The Midnight – Heroes
Counter Records
2022
Palabras De Oro
The Midnight – Heroes
J’adore les roadtrips. OK, je vous raconte ma life, mais j’aime bien mettre du contexte dans mes chroniques. Pour ceux qui ne sont pas allés directement au second paragraphe, je dirais que les roadtrips permettent de dénicher des lieux qu’on ne verrait jamais en prenant l’avion, surtout que moi, ce sont les chemins de traverse que j’emprunte. Ma dernière expédition a consisté à visiter de long en large la Tchéquie et en particulier sa capitale mythique. Problème : les Tchèques sont d’une froideur légendaire. Mais, pour une fois, le principal défaut des roadtrips, à savoir la solitude, surtout le soir, s’est trouvé gommé par une rencontre inédite, celle de Sam, un Jordanien presque autant dépaysé que moi, bien que Praguois depuis plusieurs années. Après quelques Kozel (bien meilleures que l’universelle Pils Urquell), je me rends compte que je suis en fait en face du parfait guide improvisé, pas avare de tips pour visiter la capitale et la Bohème entière. Cool, mais voici que j’entre dans la quatrième dimension lorsque, après m’avoir fait écouter quelques sucreries pop mainstream, il dégaine un étonnant « Golden Gate » tiré de l’album Heroes, qui me fait directement entrer dans le monde de The Midnight. Normal, vu l’heure avancée de la nuit.
Ce duo américain est formé de l’auteur-compositeur-interprète Tyler Lyle, basé à Atlanta, et du producteur, auteur-compositeur et chanteur danois Tim McEwan, basé à Los Angeles. Le motto de The Midnight est une bonne description de son univers : « Un sentiment de nostalgie et la conscience que rien ne dure éternellement ». Cette nostalgie et la mélancolie qui s’y greffe sont principalement incarnées par le timbre de voix envoûtant de Tim McEwan dont les changements de ton sont d’une justesse impressionnante. C’est bien simple, on croirait qu’on lui a greffé les cordes vocales de Morten Harket (a-ah).
Démonstration est faite dès le premier titre de Heroes, ce fameux « Golden Gate » qui m’a fait remuer la queue (je précise que cette métaphore est purement d’inspiration canine). Tout d’abord, la rythmique electro s’installe progressivement et tranquillement, puis la voix de Tim illumine cette trame d’une clarté proprement cristalline. Alors, on se laisse entraîner dans cet ensemble lumineux baigné par cette voix inlassable. Le temps s’écoule indiciblement et merveilleusement jusqu’à la rupture façon « In The Air Tonight » cadencée par une batterie alourdie, en plus court cependant. Wow, quelle magie ! Ensuite « Brooklyn. Friday. Love » lorgne du côté de Muse par la rythmique de basse avant de piétiner allègrement les platebandes de Def Leppard pour un refrain qui cartonne et réveille brutalement. Un chouette titre alternatif qui donne la banane. Il faut dire que ce détour vers les sphères hard rock est complètement assumé. Heroes est le dernier volet d’une trilogie d’albums incluant Monsters sorti en 2020 et Kids en 2018 dont plusieurs chansons sont influencées par les groupes de hair metal et de heavy metal. Si le popisant « Heartbeat » et la ballade convenue « A Place Of Her Own » font preuve d’un classicisme très (trop ?) assagi, « Heroes » remonte la barre sur un rythme nerveux ainsi que des accords et des chœurs typés Toto à partir du pont central. La ballade asynchrone « Heart Worth Breaking » se montre moins convenue, proposant même un très joli solo de guitare avec un chant mélancolique et harmonieux agréablement renforcé par des chœurs judicieux. The Midnight a concocté une tracklist très intelligente pour Heroes en intercalant les ballades entre des titres entraînants comme un « Loved By You » avec toujours cette voix envoûtante rehaussée par le chant féminin et un refrain accrocheur. Ensuite, « Aerostar » souffre un peu d’une rythmique trop métronomique, mais un fabuleux travail sur les vocaux lui redonne suffisamment de couleur pour se montrer finalement très convaincant. Et hop ! Un petit coup d’accélérateur est redonné par le dilemme « Change Your Heart Or Die » alors que la batterie redevient plus versatile le temps d’une « Avalanche » empreinte de mélancolie. Décidément, The Midnight s’attache à cocher toutes les cases des genres musicaux en repassant du côté de la pop le temps d’un « Souvenir » dont on n’oubliera pas le refrain accrocheur. Le court « Photograph », pas celui de Def Leppard cette fois-ci, met une dernière fois en évidence la superbe voix de Tim alors que l’instrumental très planant « Energy Never Dies, It Just Transforms » termine en beauté ce fort joli opus. Satisfait, Lyle déclara « Je me suis intéressé à la psychologie des profondeurs et à cette notion d’étiologie, à la façon dont un être humain se forme ». En termes de profondeur, Heroes marque une évolution du duo vers un paysage musical beaucoup plus étoffé, car explorant des territoires bien plus étendus que ceux essentiellement dédiés aux synthés précédemment.
Cette double et fabuleuse rencontre, amicale et musicale, m’a permis d’accoucher (sans remuer la queue cette fois-ci) d’une chronique émerveillée et née au cœur de la nuit, lors d’une soirée praguoise alanguie. Et encore, je ne parlerais pas de celle que nous enchaînâmes à Dresde en compagnie de Fred, mon rédac chef préféré (c’est facile, je n’en ai qu’un) où le fameux Sam fut initié par le papa du premier aux « fuck PSG » des ultras Lyonnais. Ah si, j’en ai parlé ??? Bah tant pis, désolé… surtout pour les Lyonnais eh eh !!!
Dédicace spéciale à Sam et Tony
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