Tony Levin – Pieces Of The Sun

Pieces Of The Sun
Tony Levin
2002
Narada/Virgin

Tony Levin – Pieces Of The Sun

Tony Levin est décidément un authentique roi de l’éclectisme qui frappe toujours là où on ne l’attends pas. Cette véritable star de la basse « multifacettes » (on ne compte plus le nombre d’artistes célèbres avec lesquels ce dernier a collaboré, et tout  ça sans jamais attraper la grosse tête !) a en effet aligné ces dernières années toute un série de projets musicaux originaux, divers et variés. En collectif ou en solo, on citera pêle-mêle ses incursions dans le domaine de la world music (avec son intimiste « World Diary »), celui de la new-age classieuse (« Waters Of Eden »), des expériences musicales insolites (From the Caves Of The Iron Mountain, enregistré en trio dans une grotte préhistorique !), du progressif « musclé » (Bozzio/Levin/Stevens ») ou carrément métal (les deux formidables Liquid Tension Experiment, enregistrés avec des musiciens de Dream Theater. Sur ce nouvel album studio, on retrouve l’ensemble des membres fixes du Tony Levin Band créé en 2000 autour de la production de  « Waters of Eden » (dont je vous épargnerai la liste des invités, tout prestigieux soient-ils), à savoir Larry Fast aux claviers (lui aussi ancien collaborateur de Peter Gabriel à l’instar de notre « bass player hero »), Jesse Gresse aux guitares, et pour finir le vieux complice Jerry Marotta à la batterie.

Cette fois-ci, le groupe nous offre une collection de 12 titres complètement ancrés dans la culture progressive, à savoir bouillonnante de mélanges et d’influences diverses. Ici, le calme n’est pas l’atmosphère qui prédomine comme c’était le cas sur « Waters of Eden » (hormis peut être sur « Aquafin » et ses guitares acoustiques en forme de ballade, ou encore le jazz  éthéré de « Blue Nude Reclining »). L’album est à ce point dynamique qu’on l’imaginerait sans peine sortir tout droit de l’écurie Magna Carta, label américain spécialisé dans le progressif ultra-technique tendance métal. Notre bassiste chauve a d’ailleurs été crédité dans « Hundred Year Flood », excellent disque de Magellan, l’un des principaux fleurons du label.

Petit tour d’horizon : « Pieces of the Sun » démarre donc en fanfare avec « Appolo », titre violent et alambiqué (qui, détail amusant, ressemble à s’y méprendre au générique du défunt « Vrai Journal » de Karl Zéro ! Écoutez et vous comprendrez…). Moins en ébullition mais tout aussi énergique, « Geronimo » est quant à lui à rapprocher du travail accompli par Trey Gunn (autre musicien de la galaxie crimsonienne, est-il besoin de le rappeler) sur son très réussi « The Joy Of Molybdenum, les tablas et autres instruments orientaux en moins. On y retrouve en effet la même hybridation jouissive et  étonnante entre le King Crimson des années 80 et une sorte de jazz-rock qui n’aurait pas peur de se mouiller hors de ses codes habituels.

Côté surprise, à noter sur cet album la reprise d’un inédit de Peter Gabriel avec « Dog One ». Impossible ou presque de ne pas se douter de quelque chose à l’écoute de la mélodie et des arrangements vocaux si caractéristiques du maître ! Autre reprise pour le moins inattendue personnifiée par le sublime « Phobos », remake d’un titre synthétique enregistré en 1978 par le groupe du claviériste Larry Fast, plus connu  à l’époque sous le nom de… Synergy. Ce titre envoûtant et hypnotique dont la puissance monte crescendo n’est pas sans rappeler le UK de la grande époque, en plus « cosmique » toutefois. Les claviers mélodiques, aux sonorités certes un peu datées, sonnent en effet exactement comme ceux d’Eddie Jobson sur le classique « In The Dead Of Night ». Décidément rien à niveler par le bas ou à jeter au sein de cet album somptueux et incroyablement varié (tout comme l’œuvre de son géniteur).

« Pieces of The Sun » est un disque riche d’idées et d’audace tout en restant consensuel, fruit du travail collectif d’un VRAI groupe talentueux et parfaitement rôdé, qui aussi me conforte dans la conviction que Tony Levin est bien plus qu’un simple « musicien d’accompagnement » pour pop stars, mais au contraire un authentique créateur qui sait flirter à l’occasion avec le génie.

Philippe Vallin (7,5/10)

http://www.papabear.com/

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