David Schombert – The Gates Of Silence

The gates Of Silence
David Schombert
2007
Autoproduction

The Gate Of Silence

David Schombert est un jeune artiste de la scène électronique française, aussi talentueux et éclectique que méconnu de grand public. Avant de plonger dans la matière musicale de ce fameux « The gates of silence », son nouvel opus, il convient donc de revenir, en quelques lignes, sur la carrière de ce géniteur et manipulateur de sons. David s’intéresse à la musique depuis sa plus tendre enfance, et il entre très tôt au conservatoire pour plusieurs années d’apprentissage. Il quittera l’école de musique en pleine adolescence avec une solide formation théorique, une excellente maîtrise de la guitare, et suffisamment tôt aussi à son goût pour ne pas se sentir « formaté » sur le plan artistique. A cette même époque, il commence à s’intéresser de près aux compositeurs classiques et contemporains, tels que Mozart, Satie, Debussy, Ravel ou encore Boulez. Mais ce sont surtout les grands pionniers des musiques électroniques des seventies qui le passionnent (citons pêle-mêle Klaus Schulze, Vangelis, Kitaro ou Brian Eno), et qui lui donnent envie de développer sa propre musique.

David Schombert crée son premier studio d’enregistrement à la fin des années 80 pour se lancer en solitaire dans l’aventure de la production. L’artiste, selon ses propres dires, puise son inspiration à travers l’observation de la nature, son expérience des grands espaces, du vide et du silence, un peu à l’image du californien Steve Roach, référence absolue du genre « ambient ». David Schombert publiera son 1er album intitulé « Voyage » en 1993, le même qui donnera lieu à une série de petits concerts en France. Il en publiera à ce jour sept au total, dont une fameuse série conceptuelle en trois volets sobrement intitulée « Quiet life » (un clin d’œil au « Quiet music » de Steve Roach ?). L’œuvre de David Schombert, toujours très soignée, se veut dans sa globalité à la fois mélodique et accessible, nous rappelant la démarche d’un Vangelis (celui des soundtracks de films), du Mike Oldfield instrumental (époque « Songs from the distant Earth ») où celle de notre Jean-Michel Jarre national, quand celui-ci veut bien se donner la peine d’être inspiré ! David fait aussi une petite incursion dans l’univers techno à la fin des années 90, en témoigne une sympathique compilation intitulée « Electron », dont certains morceaux de bravoure seront mixés dans quelques clubs européens. En 2000, il se produira sous le nom de NEOS, patronyme abandonné depuis. Il n’est pas étonnant que la musique de David Schombert, à fort esprit et consonance cinématique, ait été utilisée pour illustrer divers documentaires, logiciels et autres jeux vidéo. Passionné de nouvelles technologies (qu’il sait mettre au profit de son art), David est par ailleurs un créateur très doué d’images de synthèse. C’est aussi un esthète en matière visuelle et graphique, en témoignent les toujours magnifiques pochettes de ses disques.

« The gates of silence » représente un virage pour le compositeur sur le plan stylistique. En effet, il y délaisse complètement les mélodies, les relents symphoniques, abandonne les boites à rythmes un peu « cheap » pour se consacrer encore davantage à la texture même du son. Il en résulte un album de pure musique atmosphérique, à travers lequel le musicien prend plaisir à nous immerger dans des univers sonores passionnants, voir totalement inédits. Le premier titre nous emmène dans un voyage nocturne tribal et caverneux, avec sa rythmique hypnotique, obsédante, qui, pour les connaisseurs, rappellera certaines créations communes de Steve Roach et de son complice Vidna Obmana. La seconde plage fige l’auditeur dans une ambiance encore plus étrange, sombre, minérale et humide, à grand renfort de bruitages naturels et de sonorités synthétiques entremêlées. Le morceau suivant nous transporte vers un climat plus serein, plus aérien aussi, avec une petite séquence aux doux relents du cultissime et classique « Mirage » de maître Klaus Schulze (on pense aussi au Robert Rich époque « Numena » et « Geometry » !). Puis c’est la redescente vers le grand trip final, pièce monolithique d’une demi-heure, véritable enchevêtrements de nappes profondes et mystérieuses, le long voyage mystique s’achevant tout en douceur par le flux et le reflux des vagues. Magique ! En résumé, « The gates of silence » est à mon sens le meilleur album, et de loin, de David Schombert. C’est en tout cas le plus mature sur le plan artistique, une œuvre dense à redécouvrir à chaque écoute, et un nouveau must de l’ambient music à savourer en boucle.

Philippe Vallin (7,5/10)

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