ZOË – Back Into The Light
Brennus Music/Socadisc
2020
Palabras De Oro
ZOË – Back Into The Light
Être submergé par un tsunami de mails tous plus racoleurs les uns que les autres ne remplacera jamais le contact de terrain. Il se trouve que je me suis fait un petit retour aux sources au Raismes Fest le 8 septembre dernier après sept longues années d’infidélité. Accédant au site parmi les tout premiers festivaliers, je tombe sur Aldo Ségard (que je ne connaissais pas) en quête, comme moi, d’oiseaux rares, immergés que nous sommes dans les bacs des disquaires. Orphelin, car lâchement abandonné par mes potos traditionnels du Raismes Fest, je suis tout heureux d’entamer ce dernier en échangeant quelques avis avertis avec Aldo sur les CD et vinyles que nous balayons lorsque, presque négligemment, il me glisse qu’il se produira en seconde position le jour même avec ZOË, un quatuor nordiste de stoner rock écumant les bords (et les bars) de la mer du Nord (et même bien au-delà) depuis près de 25 ans (tiens, tiens, c’est aussi l’âge vénérable du Raismes Fest).
Leur frontman et leader, Fred Barroit m’a indiqué que : « Le nom de notre groupe, ZOË, n’avait initialement pas de signification précise. Nous voulions quelque chose de court et percutant, facilement reconnaissable sur des affiches, t-shirts, etc. L’idée d’un prénom féminin nous a semblé original et c’est Aldo (lead guitare) qui a proposé ZOË. Par la suite, nous avons découvert que cela signifie « vie » en grec et que c’était également le nom de la première pile atomique française ». Je ne sais pas s’il bosse dans le nucléaire, mais ceci dément tout rapport avec le célèbre constructeur automobile. Et puis, « nucléaire » est un qualificatif qui sied bien à une musique qui engendre allègrement des réactions en chaîne de riffs. Ils sont venus défendre Back Into The Light, leur quatrième album sorti en 2020, six ans après Raise The Veil et un hiatus scénique de trois ans. C’est l’arrivée de leur nouveau bassiste qui a ranimé la flamme d’un stoner rock percutant, une sorte d’hybride entre Queen Of The Stone Age et Motörhead. Tout naturellement, le groupe ayant déjà écumé les scènes des festochs français, allemands, espagnols et du Benelux, son expérience lui a fait gagner sa place au Raismes Fest lors du tremplin local préliminaire organisé au printemps.
Fort de ces infos alléchantes, je décide de poser mes yeux et mes oreilles bien attentivement sur la prestation du quatuor. Et là, après un début tonitruant, patatras ! Les décibels survitaminés de ZOË font-ils péter les plombs ? S’appeler ZOË, est-ce annonciateur de problèmes électriques ? Toujours est-il qu’une panne de courant d’une dizaine de minutes renvoie le groupe dans ses starting-blocks. Immédiatement, je me dis que c’est injuste pour les quatre Calaisiens / Dunkerquois qui peineront un peu à reprendre le fil de leur show forcément raccourci, mais aussi pour l’équipe du festival, réussissant toutefois, toujours aussi bien, à allier convivialité et professionnalisme. Qu’importe, ces quelques promesses entachées sur scène méritaient une seconde chance de ma part. Alors, j’ai (re)posé mes yeux sur la jaquette affriolante de Back Into The Light et mes oreilles sur la dizaine de plages qui le composent. Et là, c’est le méga kick in your ass dès le premier titre éponyme. Il faut dire que ces accords rythmiques très graves et typiques du stoner ont le don de me donner des frissons. ZOË ne multiplie pas les mids tempi classiques dans ce style musical afin de mettre plus en valeur leur mur sonique, il fait plutôt le choix de balancer des déflagrations à plus de 120 bpm, reprenant parfois son souffle pour repartir de plus belle. Ce « Back Into The Light » est une grenade au napalm qui met d’entrée le feu à toute la galette. « In Praize Of Lazyness », « White Trash » (une introspection sur un voyage en Californie) et « Cut Class » sont du même calibre. La section rythmique est un quadrilatère à côtés égaux et angles droits (oui, bon, elle est carrée de chez carré et donc… pas en forme de losange…). Outre Fred et Aldo, ce sont Holy Capitaine (batterie) et Clément Burette (basse) qui la complètent. Ils ont redonné leur confiance à Olivier T’Servrancx (Lumberjack Feedback, Black Bomb A…) pour le son et à Goran Finnberg (Meshuggah, In Flames, Glowsun…) pour le mastering. Alors, la production est sévèrement burnée. « Voices » présente un côté plus groovy et un refrain presque pop alors que « Down In A Hole », une catharsis envers l’addiction alcoolique, laisse beaucoup plus apparaître la richesse du jeu de batterie d’Holy. « Go Like A Bomb » et « By Your Side » sont des boogie rock d’airain et sautillants vraiment taillés pour la scène avec un surprenant pont psyché sur le second. Côté chant, Fred Barroit se montre tout particulièrement convaincant comme sur « Wild Wild City » où il s’intercale avec brio entre les frappes shuffle de caisse claire et les riffs breakés pour raconter sa relation ambivalente avec sa cité calaisienne. Le côté franchement lourdingue du stoner réapparaît sur le début du pachydermique « Band Of Brothers » avant que le rythme ne finisse par s’accélérer à nouveau. Les soli de guitare sont réduits à la portion congrue, car le groupe joue à fond la carte des riffs. Aussi, c’est pourquoi j’assimile la section rythmique du groupe à ses quatre composantes (et non seulement le traditionnel duo basse/batterie), car elles leurs sont complètement dédiées. J’avoue que j’aurais aimé qu’il y ait plus de soli, mais la variété des riffs tempère largement ce manque.
Ainsi donc, l’écoute du manifeste de stoner rock qu’est ce Back Into The Light m’a permis de confirmer tout le potentiel des Nordistes de ZOË, seulement entrevu sur la scène du Raismes Fest, dont le retour en pleine lumière leur permet d’enrichir un arsenal de grenades tactiques qu’ils peuvent continuer à dégoupiller sur les planches de France et de Navarre.
crédit photos Vincent Gilot – Bluesygirl
https://zoestonerrock.bandcamp.com/
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