Neil Young – Homegrown

Homegrown
Neil Young
Reprise Records
2020
Fred Natuzzi

Neil Young – Homegrown

Neil Young Homegrown

Alors que pendant le confinement, Neil Young nous offrait de magnifiques sessions acoustiques « au coin du feu », Homegrown a donc surgi de nulle part. Cet album perdu du Loner date de 1974, écrit suite à une séparation. Tellement intime pour lui qu’il avait décidé de ne pas le sortir, même si tout était prêt pour sa commercialisation. A la place, c’est Tonight’s The Night qui avait été publié en 1975, album enregistré lui deux ans avant sa sortie ! Neil Young s’est même excusé auprès de ses fans, en admettant qu’il n’aurait pas dû le garder que pour lui, mais que l’album était tellement personnel et lui à vif qu’il ne pouvait se résigner à le sortir. Homegrown émerge donc 45 ans après sa création et on retrouve un Neil Young en pleine possession de son génie de songwriter, en transition de Harvest et On The Beach. Plus en mode folk que rock sur cet opus, il retrouvera ensuite Crazy Horse pour le génial Zuma. Les chansons qui composent l’album sont au nombre de douze et pas moins de sept morceaux étaient restés inédits (même s’ils ont quasiment tous été joués sur scène à un moment ou à un autre). C’est dire l’excitation qui ronge le fan avant l’écoute de cet album miracle. Et bien entendu, Homegrown est au niveau de ce que notre Canadien, devenu Américain récemment, avait pu produire à l’époque, avec quelques surprises en bonus.

A la première écoute, on peut se dire que cette collection de chansons est un peu bancale, comme si finalement, l’album était plus une compilation de morceaux restés sur une étagère qu’autre chose. Il faut donc y revenir plusieurs fois pour mettre en lumière sa cohérence et le remettre dans son contexte « émotionnel ». Neil Young se montre plus vulnérable et laisse s’exprimer ses émotions. Le piano ou la guitare acoustique deviennent intimistes, les morceaux sont économes, la voix discrète, comme s’il chantait pour lui-même. Et quand il est avec ses amis (Ben Keith, Tim Drummond, Robbie Robertson, Levon Helm, Emmylou Harris), il se laisse aller, et ça peut dériver un peu, ça cause, ça boit, ça fume mais ça joue sévère aussi. D’où des morceaux qui deviennent essentiels.

Neil Young Homegrown Band 1

Le son countrysant de la ballade « Separate Ways » montre un Neil Young mélancolique, en pleine séparation d’avec sa femme, une chanson simple et magnifique avec une superbe introduction. « Try » est aussi une ballade country avec un Neil Young sincère, qui chante simplement son envie d’une seconde chance. Pour « Mexico », courte chanson au piano, Neil nous cueille avec son chant triste, comme une réflexion pour lui-même. On connaît déjà « Love Is A Rose », chanson assez moyenne qui trouve ici un refuge thématique, passons donc au plus dynamique « Homegrown » (paru dans une autre version sur American Stars ‘N Bars) qui démarre comme une jam et qui ne dénote pas des productions countrysantes du Loner. Puis vient la curiosité « Florida » où des verres de vin remplacent les instruments de musique pour un morceau qui n’en est pas vraiment un puisqu’on y entend Neil raconter une histoire un peu enfumée à Ben Keith…

La beauté acoustique de « Kansas » renvoie à la meilleure folk de l’époque. A noter que les morceaux aux titres de villes ou de régions sont toutes des témoignages de l’errance du Loner. Une jam bluesy vient ensuite nous tirer de notre fascination : « We Dont Smoke It No More ». Curieusement, on n’a pas vraiment envie de le croire ! Dès les premières notes de « White Line », on sait que l’on a affaire à un classique. Du Neil Young à couper le souffle, un essentiel qui fait oublier la version électrique sur Ragged Glory. Le solide « Vacancy » résonne comme un possible candidat écarté de l’album Tonight’s The Night, seul morceau à la rythmique plus lourde et à la voix plus forte, plus renvendicatrice, et qui a totalement sa place dans cet album. Un titre excellent, à ranger aux côtés des classiques. Retour aux beautés acoustiques éclairées de génie avec l’intime et sublime « Little Wing » (paru sur Hawks And Doves), à tomber par terre. « Star Of Bethlehem » (paru sur American Stars ‘N Bars) clôt le tout avec une belle ballade country, voix désabusée soutenue harmoniquement par Emmylou Harris, comme sur « Try ».

Neil Young Homegrown Band 1

Je ne sais pas si à l’époque l’album contenait ces titres dans cet ordre mais le Homegrown que nous propose Neil Young en 2020 est sacrément cohérent, musicalement et lyriquement. Un album triste mais fort, qui n’aurait pas dénoté entre On The Beach et Tonight’s The Night, montrant une autre facette du Loner. En quelque sorte, c’est le chaînon manquant entre Harvest et Comes A Time. Un album qui montre à quel point la créativité de Neil Young était admirable, au vu du nombre d’albums sortis (ou cachés, ou remaniés) à cette époque. Forcément à acquérir de toute urgence.

http://neilyoungarchives.com

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