True Widow – Circumambulation
True Widow
Relapse Records
Langoureux, lascif, True Widow est une petite lumière, une lucarne entrouverte qui laisse poindre une lumière réconfortante, un espoir aussi vain qu’apaisant. Son tempo est monotone, lent jusqu’à la nausée, le son quasi flasque, presque fantomatique. Les voix, féminines et masculines, suivent un chemin étroit où on n’élève pas le ton. On se laisse glisser, on se laisse prendre en tendant les doigts. Quelque-part, on espère qu’une main amicale voudra bien accepter cette invitation à l’abandon, car ne vous y trompez pas, « Circumambulation » exhorte en silence, c’est un appel à peine audible. À l’étrangeté du premier contact se découvre la pâleur d’un visage qu’on désire caresser. Il se discerne ici un romantisme larvé, un réalisme des sentiments, doux, empêtrés, timides, maladroits presque. Et c’est cette confusion qui attire nous force à rejeter une oreille sur la chose, encore et encore. « Circumambulation » s’apprivoise, nous laisse le temps de le faire, d’autant plus que le groupe ralentit le temps, justement.
Il nous aide, nous interpelle avec la douce voix monocorde de Nicole Estill, nous plonge dans le marasme d’un Texas perdu, coupé du reste du monde. D’une apathie métaphorique etsensitive, avant tout, « Circumambulation » ne cherche pas à nous désespérer, mais creuse plutôt une voie de sortie, une échappatoire, cotonneuse, insaisissable, et aussi rêche que feutrée, avec une certaine forme de beauté dans l’immobilisme. Le temps qu’on cherche à stopper sans y arriver, alors on le ralentit. « Circumambulation » capte par ses refrains disséminés, son côté jusqu’au-boutiste hérité des disparus Codeine, ce fil du rasoir qui se tord et se tend constamment, toujours à la limite, sur la frontière. Il laisse l’impression de bras tendus qui viennent nous enlacer dans l’obscurité. Il a besoin de temps, autant que le diamant sur le sillon du vinyle, et, à la fin, il se délecte complètement.
« Circumambulation » est une percée sans aventures ni risques, une efficacité artisanale, sobre, sans touches expressionnistes. Rien de trop, mais l’aventure est au coin de la route, et « Circumambulation » en est juste l’une des plus belles invitations.
Jérémy Urbain (8/10)