The Tea Party – The Ocean At The End
The Tea Party
Inside Out
Il y a dix ans sortait « Seven Circles« , album très attendu de ce groupe au statut quasi culte, The Tea Party, adepte d’un rock aux accents Led Zeppelin mâtiné d’influences moyen orientales. Celui-ci, aussi efficace fut-il, a été une grande déception pour tous les fans, voyant leur formation canadienne préférée perdre beaucoup de son âme dans un album qui bombardait un rock pêchu et sévèrement burné, mais sans retrouver la ferveur des précédents opus. Ce fut leur chant du cygne car peu de temps après, Jeff Martin, leader charismatique et maitre à penser du combo, annonçait son départ pour créer quelque chose qui lui ressemblait plus, laissant ainsi ses deux compères bras ballants. Trois ouvrages solos plus tard et voici qu’une tournée de reformation a lieu, en amont de l’écriture d’un nouveau CD. En pleine forme et avec une confiance renouvelée, The Tea Party s’isole pour pondre 10 compositions et une reprise, en reprenant les choses à partir de « The Interzone Mantras », paru en 2001. Sur nombre de morceaux le groupe a saupoudré des références à leurs précédents efforts, de « Splendor Solis » à « The Interzone Mantras », comme pour laisser des balises aux fans et leur dire qu’ils n’oublient pas leur passé, leur son, mais qu’ils évoluent en quelque sorte vers un nouveau départ. The Tea Party 2.0 en somme.
Ainsi, tous les instruments (ou quasi) moyen-orientaux ont disparus. Pour autant, les mélodies se rapportent beaucoup à leur ancien style, tout en gardant un cap plus accessible. C’est d’ailleurs ce point-ci qui pourra déstabiliser les fans en attente de quelque chose de plus sombre, de plus ésotérique, car ici, point d’exploration du côté obscur de la force, mais un album diversifié, mélodique, plus doux que le précédent. « The Ocean At The End » nous est servi avec une instrumentation hors pair, un travail méticuleux sur la production de chaque chanson, une sophistication des arrangements, quelques accents assimilés au courant progressif, et une efficacité sans pareille. Tout juste pourra-t-on soupçonner The Tea Party d’ouvrir son art aux radios, mais c’est un peu normal pour un groupe qui souhaite conquérir le monde ! Il faudra donc écouter et réécouter l’album pour en saisir les subtilités qui pourraient échapper aux apparences.
« The L.O.C » n’est pas l’ouverture attendue, on entre dans le vif du sujet par un titre mélodique et efficace, potentiel single, avec de belles guitares rutilantes, un chant des plus prenants, grave, ténébreux, fascinant. Jeff Martin est une des plus belle voix du monde, et ce n’est pas exagéré. L’intro de « The Black Sea » aurait pu figurer sur le dernier album du grand Robert Plant, une inspiration de toujours, avant un heavy rock typique, rappelant les belles heures de « The Edges Of Twilight », avec un très beau solo. La basse tellurique de Stuart Chatwood et la batterie impressionnante de Jeff Burrows complètent un tableau rock de haute volée. Un must ! Les accents moyen-orientaux de « Cypher » qui se mélangent aux riffs de guitare sont également un régal. Une pause intervient ensuite avec « The Maker », reprise d’un titre de Daniel Lanois (sur l’excellent « Acadie »), chanteur canadien dont ils avaient déjà repris l’hymne « The Messenger » avec brio, il y a très longtemps. Encore un clin d’œil au passé avec une chanson qui aurait très bien pu convenir à un Peter Gabriel.
« Black Roses » est une balade Zeppelinienne, comme on aime à retrouver sur les albums du combo. Petite nouveauté world : les percussions de « Brazil » et un excellent travail de la batterie de Jeff Burrows. On pourrait penser, avec l’intro de « The 11th Hour », que le groupe va nous asséner un nouveau « The Bazaar », mais il n’en est rien. Dommage ? Sans doute pour le fan de la première heure que je suis, mais cette simple évocation suffit à lancer un des meilleurs titres de l’album, avec un superbe travail sur les claviers (tout du long tenus avec maestria par Stuart Chatwood lui-même) et une construction assez brillante. Impossible de ne pas penser à « Transmission » sur « Submission », un peu la suite de celui-ci, donc hautement réjouissant et plutôt métal mélodique.
« The Cass Corridor » est le titre hard blues qui tue, plaisir immédiat, avec en plus une référence à leurs confrères de Rush plutôt sympa. La balade imparable se concrétise avec « Water’s On Fire », calibrée FM, avec un final en apothéose et un solo de guitare dans les étoiles. Quant à « The Ocean At The End », il s’étale sur plus de 8 minutes, grâce aux rajouts texturaux de Stuart Chatwood. Un titre atmosphérique comme le groupe n’en a jamais joué, avec, excusez du peu, les interventions du légendaire Ian Anderson à la flûte. Lui aussi n’a jamais sonné de cette façon. Un titre exceptionnel, hypnotique, avec encore une fois un solo blues magnifique de dextérité, avant qu’il ne flirte avec Pink Floyd sur le final et sur l’extension qui en découle. Un autre must, plein de surprises.
Et pourtant, malgré tout cela, l’on se demande vers où le groupe va axer ses prochains efforts. Il est certain que l’identité de The Tea Party reposait sur ce mélange extraordinaire de heavy rock, de gothique, et d’influences moyen-orientales. Il ne reste que le premier item et le troisième en filigrane. « The Ocean At The End » est plus direct, plus ouvert, mais aussi complexe dans les arrangements. Il va sans dire que ce résultat est l’œuvre d’experts en la matière. Le groupe s’est un peu assagi, la maturité peut-être, mais l’efficacité et la beauté du tout remportent l’adhésion. Croisons les doigts pour que The Tea Party débarque en France et nous en mette plein la tête !
Fred Natuzzi (8/10)
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Magnifique album et fort beau papier 🙂
un groupe génial … super nouvelle que ce come-back, groupe découvert grâce a Rockstyle (que tu connais très bien bertrand) et l’album « The Edges of Twilight »