Djam Karet – Regenerator 3017

Regenerator 3017
Djam Karet
2014
HC Productions

Djam Karet – Regenerator 3017

Djam Karet n’est décidément pas un groupe de rock comme les autres. En effet, à moins d’être un oracle confirmé (et encore !), il est absolument impossible de prévoir la direction musicale que prendra chacune de ses nouvelles sorties. Et ce n’est pas ce « Regenerator 3017 », fraichement débarqué dans les bacs, qui viendra contrarier cette règle d’or que la formation californienne, emmenée par le claviériste et guitariste Gayle Ellett (qui fit son apparition en 1985 dès le second opus au titre prémonitoire de « No Commercial Potential »), s’impose depuis maintenant plus de trente ans, avec pas moins de dix sept albums à la clef ! Djam Karet demeure à ce jour l’un des rares combos à mériter le qualificatif de « progressif » au sens étymologique du terme, tant sa musique innove, explore, mélange les genres et les esthétiques sonores avec audace et brio, créant la surprise CD après CD. Du fabuleux diptyque « Burning The Hard City/Suspension & Displacement » en 1991 (qui conjuguait avec brio rock expérimental furieux et moments de grâce atmosphérique) à l’ambient-rock barré du récent « The Trip« , en passant par l’incandescent et protéiforme « The Heavy Soul Sessions » (qui sonne presque comme une jam session inspirée entre King Crimson et le Porcupine Tree des débuts), on perçoit une soif de liberté constante dans le processus créatif du groupe.

Et la réussite est bien souvent au rendez-vous ! Les américains viennent aujourd’hui célébrer les trente ans d’existence de leur collectif avec ce « Regenerator 3017 » (qui inclut tous les membres d’un line-up à géométrie variable, excepté le bassiste Aaron Kenyon). Il s’agit là d’un album résolument vintage et old-school dans sa forme et son contenu. Les musiciens ont même poussé le vice jusqu’à enregistrer leurs sept nouvelles compositions sans aucun apport informatique moderne, dans un esprit très « live & direct », avec, pour seule technologie, celle disponible à la fin des années 60/début des années 70, période dans laquelle « Regenerator 3017 » puise toutes ses racines.

Il en résulte une excellente galette qui fusionne allègrement influences psychédéliques (« Wind Pillow » et son essence typiquement floydienne), jazzy (avec le délicieux « Living In A Future Past » et ses parfums canterburyens à souhait), symphoniques (l’épique conclusion « On The Edge Of The Moon » et son empilement de thèmes et de soli lyriques, avec minimoog virevoltant et guitares stratosphériques au premier plan). Même le rock sudiste n’est pas oublié, et il plane ici et là quelques effluves discrètes empruntées au grand Lynyrd Skynyrd ou aux non moins célèbres géorgiens de The Allman Brothers Band ! Rien à jeter donc au menu de cet opus à la durée ramassée (quarante minutes au compteur, comme les standards de l’époque), qui comblera de bonheur tous les nostalgiques de bon vieux rock typé à l’ancienne.

J’attire ici également l’attention des fans de Camel, tant les références au gang d’Andy Latimer et de Peter Bardens sont nombreuses, à commencer par le groovy « Prince Of The Inland Empire » qui nous renvoie directement aux passages les plus enjoués du cultissime « Mirage », sans oublier les ballades romantiques « Lost Dreams » et « Empty House », possédées par des mélodies de six cordes qui filent le frisson.

Mention spéciale, pour ma part, au sublime « Desert Varnish », œuvre de caractère qui délivre un psychédélisme aussi floydien que mystique (avec chœurs magmaïens ou païens, au choix !) : il s’agit là d’un morceau monté sur un motif de basse hypnotique signé Henry Osborne, avec nappes évanescentes, notes de Fender Rhodes envoûtantes et envolées de guitares incandescentes. En bref, ça plane sec, et c’est du grand art !

En conclusion, Djam Karet nous délivre, une fois n’est pas coutume, un nouveau magnum opus volontairement ancré cette fois-ci dans un passéisme assumé mais jamais parodié. Alors, quelle sera la direction musicale prise sur le prochain CD ? Nul ne le sait ! Et comme je ne possède pas les dons d’un Nostradamus sous acides, je vous laisse patienter tranquillement en vous délectant de ce « Regenerator 3017 », qui se bonifie écoute après écoute. Ca tombe bien non ?

Philippe Vallin (8,5/10)

http://www.djamkaret.com/

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