Toto au Zénith de Paris le 28 mai 2015

Toto Band

Toto en concert au Zénith de Paris le 28 mai 2015

Groupe dont le nom doit davantage à la langue que la ministre de l’éducation nationale actuelle souhaite voir définitivement « morte », que les blagues du personnage éponyme, TOTO posent leurs valises à Paris pour la cinquième étape d’une tournée destinée à promouvoir la sortie de leur nouvel album, ‘XIV’ (lire la chronique ici). Après deux filtres, le contrôle des billets, et le placement, la première partie, dont le nom reste confidentiel jusqu’à son entrée en scène, se présente avec la précision d’un horloger à l’heure indiquée sur le billet. On imaginait un groupe AOR (rock mélodique) comme les excellents suédois de Work Of Art (chronique à découvrir « Framework » ici), autre signature du label actuel de la formation qui nous intéresse. Mais, déjouant tous les pronostics, c’est une artiste d’expression française qui va nous accompagner pendant une bonne demi-heure. Rhythm’n’blues et soul en fond sonore, chanson française et enfin rock mélodique teinté de multiples influences : il faut croire que les organisateurs jouent à fond la carte du « toto ». Sur le choix de ce nom, cet entretien permet d’ailleurs d’y voir plus clair :

Mais ne nous égarons pas. Nous nous étions arrêtés sur l’invité-surprise ouvrant le bal. Aussi étonnée que nous de sa présence, c’est donc Zaza Fournier qui fait croiser la chanson française avec les rythmes urbains auxquels son compagnon pianiste contribue en s’improvisant beatbox humaine. Imaginant « Zaza comme une cousine éloignée de Toto » et tutoyant le public, la jeune femme arrive à le captiver par son bagou et un univers singulier. En effet, les mains libres ou manipulant un accordéon, elle déroule une scansion empreinte de la nonchalance de Marlene Dietrich et qui chavirerait sur une mer changeante. Même si, dans ses harangues, elle peine à faire participer un public qui semble s’être réservé pour la seconde partie, elle n’oublie cependant pas de le remercier quand il applaudit ses performances.

Clip officiel de la chanson « Paupières closes » :

Un bon hors-d’oeuvre avant le plat de résistance, qui nous est servi bien épicé dans la demi-heure qui suit. Près de 35 ans séparent le premier du second morceau du menu de la tête d’affiche. Et d’emblée, on se doute que les mets qui vont suivre s’appuient sur des recettes qui ont traversé les décennies tout en se jouant des tendances du moment. Autour d’anciens du groupe (Steve Porcaro, David Paich, David Hungate, Steve « Luke » Lukather, Joseph « Joe » Williams), c’est un jeune Shannon Forrest enthousiaste qui remplace le légendaire Simon Phillips à la batterie. Il tient son rôle a merveille, ne se laissant pas intimidé par les percussions colorées et ensorcelantes d’une autre légende vivante, Lenny Castro, à ses côtés tout au long du show. Les choristes Jenny Douglas et Mabvuto, au talent que Joe cherche à mettre en avant dans des duos passionnés, apportent une coloration supplémentaire aux titres tour à tour ensoleillés et embrumés.

Retour sur les anciens. Luke délivre ses solos possédés avec la même « dévotion » que John McLaughlin et Carlos Santana lors de leur collaboration de 1973. Paich et Steve se complémentent l’un l’autre, le premier dans l’école du swing, le second dans les labyrinthes spatiaux de l’école berlinoise d’Edgar Froese. La voix de Joe donne toujours autant de frissons que le cri d’un loup la nuit dans une forêt brumeuse. Comme TOTO, ce n’est pas un leader et des accompagnants, les titres ont été choisi de manière a ce que trois des autres membres mettent en avant leurs qualités vocales. Ainsi en va-t-il des titres comme « Stranger In Town » (Paich), « Takin’ It Back » (Steve), « Without Your Love » (Luke). Enfin, David Hungate, le bassiste des débuts, se fait bien discret, son calme tranchant avec l’agitation de ses camarades. Il est néanmoins ovationné quand viennent les présentations.

Plus sombre, l’ombre des frères disparus Jeff et Mike Porcaro plane sur le Zénith. D’une part, tout de noir vêtus (à quelques rares exceptions près), les artistes portent le deuil du bassiste Mike, dont la défaite dans la bataille contre la Sclérose latérale Amyotrophique a été presque concomitante de la sortie du nouvel opus de ses anciens compagnons de route. En outre, là où Steve informe qu' »il ne serait pas là si ce n’était pour honorer la mémoire de ses frères », Luke dédie « Road Goes On » aux deux étoiles qui ne brilleront plus dans la constellation TOTO.

Dans ce tour d’horizon de la carrière du groupe, se retrouvent donc sans surprise les tubes imparables « Rosanna », « Hold The Line » et « Africa », tout au long desquels le public reprend avec entrain les refrains et frappe avec frénésie des mains. Quand Joe fait répéter au public des vocalises improvisées, on pense même au regretté Freddie Mercury.

Un exemple des fameuses vocalises improvisées de Freddie :

Comme un concert sans entorse aux versions studio ne serait pas un concert, la formation se permet quelques « échappées ». Quand un blues inattendu sur « Without Your Love » se conclut par un solo à faire fondre Eddie Van Halen, c’est un boogie rock endiablé qui vient dynamiter « Pamela ». Là où « Rosanna » se transforme en une jam dont les Grateful Dead seraient fiers, ce sont en revanche quelques notes de notre hymne national qui lui permettent de se terminer en pompe. On se surprendra même à verser une petite larme quand une sublime improvisation piano-guitare électro-acoustique précède l’emporté « White Sister ».

Groupe rompu à l’exercice de la scène, TOTO nous a fait passer une belle soirée. Présentant une carrière sans faille, allant de pair avec une éthique professionnelle irréprochable, ces dignes représentants de l’AOR continuent à être un exemple pour toute formation qui veut briller sans mordre à l’hameçon trop tentant d’un show-business cynique et dénué de tout scrupules.

Lucas Biela

http://totoofficial.com/

3 commentaires

  • Merci pour votre article, cependant j’ai une longue remarque sur l’organisation du concert, Je m’étais dit que je resterai sur la réserve mais j’ai quand même besoin de vider mon sac.

    Avec ma femme, mon beau – frère et des amies, nous avons acheté des places pour le concert de Toto au Zénith le 28/05/2015, places à 89,90 € au premier rang (voir photo). Nous nous sommes retrouvés devant un rideau noir et des câbles (voir photo).
    J’avais fait les concerts de TOTO à Paris en 2011 et 2013 et déjà à l’époque, tout était assis mais généralement, dès le début du concert les gens se levaient et venaient naturellement à la barrière, devant le groupe. La sécurité du Zenith n’a jamais rien dit et tout c’est toujours bien passé et je n’ai jamais entendu quelqu’un dire quelque chose, on n’a jamais gêné quelqu’un.
    Cette année, quand je me suis aperçu que, de ma place si chère au 1er rang, on ne voyait rien, je me suis dit « pas grave ça bouger un peu », et effectivement dès le debut du concert le groupe a demandé aux gens de se lever et de venir vers eux, nous avons donc executé les ordres du groupe !!! Tous à la barrière comme un concert normal !!!
    C’est là que tout a dérapé, la sécurité privée embauchée par veryshow (société Selio) a vite déjanté : trois agents de sécurité sur une dame de cinquante ans mise à terre (résultat : son genou qui a doublé de volume), un enfant de 8 ans bousculé, pour ma part on m’a attrapé par mon sac à dos et jeté en arriére jusqu’à ce qu’un des malabars commence à toucher à ma femme … les agents de sécurité on même formé une chaine comme à une manifestation pour nous repousser !!!
    Heureusement que les spectateurs ont tous été respecteux envers les agents de sécurité, et qu’aucun coup n’est parti… Je suppose que le concert aurait été stoppé si les gens avaient été aussi intolérants que les agents de sécurité.
    Personnellement, j’ai tellement été repoussé que je me suis retrouvé presqu’au gradin de gauche, quand j’ai voulu regagner ma place, là encore la sécurité a voulu m’en empêcher. Il a fallu que je m’énerve pour enfin m’asseoir ma place devant laquelle il y avait un homme de 1,90 m qui bouchait la seule petite vue que j’avais de la scène. Il a fallu à nouveau que je dise à un autre gars de le faire bouger pour voir un bout de scène, car là ça faisait beaucoup d’un coup.
    Cela faisait 30 ans que je rêvais de voir Lenny Castro que je n’ai même pas pû apercevoir, j’ai acheté les places les plus chères au 1er rang, et finalement l’organisation a pourri mon rêve, une place face à un mur noir… Et si les gens trouvent que le groupe n’a pas été au mieux ce soir là, c’est uniquement dû aux places assises et au manque d’ambiance qui en a résulté …
    Le lendemain, j’ai eu la chance de voir le groupe au Luxembourg c’était vraiment le jour et la nuit.

    • Lucas Biela

      oui, effectivement, ce rideau noir m’a également empêché de voir Lenny Castro, je n’ai pas compris son utilité d’ailleurs. J’aurais du le mentionner, car le percussioniste a vraiment brillé ce soir-là. Mais avec le son, on peut imaginer le reste. Je regrette ce qui s’est passé avec la sécurité, je n’étais pas au courant.

      • le bay

        Bonjour, je ne sais pas si mon commentaire sera publié mais je tiens à préciser que mon ligament antérieur est arraché et vu le nombre de photographes présents je m’étonne qu’aucun d’eux n’ait immortalisé la scène qui se déroulait à 50cm où 3 vigiles étaient sur moi comme des chiens sur un os.

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