Yes – Like It Is : At The Bristol Hippodrome
Frontiers Records
2014
Christophe Gigon
Yes – Like It Is : At The Bristol Hippodrome
Tiens, un nouvel album live de Yes. « Pose-le sur la table de chevet, chérie, je l’écouterai à l’occasion. » Voilà, en substance, le genre de réaction attendue lors de la sortie d’une énième captation en public des Anglais vieillissants. Même le fan transi ne se réchauffera pas cet hiver à l’écoute de ces titres entendus des centaines de fois depuis bientôt quarante ans. Du reste, aucun morceau présent dans ce coffret audiovisuel n’est paru après 1977. Trêves de mesquineries, il faut bien avouer que le but de la tournée incriminée était de présenter au public l’intégralité de leurs trois albums majeurs que sont, dans l’ordre chronologique, « The Yes Album » (1971), « Close To The Edge » (1972) et « Going For The One » (1977) qui marquait d’ailleurs le (premier) retour au bercail du claviériste à cape d’or Rick Wakeman. On est, du reste, en droit de se demander pourquoi le magnum opus qu’est « Close To The Edge » n’est pas présent sur cette édition de luxe. L’exécution ne valait-elle pas la peine d’être gravée pour la postérité ?
Au jeu des chaises musicales (chantantes même !), le gagnant, pour le moment, semble être le jeune Jon Davison (au patronyme qui joue de paronomase avec le nom du chanteur originel Jon Anderson ), qui a remplacé le remplaçant qu’était alors le Québécois Benoît David (chanteur sur le pourtant bon « Fly From Here » paru en 2011). Vous suivez ? En gros, chaque fois qu’un chanteur manque de souffle, on le remplace par un clone et le tour est joué. Il est vrai qu’à l’instar d’autres groupes comme Queen ou AC/DC, il semble bien difficile d’imaginer un vocaliste au timbre radicalement différent s’intégrer parfaitement dans les compositions byzantines de ce dinosaure du rock progressif. Avouons de suite que les deux leaders successifs précités possèdent néanmoins un organe (la voix !) magnifique. N’en déplaise aux admirateurs du line up de l’âge d’or.
Le reste de l’équipe est composé des vétérans que sont Steve Howe (guitare), Geoff Downes (claviers), Alan White (batterie) et l’indéboulonnable Chris Squire à la basse Rickenbacker clinquante. On était en droit de s’inquiéter quelque peu au vu de l’âge avancé des messieurs. N’allait-on pas assister à une réunion d’anciens combattants cacochymes et ventripotents ? Force est d’avouer que si les papys ont sensiblement décéléré les tempi d’origine, les interprétations ne sont en rien ridicules et la fraîcheur amenée par le petit nouveau apporte une plus-value intéressante à ces classiques que restent « Starship Trooper », « I’ve Seen All Good People » et, par-dessus-tout, ce moment de grâce que constitue « Awaken », morceau qui, à lui seul, détient les « clefs de l’ascension », pour reprendre l’expression du mage Anderson.
On pouvait également craindre que Geoff Downes se sente un peu gêné au moment de jouer les partitions écrites par le virtuose Rick Wakeman. Certes, le membre d’Asia apparaît comme techniquement moins à l’aise que son prédécesseur, mais il compense ce handicap par une banque de nappes de toute beauté qui, contre toute attente, transforment le « décor sonore » de compositions que l’on croyait connaître par cœur.
Le pendant vidéo de cette prestation semble superflu sauf si vos invités désirent jouer au jeu des différences (plus de ventre, moins de cheveux, etc.) entre les concerts mythiques de l’ère « Yessongs » et ceux d’aujourd’hui. On ne peut, encore une fois, que regretter de ne pas pouvoir entendre et visionner le déroulement complet des trois pistes constituant ce fer-de-lance de la musique des années soixante-dix qu’est « Close To The Edge ».
There are no words to describe how boodciaus this is.