force, ça se rappelle à nous par un morphing du visage ou une crispation des maxillaires. C’est pas comme si on avait rien demandé. La compagnie, l’assurance, ce kiff, ce bon alloua d’antan, entre souvenirs d’un voyage foireux et descentes de bars jusqu’à une biture d’anthologie, jusqu’au coma de circonstance.

La mémoire, ça revient et ça s’efface avec une éponge spontex, alors on oublie et ça revient d’autant plus fort à la gueule. Et puis voilà que ça redemande cette tournée de bar, ce marathon ultime du foie, comme une dernière danse du houblon, cette fraternité dissoute qui ne demande qu’à se réunir sur le comptoir humide, collant et viril du bar. Et puis on repart. Le temps est passé, il en profite pour revenir avec les changements qui siéent avec…  Et ça s’est révélé majeur sur cette putain de chronologie biologique ! La résistance, finie, c’est plus la même. La fatigue est plus pressante, les pas moins assurés et le goût plus amer au fond des papilles. Un écart de dix ans, c’est pas rien. Bonjour traces, rides et bourrelets. Bonjour mise à niveau, musculation et entraînement. Mais bon, entre potes d’autrefois, ça se comprend, ça se conforte presque, juste histoire de tergiverser, revendiquer et oublier ensuite. Retrancher ce qui n’est plus et de le refaire sortir. Réapparaître… ou pas…

Planes Mistaken For Stars - Band

Planes Mistaken For Stars c’est ça, un groupe de jeunesse pour tout bon trentenaire assumé, signe d’une époque « oubliée » et dont il était étrange de s’y replonger. La formule est identique mais les ravages du temps impriment bien la surface, c’est qu’on évolue pas sans marques. Ouais, les arpèges sont là, décapants, la production tassée et ça laisse une joie aussi simple et primitive que le premier tatouage sur l’avant-bras dans une convention (avant séances au laser). Le tout laisse une impression mélancolique, voire nostalgique, dans un soupir approbateur. Du tube qui radote à la nuque, qui accuse le coup à force de réveiller des muscles non actifs depuis une décennie, Prey est l’histoire d’un mec à la voix rocailleuse et fatiguée qui n’arrive pas à sortir son glaire bloqué en face de ses potes et qui fait avec en buvant sa pinte. Il se fait vieux et ne semble plus y croire. Ni à la synesthésie d’origine, ni à cette cohésion mais il continue quand même.Il emmène ses potes aux pubs, bars, bouges pour rappeler une époque, un état d’esprit momentané avec son glaviot définitivement coincé. Magie de l’instant peut-être, regard compatissant ou regain d’énergie, l’osmose du passé qui contrecarre la désillusion actuelle, un dernier cri de rage soufflé comme une haleine brûlante que… Merde, non… C’est pas fini, oublié, perdu. Une lueur perdure, robuste dans sa fragilité, tenace dans sa rage qui ne demande qu’à fondre sur sa proie, toujours au bord de l’implosion, désabusée.

Prey est le manifeste d’une survivance. Il rappelle les amis perdus, retrouvés, oubliés, exclus, nouveaux ou à venir. Il se révèle tout aussi réticent et craintif qu’une bête aux abois que porté vers un horizon plus large avec des griffes pas si émoussées que ça. Sa colère larvée préfère s’émanciper que stagner. Planes Mistaken For Stars est humain, peut-être le plus à nu et honnête qui soit. Un pote, un vrai, à qui on excuse l’absence prolongée et qui rappelle le reflet biaisé de l’existence. Cela mérite bien une biture, thérapie face au futur qui s’annonce…

Jéré Mignon

http://www.planesmistakenforstars.com/

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